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Un pacte pour tenter d’apaiser les Bretons

La manifestation à Carhaix précédant l’annonce du Pacte d’avenir envoie un signe fort au gouvernement sur la motivation des Bretons à ne pas se laisser endormir.

Le document de 80 pages, appelé Pacte d’avenir, décrit un plan d’actions économiques et sociales à mettre en place pour tenter de faire face à la crise que traverse la Bretagne. Ce document était remis officiellement mercredi 4 décembre aux membres du Ceser (Conseil économique, social et environnemental régional) et aux différents interlocuteurs ayant participé aux réunions de concertation. Mardi 3 décembre, la veille de sa sortie, des représentants de la Chambre régionale d’agriculture de Bretagne, Coop de France Ouest, FRSEA, Produit en Bretagne, Nutrinoë, UGPVB, Association bretonne des entreprises agroalimentaire (ABEA),… réunis au sein du collectif Agri Agro Bretagne ont présenté leurs 12 propositions concrètes pour une Bretagne agricole et agroalimentaire compétitive.

30 réunions en 15 jours…

« Le pacte d’avenir est un projet du gouvernement. Pas moins de 30 réunions ont eu lieu en région pour l’élaboration du volet agricole et agroalimentaire, avec un programme préorienté. Le tout pour une signature le 13 décembre prochain. Les vrais sujets ne semblent pas avoir été la priorité à l’occasion de ces réunions de travail. Les personnes qui y ont participé le déplorent », s’indigne Thierry Coué, président de la FRSEA et porte-parole du collectif. Hervé Vasseur, président de Nutrinoë enchaîne : « j’ai assisté à une de ces réunions, nos emplois du temps de chefs d’entreprise ne nous permettent pas de nous libérer si facilement. Surtout lorsque les 30 réunions sont condensées sur 15 jours. »

Les propositions d’agri agro bretagne

Volet réglementaire

  1. Simplifier et sécuriser les règles administratives
  2. Harmoniser les règlements nationaux, européens et transfilières
  3. Structurer et valoriser durablement la production

Volet économique

  1. Consolider l’assise financière des projets et des entreprises
  2. Soumettre à étude d’impact économique et sociale les projets de décisions des pouvoirs publics

Volet social

  1. Soutenir l’emploi
  2. Renforcer l’accès à la formation
  3. Favoriser le dialogue et la communication

Mesures en faveur des filières viandes blanches

  1. Mettre fin au dumping social en Europe par la modification de la directive européenne sur les salariés détachés
  2. Réduire le coût du travail, sans remise en cause du SMIC
  3. Filière Volaille Grand Export – Mobiliser des moyens financiers afin de compenser à moyen terme l’avantage monétaire de nos concurrents mondiaux
  4. Filière Volaille Grand Export – Accorder une période d’adaptation de 5 ans aux entreprises

Reporter la signature du pacte

Le collectif a choisi de devancer l’arrivée du Pacte d’avenir de peur que celui-ci ne tienne pas compte des mesures qu’il propose ou seulement d’une partie. « Si nos propositions ne figurent pas dans le Pacte d’avenir, nous demandons à ce que le gouvernement les y introduisent avant le 13 décembre », déclare Marcel Denieul, vice-président de la Chambre régionale d’agriculture. « Si besoin, il faut que le Premier ministre reporte la date de la signature du Pacte », poursuit Thierry Coué.  L’objectif est de maintenir des exploitations agricoles et des entreprises qui sont au centre du développement économique et social breton. Le porte-parole du collectif insiste sur le besoin d’une simplification administrative qui ne veut pas dire laxisme environnemental.

