Dossier technique

Roller veut glisser vers le ring du Space

Gaec Le Louargant, à Plouguernével (22) - Mordus de cheval, François et Guillaume Le Louargant travaillent d’arrache pied à améliorer les performances du troupeau laitier familial et désormais à participer aux concours Holstein.  

Deux hommes et une femme avec une vache de race Holstein - Illustration Roller veut glisser vers le ring du Space
Maxence Le Scraigne (apprenti), Léonie Lemarchand et François le Louargant avec Roller. | © Paysan Breton - T. Dagorn

Les cousins François et Guillaume Le Louargant, 28 ans, ont repris en 2021 la ferme de leurs pères associés. Sur 235 ha de SAU, l’exploitation compte 65 vaches laitières (pour 650 000 L de lait livrés) et la suite, 80 mères Limousines en système naisseur – engraisseur et 15 Traits bretons. En cheval justement, l’élevage est bien connu et reconnu dans le monde de la sélection. « Cette passion familiale remonte à nos grands-parents. Depuis les années 70, nous participons aux concours en catégories modèle et allure et nous commercialisons des étalons en France et à l’étranger. En 2022, une de nos pouliches a gagné au Salon de Paris », raconte François. Mais, depuis quelques années, les Costarmoricains frappent à la porte des rings en bovins. « J’ai attrapé le virus au contact des copains de BTS au Gros Chêne à Pontivy. À partir de 2016, je me suis formé à la préparation des animaux et j’ai commencé à sortir des vaches. » Le jeune homme et son père avaient d’abord amené des Pie Rouge à Pontivy (56). « Mais à l’époque, en Holstein, nous n’avions pas le niveau. »

Avec Roller, de préparateur à présentateur ?

Cependant l’achat à l’extérieur a permis de rentrer des profils d’animaux à la fois laitiers au quotidien et mieux adaptés aux rings. Trois vaches ont été achetées chez Gilles et Patricia Ollivier, éleveurs à Canihuel (22) qui vendaient leur ferme après des années de sélection soignée sur leur troupeau. « Ils avaient envie de mettre leurs animaux dans les mains de jeunes motivés à les présenter. » Un trio a ainsi pris la direction du Gaec Le Louargant. Débarquée en 2e veau, Pay Cash (Fitz x Delta Hovd) a pris part depuis à trois Départementaux à Saint-Brieuc puis Loudéac. Elle est pointée 88 points en Note globale et 90 en Mamelle et Capacité laitière. Elle a deux filles, par Mooi et Chief Stan, et vient de donner cinq embryons lors d’une collecte.

Un temps de pâturage plus concentré

Arrivée dans le même wagon, Roller (Applicable x Jenix) – 86 en Note globale et 88 en Capacité laitière – a su « surprendre » ses nouveaux propriétaires en terminant seconde de section chez les deuxième veau au Régional de Pontivy en 2024, juste derrière la future championne de la catégorie jeune. Elle vient de vêler pour la 3e fois début juillet.

Présélectionnée pour le Space, Roller plaît beaucoup à François Le Louargant et sa compagne Léonie Lemarchand, tout aussi passionnée et coprésidente d’Armor Vaches, l’association costarmoricaine des jeunes. Ils dépeignent ensemble l’animal : « C’est une vache bien développée dans son corps, ouverte dans la côte, très fonctionnelle. Elle présente beaucoup de capacité laitière et se déplace sur de bons membres. Elle possède également un très bon pis avec beaucoup de largeur dans l’attache arrière. » François Le Louargant, qui prépare des vaches au Space depuis des années, mesure l’importance de cette présélection et espère cette fois passer de l’autre côté de la barrière. « Le Space rassemble le gratin de la Holstein. Fouler la sciure avec un animal serait un honneur. »

Semence sexée et collectes pour progresser

À plus long terme, les associés espèrent sortir davantage d’animaux issus de souches du troupeau historique. « Ce serait valorisant. » Comme Sardaigne (1st Grade x Kingston) qui a participé à deux concours des Côtes d’Armor. Depuis la reprise de l’exploitation, tous deux mènent un gros travail pour faire évoluer la sélection et plus globalement toute la conduite de l’élevage. Le troupeau est actuellement pointé à 82,7 points en Note globale et fait partie du Top 10 % des élevages du département sur l’index TP. Les meilleures génisses (un tiers environ) et vaches sont inséminées en semence sexée. Les autres animaux sont croisés : en Bleu sur les vaches ou en Limousin (taureau) pour les génisses. « Pour les accouplements, nous ne choisissons pas de taureaux trop extrêmes en morphologie. Nous cherchons des profils plutôt complets offrant un bon compromis entre production, morphologie et caractères fonctionnels. » Le transfert embryonnaire est une voie qui devrait être suivie pour démultiplier les meilleurs individus.

