- Illustration Agronomie : « Je suis responsable de l’état de mon sol »

Agronomie : « Je suis responsable de l’état de mon sol »

Pour Frédéric Thomas, la fertilité du sol se travaille en le nourrissant. Il estime à quinze ans la durée pour modifier un sol « dans le bon sens. »

La région Bretagne a perdu 1 point de matière organique depuis 20 ans. C’est énorme, sachant que les élevages sont un précieux minerai de production d’engrais de ferme. « Ce résultat est lié à une intensification du travail du sol. La matière organique (MO) a besoin d‘oxygène pour se dégrader, et il y a un fort lien entre cette matière organique et d’azote : ce point de MO perdu équivaut entre 2 000 et 2 500 kg d’azote perdu par hectare », explique Frédéric Thomas, agriculteur passionné sur les thèmes d’agronomie et des cultures sans labour, lors de l’assemblée générale Céréales de Triskalia. Ces résultats en baisse ne sont pas une fatalité : chacun peut à moyen terme retrouver un sol vivant.

Hétérogénéité intra-parcellaire

Des écarts sont bien souvent constatés entre les parcelles. « Sur la dernière collecte de céréales, la moyenne des taux de protéines s’est établie à 10,4 %, avec des écarts mesurés de 1,5 point entre les plus hauts et les plus bas échantillons aux normes (Poids spécifique et humidité) », souligne Matthieu Cadart, animateur du réseau commercial des céréales chez Caliance. Cette disparité se remarque entre les parcelles, mais aussi au sein même de la parcelle. « Les hétérogénéités intra-parcellaires sont fréquentes, avec pour conséquence perverse l’utilisation des outils issus de l’agriculture de précision : on a tendance à sous fertiliser les zones à faible potentiel, accentuant alors cette disparité dans le champ. Mieux vaut nourrir continuellement son sol », rappelle Frédéric Thomas.

Fertiliser les couverts

Interdit par la législation, la fertilisation des couverts serait une bonne solution pour valoriser les effluents d’élevage, selon l’expert en agriculture de conservation. « L’effluent d’élevage est peu prévisible : il relargue des matières fertilisantes, mais peut aussi en reprendre, sauf dans le cas d’un couvert. En Belgique, avec les APL (Azote potentiellement lessivable), les reliquats d’azote mesurés sont comparés avec les résultats des parcelles environnantes. Si le résultat est inférieur à la moyenne, on explore alors les moyens mis en œuvre pour arriver à de tels résultats ».

Les couverts, même permanents, sont une solution incontournable pour maintenir cette fertilité. Outre les capacités à limiter l’érosion ou évitant le salissement par une couverture de l’espace disponible, ils nourrissent petit à petit le sol. « La réduction de la fertilisation n’a pas l’effet escompté sur la réduction de la fuite des nitrates, car le sol continue à fournir de l’azote. 3 % de matière organique représentent 7 tonnes d’azote. Il convient, plutôt que de quantité, de parler de flux. Un maïs a besoin par exemple de 3 unités d’azote par jour, pas de 150. Les techniques culturales simplifiées sont, en revanche, plus lentes à répondre qu’un labour, qui minéralise rapidement l’azote. Les céréales sont en déficit d’azote en avril, si le sol n’est pas travaillé. Mieux vaut donc anticiper la fertilisation pour répondre aux besoins de la culture. Toutefois, la minéralisation plus tardive pendant le mois de juin coïncide avec un stade physiologique où la plante a de forts besoins en cet élément », rappelle Frédéric Thomas.

[caption id=”attachment_2077″ align=”aligncenter” width=”300″]Frédéric Thomas est un fervent défenseur des couverts végétaux qui remplacent l’acier des outils par leurs racines. Frédéric Thomas est un fervent défenseur des couverts végétaux qui remplacent l’acier des outils par leurs racines.[/caption]

Limiter la levée des adventices

La mise en place de couverts végétaux va souvent de pair avec une limitation du travail du sol. Concernant la réserve de graines de mauvaises herbes du sol, le labour enfouit le stock de surface. « La faculté germinative des graines est favorisée dans les 5 premiers centimètres de sol, qui représentent 74 % du stock en semis direct. Cependant, elles disparaissent beaucoup plus vite. Concernant les sétaires, 11 % seulement résistent en surface, 28 % à 5 cm et 55 % à 10 cm. La charrue augmente la durée de vie de ces graines, alors qu’elles sont éradiquées à 90 % en 2 ans en non labour ». Fanch Paranthoën


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