Une rencontre à l’heure des changements de vie

Estelle Duperron, comptable, et Halbe Rosema, pédicure pour bovins, se sont rencontrés par hasard sur une ferme. Un an plus tard, la première reprenait l’affaire du second.

Une jeune femme et un homme devant une cage de parage à côté de vaches de race Holstein au cornadis - Illustration Une rencontre à l’heure des changements de vie
Estelle Duperron et Halbe Rosema sur l'élevage où ils se sont rencontrés. | © Paysan Breton - T. Dagorn

Estelle Duperron a terminé sa formation de pédicure pour bovins au Rheu (35) au printemps 2025 et a aussitôt plongé dans le grand bain. Elle a acheté un fourgon et repris la cage et la clientèle d’Halbe Rosema qui prenait sa retraite dans le Trégor. Après un début de carrière comme comptable – conseil, la jeune femme avait envie d’un projet à elle. « Au départ, j’appréhendais de passer d’un travail en équipe comportant de l’encadrement à une activité seule avec ma cage. Les premières semaines, quand on passe de passagère en stage avec un pareur à chef de chantier, il y a parfois des hésitations… Mais on gagne peu à peu en confiance. Et aujourd’hui, je connais par cœur mon installation. »

Formée et motivée

Basée au Merzer, l’activité de la pédicure est encore modérée. Après avoir envoyé un courrier pour annoncer la transmission, elle estime qu’elle a récupéré un quart de la clientèle de son cédant. « Aujourd’hui, mon volume de travail permet de couvrir les charges et de me sortir un salaire de base. Mais mon planning n’est pas plein. Cela a au moins l’avantage de pouvoir répondre très facilement aux urgences. »

Halbe Rosema intervenait chez 200 clients réguliers, à l’ouest des Côtes-d’Armor jusqu’à Carnoët ou Poullaouen (29). « Quand je me suis lancé comme pédicure en 2009, il y avait beaucoup plus de fermes sur le secteur. Nombre de troupeaux n’avaient d’ailleurs jamais vu un pareur », sourit le jeune retraité d’origine hollandaise. Il ne s’étonne pas que certains se méfient. « Il n’y a pourtant aucune raison de ne pas faire confiance à une femme débutante car Estelle s’est formée et est très motivée. Les choses vont se faire grâce au bouche-à-oreille », assure-t-il. Quand elle arrive sur une ferme, Estelle Duperron prévient toujours qu’elle n’a pas le rythme de son cédant. Ce dernier la défend : « Au départ, je n’avais pas la même cadence non plus. Et surtout, en parage, ce n’est pas le nombre de vaches à l’heure mais la qualité du travail qui compte. »

La FCO a abîmé les pieds des bovins

Pour démarrer, la pédicure a suivi les recommandations en ne programmant qu’un élevage par jour le temps de prendre ses repères. « Les clients me rappellent. C’est une grande satisfaction. » Après quelques mois de pratique, elle prend plus souvent une ferme par demi-journée. Il y a à faire. « Encore aujourd’hui, beaucoup ne voient pas leurs vaches boiter. On nous appelle pour cinq bovins et une dizaine sont pris en charge finalement. » Cette année, la FCO a abîmé les pieds, en laitier et même en allaitant, provoquant « des gonflements, des boiteries sévères, une recrudescence de cas de dermatite ou de panaris et des guérisons ralenties ».

Aboutissement personnel

Sur le terrain, Estelle Duperron se sent épanouie. « Je me lève pour travailler pour moi. Je prends plaisir à remettre les animaux sur pied. J’aime la mentalité et la simplicité des gens dans le milieu agricole. » Halbe Rosema, lui, est très content d’avoir transmis l’entreprise qu’il avait montée seul en partant de zéro. « Pour mes clients, la continuité de service est assurée. Pour moi, avoir passé le relais est un aboutissement personnel. »

Toma Dagorn

La Bretagne, son dynamisme laitier et ses habitants

Halbe et Antoinette Rosema se sont installés dans le Trégor en 1993. « Aux Pays-Bas, le développement de notre petite ferme était impossible. La solution pour rester agriculteur était de regarder ailleurs… » Malgré une première visite en Bretagne « sous une pluie atroce », ils ont trouvé par hasard la ferme « idéale » à Prat. « Nous voulions produire du lait là où les Français voulaient le faire aussi. Avec du recul, c’était la bonne idée vu le dynamisme agricole local et le climat breton favorable. » Leur ferme a été vendue en 2023. « Nous sommes repartis aux Pays-Bas pour se rapprocher de nos enfants qui ont construit leur vie là-bas. » Le couple vit désormais dans une ville de 50 000 habitants où tout est à 10 minutes en vélo. « Aux Pays-Bas, les gens sont ponctuels et très organisés. Les salaires sont plus élevés mais tout est cher dans cette économie qui tourne sept jours sur sept… Dans le Trégor, les gens sont moins stressés et savent prendre le temps. C’est cette façon de vivre qui me manque le plus. »


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