+ 4 000 kg de lait par vache en quatre ans

Pour le reste, les jeunes associés ont mené une petite révolution. À l’époque de leurs pères, le niveau d’étable se situait à 7 500 kg de lait / VL / an. En quatre ans, il a bondi à 11 800 kg. « Nous avons moins de surface en herbe pour les laitières. Mais surtout, nous avons intensifié le pâturage. Des prairies ont été refaites pour gagner en productivité et en qualité. Surtout, le temps passé dehors a été réduit. » Dans ce système à 20 ares par tête, le troupeau sort désormais sur des paddocks redimensionnés pendant 4 à 6 heures par jour, pas plus. « Ainsi, les vaches n’ont plus besoin de faire des ventrées à l’auge. Elles ont plus de temps d’ingérer. Cette nouvelle approche a porté ses fruits avec 5 kg de lait par vache en plus au printemps. » En collaboration avec Nicolas Jégo, de Coréal, pour gagner en productivité laitière, « un travail efficace sur la qualité des fourrages » est mené. « Nous avons abandonné le RGI en une seule coupe pour des prairies de RGA – trèfles fauchées 7 ou 8 fois par an. »

Concentrés sur la santé mammaire

L’instauration d’une préparation au vêlage en deux phases a aussi permis des progrès. Le premier mois, les taries sont en prairie avec apport de maïs ensilage, de correcteur et de foin à volonté. Puis, le mois précédant le vêlage, elles sont rentrées. Elles reçoivent alors du maïs ensilage, de l’aliment et de la paille aujourd’hui broyée qui a permis « un vrai plus » en matière d’ingestion. « Les résultats sont nets. Les rétentions placentaires sont rares. Les démarrages en lactation sont bien meilleurs et nous avons gagné 10 kg de lait sur l’expression des pics et de la persistance laitière… Mesurable en termes de santé et de vitalité, les veaux se portent mieux également. » L’élevage des jeunes est soigné également permettant de « grosses croissances ». Les petites femelles sont gardées trois semaines en niche individuelle. « En hiver, elles profitent d’un manteau au démarrage. Elles sont tondues et mesurées au ruban au moment du sevrage. » Elles atteignent aujourd’hui 240-250 kg à six mois pour un premier vêlage à 24 mois en moyenne.

Sans mammite, le boulot est plus agréable

Enfin, les efforts dans l’approche sanitaire participent aussi à l’amélioration des performances. « En arrivant, nous avons effectué un gros tri concernant la santé mammaire. Quand il n’y a pas de mammite, le boulot d’éleveur est quand même plus agréable. » Le niveau cellulaire du troupeau se situe aujourd’hui à 70 000 cellules en moyenne. « Dès qu’une vache déclare une mammite ou présente une montée de cellules, une analyse des laits de chaque quartier est réalisée afin de mettre en place le meilleur protocole avec le vétérinaire. » Au Gaec, un suivi reproduction a également été mis en place avec le praticien. « Les vaches sont vues plus tôt – écographie dès 20 jours après vêlage pour contrôler l’involution utérine – et plus souvent. »

Toma Dagorn

Amener l’animal au top devant le juge

« J’adore préparer les animaux pour les concours », sourit François Le Louargant qui tond et clippe. Il apporte une attention particulière à l’approche avant concours. « Les vaches sont logées en box sur paille pour éviter une glissade, un mauvais coup et préserver les articulations. » Elles sont alimentées avec du foin de séchage et trois repas d’aliment par jour. « Je prends beaucoup de plaisir à mettre les animaux dans les meilleures conditions possible, à les amener au top avant de les confier entre les mains du juge. » Une passion qu’il cherche toujours à partager avec les stagiaires et les apprentis de passage – « cela crée parfois des vocations » – après avoir en son temps été embarqué par les copains dans cet univers. Aujourd’hui, il suit également les plus grands concours internationaux en ligne. « Par rapport aux concours équins, j’aime le professionnalisme en bovins où tout est bien encadré, bien codifié et où le juge explique ses décisions à l’assemblée », termine le Costarmoricain qui a le rêve de participer un jour au Salon de Paris avec à la fois une vache et une pouliche.


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