C’est avec un sentiment d’amertume que Nicolas et Stéphane Postic, producteurs de céréales dont de l’orge brassicole, mais aussi de sarrasin et de foin, installés sur Elliant (29) expliquent leur situation : sur cette ferme en agriculture biologique de 260 ha, « nous nous sommes engagés sur une MAEC eau en semant davantage d’herbe. Des frais ont donc été engagés ». Les associés mesurent leur eau de forage, dont la teneur « en nitrate est de 21 mg/L, les pesticides sont absents, ce sont des résultats probants ». Mais ces efforts et la souscription à la MAEC ne donneront pas droit aux indemnités prévues, s’élevant ici à 24 000 €. « Sur le territoire du Paec (projet agro-environnemental et climatique) Odet-Ellé-Isole-Laïta (qui s’étend sur le Finistère et le Morbihan), 104 demandes de MAEC ont été faites, ce sont 104 agriculteurs prêts à s’engager. Mais l’enveloppe de l’État ne suffit pas, seules 30 demandes ont été retenues », déplore Sietske Guillemot, élue à la Chambre d’agriculture du Finistère. Au total, 3,3 millions d’euros auraient été nécessaires pour couvrir toutes les demandes, cette zone du 29 et du 56 n’aura droit qu’à 1,2 million.
Pas de vision à long terme
« Certains peuvent se poser la question d’une déconversion, se reporter sur des systèmes moins respectueux. Financièrement, nous passerons le cap, mais cette absence d’aide jouera sur notre trésorerie. À la place de l’herbe, nous aurions pu semer du sarrasin, c’est une double peine, on est en train de mettre une économie par terre », juge Nicolas Postic. L’engouement pour les MAEC, s’explique sans doute par « l’arrêt des aides bio. Il y a eu des reports sur ces MAEC, qui n’ont pas été anticipés par l’État », soulève Jonas Le Gall, agriculteur d’Ergué-Gabéric (29). « On ne voit plus sur le temps long, on remet en cause tous les ans des options qui sont prises, il n’y a plus de visibilité. Pour aider les agriculteurs, les files d’attente vont être de plus en plus longues. Certains vont quitter la file », imagine Jean-Paul Cozien, vice-président de Quimper Bretagne Occidentale. « Nos masses d’eau sont ici de qualité, mais il suffit de peu de choses pour que cette qualité se dérègle ». Pour l’abondement de l’enveloppe MAEC, des réponses seront peut-être apportées ce vendredi ou dans les jours à venir, avec la tenue du Craec, commission régionale agro-environnementale et climatique.
Fanch Paranthoën
Purifier l’eau avec peu d’argent public
La bonne qualité de l’eau « est offerte par les paysans. On la purifie, à la base, avec beaucoup moins d’argent public. Les versements de MAEC sont priorisés vers des territoires dont l’eau est de moins bonne qualité », fait observer Nicolas Postic. Il ajoute que « les dynamiques sont cassées, c’est un mauvais message. Ces aides ne sont pas un bénéfice net, une bonne partie sert à l’investissement ».