Mouvement d’ampleur

Après la forte mobilisation de Quimper le 2 novembre, le mouvement a encore pris de l’ampleur, samedi dernier à Carhaix. 17 000 personnes se sont déplacées selon la préfecture alors que Thierry Merret et Christian Troadec annoncent plus de 35 000 personnes. Le collectif Vivre, décider et travailler en Bretagne avait donné rendez-vous aux Bonnets Rouges à Kerampuilh, là ou se déroule habituellement le festival des Vieilles Charrues qui aurait pu être rebaptisé pour l’occasion festival des vieux portiques. L’ambiance est bon enfant et les concerts s’enchaînent : Gilles Servat, les Frères Morvan, … Personne n’oublie pour autant pourquoi il est venu et le ton est plus grave lorsque Christian Troadec, prend la parole. « Le pacte d’avenir proposé à la Bretagne n’est qu’un emplâtre sur une jambe de bois. » Et de poursuivre : « j’invite aujourd’hui le président Hollande à venir en Bretagne écouter ce que nous avons à lui dire. Lui qui pour le moment n’a pas dit un mot sur ce qui se passe dans notre région. » Thierry Merret a rappelé : « nous exigeons la suppression de l’Écotaxe sur tout le territoire français. Nous demandons à ce que le collectif soit écouté. Il faut qu’Ayrault nous entende, nous allons lui faire des propositions concrètes qui viennent du terrain. » Nicolas Goualan

L’avis de :

Paul Molac, Député du Morbihan

Dans le Pacte d’avenir un plan agricole et agroalimentaire est prévu avec un objectif de simplification administrative. À mon sens ce qui manque c’est des changements institutionnels. Les règlements qui régissent les Zes et les Zac seront encore décidés à Paris. Pour les Zes, le blocage est au niveau de l’état, la région garde un poids limité. Il faudrait que nous puissions régler la politique de l’eau en Bretagne, car pour être efficace il faut être au plus près. Mais ils n’en ont pas tenu compte.

Thierry Merret, Président de la FDSEA du Finistère

Le gouvernement montre qu’il ne veut pas entendre la voix du peuple. Les participants au rassemblement de Carhaix ont demandé unanimement une relocalisation des décisions pour l’avenir de leur famille et leur région. Le Pacte d’avenir, qu’on nous sert à toutes les sauces, n’est qu’un patchwork de mesures et de fonds déjà existants, bombardé de Paris à coup de simulacres de réunions dites de « concertation » avec les acteurs socio-économiques, dans un temps record insoutenable par les responsables professionnels.

Didier Le Du, Journaliste Paysan Breton

Bizarrement, les Verts, d’habitude si prompts à donner de la voix pour torpiller l’appareil de production agricole breton se sont réduits au silence ces dernières semaines. Ascèse oratoire contrainte par le mouvement qui gronde ou rédemption tardive ? Pas d’interrogation en revanche sur une réalité chiffrée : en 10 ans, la Bretagne a perdu 32 % de sa volaille et 25 % de ses bovins ; la production porcine a reculé de 5 % en 3 ans. « En un an, le Finistère a détruit plus de 8 000 emplois », a pour sa part réagi André Sergent, président de la Chambre d’agriculture, lundi à Quimper. Une génération entière de paysans a perdu la foi dans le métier que l’on croyait inébranlable. De nombreux acteurs économiques le disent sans détour : « Les écolos ont gagné ».

Une entreprise comme Monique Ranou qui transforme l’équivalent de 1,45 million de cochons par an à Saint-Evarzec (29) s’inquiète aujourd’hui pour son approvisionnement futur. «Si nous devons aller chercher nos porcs au centre de l’Europe, nous perdrons en compétitivité », explique Jean-Pierre Ropars, le président du groupe. Un groupe qui, pour être plus près des consommateurs et des concurrents européens, a récemment choisi d’implanter une plateforme d’expédition au Grand-Fougeray (35). Le groupe laitier Sill a réalisé le même choix stratégique de regrouper ses produits au départ de Saint-Malo. Double illustration, s’il en faut, que l’agroalimentaire de Basse-Bretagne n’a pas besoin d’une pénalité supplémentaire comme l’Ecotaxe. Le Finistère et le Centre-Bretagne sont loin. Tellement loin que, mercredi, aucun « Penn bras » n’a voulu « se payer la route » pour dévoiler le Pacte d’avenir pour la Bretagne.


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