Le stress thermique ne se résume pas à une température élevée

Au-delà d’un THI de 68, le stress thermique démarre pour les vaches laitières. Lucie Dupont a collecté des données météorologiques pour établir une carte régionale qui met en lumière les zones où ce seuil est le plus souvent dépassé. Lucie Dupont a passé à la moulinette les données météorologiques du Finistère, des Côtes d’Armor et du Morbihan sur une période courant d’avril 2017 à septembre 2020. En se basant sur les mesures de température et d’humidité recueillies par 35 stations, la conseillère en élevage pour Innoval a établi une carte régionale qui affiche le THI moyen. Ce THI (Temperature Humidity Index) peut se définir comme un indicateur évaluant le confort des vaches. À partir d’un THI supérieur à 68, l’animal sort de conditions dites thermo-neutres et entre dans une situation de stress thermique. Conséquence : sa production laitière commence à baisser. De 1 à 5 kg de lait en moins Si toute la bande Nord de la Bretagne n’affiche que 5 à 10 jours où 68 de THI est atteint ou dépassé, le Sud de la région – le golfe du Morbihan par exemple – connaît 30 jours par an renvoyant à des conditions de stress thermique. Sans surprise, le mois de juillet montre les plus forts pics de THI. Cependant, des conditions stressantes pour l’animal peuvent arriver « quand les températures moyennes du jour et de la nuit ne sont que de 20 °C. Un THI supérieur à 68 est alors dû à une humidité importante. C’est un facteur qui joue beaucoup, la vache le subit fortement ». Les pics de stress s’étalent en fait de juin à septembre. « L’important, c’est aussi la durée de la période où le THI est fort. Une seule journée n’aura que peu de conséquence. Mais pour un THI élevé pendant 4 ou 5 jours, l’impact est plus important sur la production laitière et sur d’autres paramètres. » Dans une enquête menée auprès d’éleveurs, Lucie Dupont a ainsi relevé les effets sur le comportement individuel de l’animal : augmentation du rythme cardiaque, baisse de l’ingestion, diminution du temps de couchage avec pour conséquence des vaches qui restent plus longtemps debout et des onglons qui s’abîment. 91 % des personnes interrogées estiment avoir observé une diminution de production de 1 à 5 kg de lait / VL / jour quand le THI est élevé. En théorie, une laitière perd entre 0,164 et 0,41 kg de lait par unité de THI. De plus, 57 % des producteurs observent une persistance de la baisse de production : un délai de 3 jours à 3 semaines est nécessaire pour retrouver la production d’origine. Certains élevages sont plus touchés par le stress en partie à cause de la mauvaise ventilation de leur bâtiment, expliqué son implantation moins adaptée (fond de vallée) ou à cause d’un bâtiment trop fermé qui ne permet pas un bon renouvellement de l’air. Une carence a été observée dans la majorité des élevages : le nombre de point d’eau est trop faible alors que « c’est le premier facteur à améliorer en cas de stress ». D’autres conséquences difficilement mesurables sont aussi observées, comme une réussite à l’IA dégradée ou des chaleurs moins bien exprimées. La conception du bâtiment, la présence de haies bocagères, de système de ventilation contribuent aussi diminuer le stress thermique pendant les coups de chaleur. « Attention, la brumisation, mal utilisée, apporte de l’humidité dans l’étable et peut faire exploser le THI qui peut passer de 68 à 78 ! » Au pâturage la nuit Certaines applications sur smartphone sont capables de prédire la valeur du THI des jours à venir. Que faire alors quand on sait que les prochaines journées vont dépasser le seuil de 68 ? « Améliorer la ventilation en retirant une lame de bardage sur deux peut être intéressant, tout comme le fait d’ajouter un bac à eau supplémentaire dans le bâtiment. On peut aussi privilégier le pâturage de nuit, les vaches vont ainsi se reposer et bénéficier de la fraîcheur nocturne. En cas de fortes températures, le béton emmagasine la chaleur et la restitue la nuit ; il n’y a alors pas réellement de répit. » Côté alimentation, Lucie Dupont conseille de privilégier les fourrages de meilleure qualité. « Comme les vaches vont de toute façon moins manger, il faut essayer de limiter la baisse de production. Ajouter du bicarbonate de sodium à la ration est conseillé pour soulager ce passage de chaleur, il tamponne le rumen déséquilibré par les variations de ration. » Aussi, il peut être utile de fractionner la distribution. « Plutôt qu’une grosse distribution par jour, le fait de distribuer tôt le matin et tard le soir permet de conserver l’appétence et la fraîcheur du fourrage ».

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