Quel horizon pour les phytosanitaires ?

L’objectif à long terme du gouvernement, « l’élimination progressive des pesticides », fait débat ; elle divise les partisans du « zéro phyto », et les sceptiques qui visent plutôt  l’absence d’impact ou de risque, voire simplement la « transparence totale » sur les pratiques.

Sur la question des produits phytosanitaires, les échanges sont nombreux. Un consensus semble se former autour d’une nécessaire mais progressive réduction des pesticides, de synthèse ou naturels.

Un « zéro phyto de synthèse » visé

« Nous défendons un projet de sortie complète des pesticides de synthèse, mais sans fixer de délai précis », explique Emmanuel Aze, chargé du dossier pesticides à la Confédération paysanne. Pourquoi une position aussi définitive ? « D’abord parce que l’on découvre petit à petit qu’une fraction des pesticides ont un effet de perturbateur endocrinien à des doses bien inférieures aux limites maximales de résidus (LMR) ». Ensuite, « combien de pesticides autorisés aujourd’hui l’étaient il y a 30 ans ? Presque aucun. On découvre avec le temps un effet délétère à toutes les molécules ». Enfin, « parce qu’il est impossible mathématiquement de calculer les effets cocktails ».

En désaccord, le président de la commission environnement de la FNSEA, Éric Thirouin insiste : « Nous avons bien compris l’attente de la société et nous nous mobiliserons à 100 % pour trouver des solutions de remplacement aux produits phytosanitaires chimiques de synthèse, explique-t-il ; plus nous en trouverons, mieux ce sera, et nous ne nous fixons pas de limite. Mais nous ne sommes pas à l’abri d’une maladie particulière qui nous obligera à recourir à un produit. Je ne crois pas qu’il sera possible de maîtriser la totalité des maladies sans phytosanitaire, et ce serait une erreur que d’y croire ».

Une annonce « zéro résidu » risquée

S’il reste dubitatif sur le « zéro phyto », Éric Thirouin est moins catégorique sur le zéro résidu : « Je suis dans l’expectative sur ce sujet ». Mais il craint que l’objectif soit difficilement atteignable et risqué en termes de communication : « Quand on emploie le terme zéro résidu, le public l’interprète par zéro trace, c’est risqué ». Or, « il y a toujours des traces ». Sur le fond, il se veut « prudent », car « les LMR sont déjà aujourd’hui bien en deçà du risque sanitaire. La LMR veut déjà dire zéro risque ».

« Zéro impact » ou zéro molécule ?

De son côté, la Coordination rurale (CR) ne veut pas non plus du zéro phyto, mais ne croit pas pour autant au zéro impact : « Vous pensez que l’on ne trouvera jamais aucun impact sur la santé des produits que nous utilisons ? », questionne son président Bernard Lannes. « C’est ce que l’on croyait, en d’autres temps, des produits que l’on utilisait, et qui ont été interdits depuis. En fait, le zéro impact, cela veut dire zéro molécule ». Ce que propose plutôt la CR, c’est « la transparence totale ». Pour Bernard Lannes, on doit pouvoir se mettre d’accord sur des pratiques, dans le contexte d’une « alimentation reterritorialisée » à condition d’une « transparence complète » vis-à-vis des consommateurs. Car aujourd’hui « l’alimentation est mondialisée et personne ne sait plus qui fait quoi ».

Une feuille de route bientôt en consultation

Les discussions seront assurément animées autour de la feuille de route pour « limiter la dépendance de l’agriculture aux pesticides », qui sera prochainement mise en consultation par le gouvernement. Elles porteront plutôt sur le rythme imposé des suppressions ou limitations imposées produit par produit – d’abord les plus dangereux, annonce-t-on – et sur les moyens alloués à la nécessaire phase de transition pour les agriculteurs.


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