Dossier technique

La féverole extrudée remplace le tourteau de soja

SCEA Josse Pascal, Augan (56) - À la SCEA Josse Pascal, l’incorporation de féverole extrudée dans tous les aliments a permis une économie de 54 % de soja. Les performances de croissance sont les mêmes ; les truies consomment jusqu’à un kilo de plus en maternité.

3 personnes devant une cellule de stocakge de blé - Illustration La féverole extrudée remplace le tourteau de soja
Pascal Josse, à droite, avec Gérard Grall et Didier Bazin (Tromelin Nutrition).

Christine et Pascal Josse travaillent 130 hectares, avec une rotation des cultures bien calée. Aux 25 hectares de féverole et aux 20 ha de colza succèdent une quarantaine d’hectares de blé puis d’orge. Tous les six ans, la féverole revient dans les mêmes parcelles. Le maïs est exclu en raison du faible potentiel des terres. Tous les aliments sont fabriqués sur place, à l’exception du 1er âge. Ils sont distribués à sec, dans les nourrisseurs des salles de PS et d’engraissement et dans les doseurs en maternité. Depuis quelques années, l’aliment charcutier contenait 15 % de féverole crue. Depuis la récolte de 2023, cette féverole est extrudée et intégrée dans tous les aliments fabriqués sur place.

Thermiquement traitée en usine

« J’achetais l’aliment porcelets chez Tromelin Nutrition. Leur service recherche et développement m’a parlé des avantages du traitement thermique de la féverole et des résultats de leurs essais en élevage », indique l’éleveur, sélectionneur de porcs Piétrain. « Nous en produisons depuis une dizaine d’années. Techniquement, nous savons faire (40 q/ha en moyenne). L’objectif était de la mieux la valoriser ». La totalité de la récolte de 2023 a pris le chemin de Plounéventer (29) où elle a été stockée et traitée en fonction des besoins de l’élevage. « Au total, on m’a livré, en retour, 120 tonnes, à raison d’une livraison tous les deux mois ». Le produit livré, qui contient 80 % de féverole extrudée et 20 % de graines de soja également extrudées (d’origine française), se présente sous forme de croquettes (facilité de descente du silo). Il est broyé à la ferme et mélangé aux autres ingrédients des différentes formules.

Aliment des porcs
La féverole est extrudée en usine et ramenée à la SCEA Josse, puis incorporée dans plusieurs aliments.

Les truies consomment plus en maternité

Les aliments 2e âge, nourrain, charcutier et allaitante contiennent respectivement 10 %, 12 %, 15 % et 10 % d’Evopro (nom commercial). « Je n’en intègre pas dans l’aliment des gestantes car les besoins en protéines sont plus bas ». Au total, le volume de soja acheté est passé de 148 tonnes par an à 67 tonnes sur la dernière année, soit une économie de 54 %. « Les performances de croissance n’ont pas évolué (GMQ et qualité de carcasse) mais nous avons noté une consommation des truies en maternité supérieure en dernière semaine de 1 à 1,5 kg par jour, grâce à la bonne appétence de la féverole ». Les résultats de reproduction sont en amélioration sur les 6 premiers mois de 2024 par rapport à la même période de 2023 : 98,1 % de taux de fertilité vs 93,5 %. « C’est peut-être un effet de l’augmentation de l’ingéré ». Le traitement de la féverole induit un surcoût de 3 à 4 euros par tonne d’aliment fabriqué, par rapport à un tourteau de soja à 480 €.

Bernard Laurent

Des essais concluants en élevages

Gérard Grall, responsable marché porc Tromelin Nutrition

Nous avons démontré, dans nos essais en ferme expérimentale et chez un groupe d’éleveurs pilotes (55 000 porcs), qu’il est possible de maintenir les performances zootechniques en abaissant le taux de soja incorporé dans l’aliment croissance et en le remplaçant par de l’Evopro. La consommation de tourteau de soja a baissé de 50 %, et l’empreinte carbone de 20 à 25 %. Le traitement thermique permet un gain de valorisation de 18 % (par rapport à de la féverole crue). Les facteurs antinutritionnels qui limitent l’activité des enzymes sont détruits par la chaleur. Au niveau de la filière, les intérêts sont nombreux : réduction de la dépendance protéique des élevages (50 % des protéines sont importées) ; réduction de l’impact environnemental (déforestation de forêts primaires au Brésil ; faible niveau d’intrants des protéagineux…) ; réponse aux attentes des consommateurs ; amélioration de l’image des agriculteurs…

Sélectionneur piétrain depuis plus de vingt ans

L’élevage est sous air filtré depuis 1999. L’ensemble est clôturé. Le statut sanitaire, de haut niveau, s’est maintenu depuis l’origine. Les règles de biosécurité sont drastiques (douches à l’entrée, décontamination des objets entrants…). Aucun véhicule n’entre dans l’enceinte de l’élevage. Les flux d’animaux (reproducteurs, abattoir) et de lisier sont strictement définis. Les 180 truies Piétrain (troupeau jeune en raison de la pression de sélection) sèvrent 9,3 porcelets en moyenne (11 nés totaux par portée). La conduite est en 7 bandes, sevrage à 28 jours.

Une culture économe

La féverole contient 25 % de protéines. Elle laisse un reliquat azoté, elle structure le sol grâce à son système racinaire et permet un travail simplifié avant le semis du blé (passage d’un outil à dents par l’éleveur puis semis au combiné par ETA). Il n’y a pas de fertilisation ; un désherbage est réalisé en prélevée et un ou deux fongicides selon les conditions météorologiques de l’année.


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