Retrouver la consommation : L’artichaut, un dur au cœur tendre

Légume emblématique de Bretagne, l’artichaut cherche à raviver ses couleurs. Consommé principalement par les classes d’âge les plus avancées, il pourrait trouver de nouveaux adeptes avec des modes de cuisson différents.

Champ d'artichaut devant la mer - Illustration Retrouver la consommation : L’artichaut, un dur au cœur tendre
La Bretagne cultive environ 2 200 ha. | © Paysan Breton – F. Paranthoën

À la manière d’une marguerite, on effeuille l’artichaut. On l’aime un peu, beaucoup, à la folie… Pas du tout ? Non ! Selon une étude* menée par Catherine Baros, responsable consommation et restauration hors domicile au CTIFL, « les non-consommateurs n’ont pas d’opinion » sur ce légume quand on leur pose des questions sur la saison de consommation ou sur son origine de production. « Les consommateurs sont beaucoup plus positifs ». Lors de la journée nationale artichaut organisée par le CTIFL à Saint-Pol-de-Léon (29), ce légume emblématique a fait l’objet de toutes les discussions, que ce soit d’un point de vue consommation ou production.

La jeune génération est plus ouverte à des modes de cuisson différents

En préambule, Xavier Vernin (CTIFL) donne les bases du marché européen. « Moins d’1 ha sur 10 d’artichaut est produit en France ». L’Europe à 27 a une sole totale de 58 000 ha ; l’Italie reste le leader, avec 38 000 ha (380 000 t) ; l’Espagne en cultive un peu plus de 15 000 ha. Dans l’Hexagone, la production s’établit à « 25 000 t produites sur moins de 5 000 ha. En 10 ans, 3 000 ha ont été perdus ». Si 74 % de la production française est bretonne, la seconde origine est occitane. « Mais les calendriers de production sont complémentaires ». Côté consommation et après une certaine stabilité entre 2020 et 2022, « la clientèle s’est érodée, les fréquences d’achat ont baissé. 60 % des consommateurs ont 60 ans et plus, seulement 7 % des volumes sont consommés par les moins de 40 ans ». Aussi, seul un quart des ménages français ont acheté une fois de l’artichaut sur une année.

Un gros travail d’apprentissage

Ce « légume du pauvre », qui selon un humoriste en salopette en laisse plus dans son assiette à la fin du repas qu’au début, évoque les souvenirs d’enfance. « Il est mystérieux et se mérite. La consommation de l’artichaut est ludique pour certains, compliquée pour d’autres », résume Catherine Baros. Et cette fleur comestible donne tout son sens au mot commensalité. « Il permet de prendre le temps de manger, ensemble ». Les gros artichauts, verts ou violets, sont les plus plébiscités ; ils sont principalement consommés cuits (à l’eau ou à l’autocuiseur). Mais « la jeune génération est plus ouverte à des modes de cuisson différents, en plancha ou au wok ». Les 25-35 ans, encore sous-acheteurs, « ont des raisons de sous-achat (ne pas l’aimer, ne pas y penser, pas d’envie) en régression. Aussi, depuis le Covid, on évite de jeter et de gaspiller. Or, le fait de garder son artichaut quelques jours avant de le consommer est positif ». En effet, le légume est encore plus savoureux une semaine après sa récolte. Sur les étals de magasin, « le consommateur pense que s’il ne reste que 2 ou 3 têtes, c’est qu’il n’est plus frais, ce sont ceux qui ont été laissés. Il y a rarement un chef de rayon présent pour conseiller dans le choix ». Enfin, sur le prix d’achat, « il y a des marges de manœuvre : le prix psychologique, qui détermine le prix que le plus grand nombre de clients potentiels trouve acceptable pour un produit donné est de 2 € par pièce pour un gros artichaut. Or le prix moyen de 2024 a été de 1,52 € ».

Plus qu’une culture

L’artichaut, « c’est plus qu’une culture, c’est un patrimoine vivant », lance Marc Kerangueven, président du Cerafel. Il fait allusion aux 210 exploitations agricoles et aux 2 200 ha en culture sur la zone géographique du Cerafel, aux 17 millions d’euros générés par les producteurs bretons. Face à l’érosion des surfaces cultivées, le responsable en appelle à « la mobilisation collective. Notre capacité d’innovation est une ressource », évoque-t-il au sujet des récents travaux lancés par le Caté sur des artichauts issus de vitro-plants.

Fanch Paranthoën

* Étude demandée par le Cerafel, Teraneo et Felcoop, dans le cadre de la commission économie d’Interfel, avec un cofinancement de FranceAgrimer.

Nous allons continuer, on en a besoin

Opinion – Christian Bernard – Producteur d’artichauts à Taulé (29)

On est resté sur un travail ancestral pour la culture d’artichaut, qui se fait manuellement même si on arrive un peu à la mécaniser. Il faut 300 heures de travail à l’hectare, le mildiou peut se développer, il n’existe que 2 molécules autorisées pour désherber. Quand on réunit tout cela, des producteurs préfèrent faire autre chose. Sur mon exploitation, nous avons fait le choix de nous diversifier vers plus de petit violet qui demande moins de dédrageonnage, avec une récolte un peu plus facile. Nous allons continuer les artichauts, on en a besoin pour sa saveur, ses aspects bénéfiques sur la santé. Avec des demandes de substitution de la viande par des produits végétaux, j’attends avec impatience le fast-food qui remplacera le steak par un fond d’artichaut !


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