19222.hr - Illustration Quels bâtiments d’élevage porcin pour demain ?
Immersion tour à tour des citoyens et des professionnels dans des cubes 3D pour s’imprégner des nouvelles ambiances des bâtiments de demain.

Dossier technique

Quels bâtiments d’élevage porcin pour demain ?

À l’heure où les attentes de chacun divergent, l’association Lit Ouesterel a fait le pari d’imaginer collectivement des bâtiments innovants en santé et bien-être animal, en menant une démarche participative, impliquant professionnels et grand public.

Après avoir mené un sondage Ifop auprès de 1 000 Français pour identifier et comprendre leurs attentes, citoyens et professionnels ont été sollicités pour réfléchir à des idées permettant d’y répondre. Au total, ce sont près de 200 propositions, permettant de concevoir des bâtiments innovants, qui ont été recueillies et matérialisées sous la forme d’un jeu de cartes. Un groupe de travail composé d’une trentaine d’experts d’horizons variés (éleveurs, techniciens bâtiment, épidémiologiste, éthologue, sociologue, ergonome, association welfariste ou encore distributeur) s’est ensuite réuni lors d’ateliers de co-construction pour sélectionner et combiner les cartes entre elles. 

4 concepts d’élevage innovants

Au final, 4 concepts de bâtiments d’élevage innovants, présentant une gradation dans le degré d’innovation en santé et bien-être animal, sont nés de ce travail collectif. Les principales exigences portent sur l’accès extérieur, la diminution de la densité, l’augmentation de la lumière, l’enrichissement du milieu de vie, dans le but de favoriser leur acceptabilité sociale, tout en tenant compte de ce qui est techniquement réalisable et économiquement viable pour les éleveurs. Deux d’entre eux sont accessibles au plus grand nombre de consommateurs (marché de masse) avec des bâtiments fermés ou semi-ouverts, deux autres correspondent plus à des segmentations avec des bâtiments sur courette ou ouverts. 

Illustrés sous forme d’esquisses dans un premier temps, puis de visites virtuelles dans un second temps, pour plus d’immersion dans les bâtiments prospectifs imaginés, ces 4 concepts d’élevage ont vocation à amorcer les échanges autour des futurs modes de logement des animaux et identifier les impacts, positifs et négatifs, qu’ils pourraient entraîner pour les professionnels tout comme pour les citoyens-consommateurs. 

Pour ce faire, les citoyens ont visité un élevage standard actuel en immersion virtuelle, suivi d’une présentation des 4 projets innovants, en 3D. Une analyse des coûts économiques ainsi que des conséquences de ces bâtiments sur les différentes performances d’élevage (travail, environnement, …) a été entreprise, à dire d’experts. « Car dans les 4 concepts, l’augmentation du bien-être animal s’accompagne d’une baisse des performances technico-économiques », note Morgane Leroux, de l’association Lit Ouesterel, présentant le projet lors du colloque RMT Batice à Rennes, le 15 février. 

Pas de consentement à payer plus

Et elle précise : « Et si l’acceptation sociétale est croissante selon les projets, elle n’est pas suffisante pour un consentement à payer plus. » Cette évaluation multicritère s’est vue compléter par l’analyse de la perception et du consentement à payer des consommateurs pour ces différents bâtiments, grâce à la réalisation de 40 entretiens semi-directifs. 

Des projets à affiner

La présentation de ces 4 projets va se poursuivre. En fonction des retours, les projets vont être affinés jusqu’au coût pour chacun d’entre eux. « Intégrer le bien-être animal et l’acceptation sociétale dans la conception des bâtiments semble possible, à l’image de ces deux exemples décrits ci-contre, mais cela nécessite de réunir tous les acteurs autour d’une table, pour éviter d’aller dans une impasse », et en initiant au préalable les personnes extérieures à l’agriculture, pour parler tous le même langage. 

Une moindre densité

Le second projet s’articule autour de petits bâtiments intégrés dans le paysage, isolés les uns des autres pour des raisons sanitaires, équipés de panneaux photovoltaïques en toiture pour de l’autoconsommation, les eaux pluviales sont récupérées pour le nettoyage et le flushing dans les bâtiments. La verraterie et le bâtiment gestante sont combinés. Dès l’insémination, les lots de truies sont gérés par groupe collectif de 100 avec mélange de bandes avec une densité standard ; 2/3 de la surface en gestante sert de zone de couchage, avec doseur de paille automatique ; la paille servant d’enrichissement du milieu. Les bâtiments de maternité et de post-sevrage – fermés – sont eux aussi combinés, avec de grandes fenêtres sur l’extérieur et entre les salles. Ce concept s’élève à 123 % de surcoût par rapport à un élevage standard de référence. « Les Français sollicités perçoivent des améliorations mais restent surpris par la présentation de l’élevage standard. C’était à leurs yeux la situation minimale qui devrait exister dans les élevages. L’omniprésence de béton, de tubulaires, donne un univers gris et triste. Ils n’ont pas compris l’intérêt de la présence de sols pleins à tous les stades physiologiques, la brumisation… Cette incompréhension n’amène donc pas de consentement à payer plus. Cependant ce concept répond à une de leur problématique : continuer à consommer de la viande de porc à la même fréquence hebdomadaire, avec un prix abordable, le prix état le 1er critère dans leur acte d’achat », abonde Morgane Leroux.

L’accès extérieur, le standard minimum

Le 3e projet, avec des bâtiments lumineux ouverts sur courettes en gestante et engraissement, reste incompatible entre l’attente des professionnels et celle de la société : « Les sols en caillebotis béton et l’avancée totale du toit sur la courette laissent le citoyen sur sa faim, ne donnant pas l’impression d’être à l’extérieur. » Le 4e projet est quant à lui en rupture avec les bâtiments existants : un unique bâtiment en bois avec murs et toiture végétalisés, optimisant les ressources naturelles, regroupe plusieurs stades physiologiques (truies allaitantes et porcelets) ; il est ouvert sur l’extérieur (courettes et parcours extérieurs), sans contention en maternité (truies bloquées uniquement pour l’IA), avec des aires de vie différenciées et des accès en extérieur. « Parti d’une feuille blanche, le groupe a imaginé un accès à une aire de vie extérieure qui s’ouvre sur un parcours agroforestier, sauf en maternité et en post-sevrage. Mais si le surcoût de l’investissement n’est estimé qu’à +2 %, il n’a pas été chiffré les pertes de rendement de la conduite d’élevage, ni les conséquences sur la santé et l’organisation du travail. C’est cependant le concept qui recueille la meilleure acceptation sociétale, représentant l’élevage porcin de leur imaginaire, et le seul qui acquiert un consentement à payer plus mais à un niveau bien inférieur au surcoût engendré par ce type d’élevage… »

esquisse 1
Esquisses de la maternité-post-sevrage du projet n°2
esquisse 2
esquisse 3
Esquisses de bâtiment maternité-post-sevrage du projet n°4
esquisse 4

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.

Fermer l'écran superposé de recherche

Rechercher un article