Depuis l’apparition des semences sexées en races laitières pures, le croisement viande s’inscrit pleinement dans la stratégie génétique des éleveurs. Il offre une plus-value économique par l’optimisation du renouvellement et la valorisation de la viande. Aujourd’hui, 25 % des inséminations sur les femelles laitières sont en croisement viande, avec des pratiques différentes selon les régions. « Alors qu’en Auvergne Rhône-Alpes, beaucoup de croisements se font en Charolais, dans le Grand Ouest, le Blanc Bleu est davantage utilisé (55 % des IA premières en croisement terminal), suivi de l’Inra 95 (20 %), du Limousin (15 %) et du Charolais (10 %) », a chiffré Sandra Dominique de l’Idele lors d’un des ateliers organisés à l’occasion de la porte ouverte du Cirbeef (Centre d’innovation et de recherche sur la production de viande rouge issue du troupeau laitier) à Mauron (56), le 19 juin.
Aller vers davantage de croissance
Sur 10 ans en France, les IA avec un taureau de race à viande sur femelles laitières ont presque doublé. Race spécialisée dans le croisement terminal, le Blanc Bleu marque le pas, alors que l’emploi de doses d’Inra 95 ou de Limousin a tendance à augmenter. Aujourd’hui, les entreprises de sélection s’intéressent davantage au marché du croisement viande, souhaitant répondre aux attentes des éleveurs laitiers. « Ces derniers recherchent de la facilité de naissance, de la fertilité de semence et une bonne valorisation du veau à 3 semaines », synthétise Sébastien Clairand de Synetics.
Des choix génétiques plus fins demain
Des index officiels existent sur la ‘facilité de naissance en croisement’, sur le poids de carcasse, la conformation, la couleur de la viande. Euroval propose par ailleurs des index ‘privés’ notamment sur la fertilité de la semence, la durée de gestation et la viabilité des veaux à 21 j. « Notre travail sur les taureaux de croisement consiste à améliorer aussi la croissance pour l’engraissement ensuite. » Le marché évolue « face à une diminution de la production de veaux de boucherie et l’augmentation des volumes de jeunes bovins mâles et femelles. Nous allons vers des profils de taureaux de croisement moins précoces, avec du GMQ, de la capacité d’ingestion, du format. Les taureaux sans cornes sont également davantage utilisés aujourd’hui ainsi que la semence sexée mâle. »
Dans le cadre des essais sur les aptitudes à l’engraissement d’animaux croisés lait-viande menés à la station Cirbeef, avec un objectif de poids de carcasse à 300 kg, les différents types génétiques (Blanc Bleu, Charolais, Inra 95, Limousin, Angus croisés avec du Holstein, Limousin croisé Normand ou Normand pur) ont présenté des écarts cohérents avec les spécificités raciales, par exemple un peu plus de poids de carcasse en Blanc Bleu ou Charolais, davantage de persillé en Angus…
Sélection ‘intra race’ possible
Une analyse sur des performances par ‘profils de pères’ montre des différences au sein d’une même race. « Les veaux croisés issus de taureaux limousins apporteurs en facilité de naissance mais moins en croissance et conformation, présentent moins de développement et semblent consommer davantage d’aliment pour produire 1 kg de carcasse », souligne Sandra Dominique.
De premières observations ont également été réalisées par rapport au statut culard du père. Des taureaux Inra 95 homozygotes (doublement porteurs du gène) et hétérozygotes utilisés en croisement holstein ont été évalués. « Les premiers semblent présenter une croissance supérieure aux hétérozygotes, mais avec un indice de consommation plus important en moyenne. Toutefois la variabilité est très importante. » Les études vont être poursuivies. Par ailleurs, « nous manquons d’informations sur le persillé. Les abattoirs devraient nous faire davantage de retours sur ce critère dont l’héritabilité est élevée », ajoute Sébastien Clairand.
Agnès Cussonneau
Couleur et goût correspondent au marché
Opinion – Mathilde Vaillant – Idele, service qualité des carcasses et des viandes
Les viandes produites sur la station Cirbeef (Valoveau) ont été passées au crible. Leur couleur est intermédiaire entre celle des JB (jeunes bovins) et des vaches à viande. Le niveau de gras intramusculaire est globalement au même niveau que celui des vaches à viande, dépassant celui des JB, des génisses à viande ou des bœufs. Mais ce gras est plus important chez les croisés Angus x Holstein et les Normands purs. Par ailleurs, les échantillons issus des finitions à l’auge présentent une viande moins rouge et plus persillée qu’en finition au pâturage. Le jury d’experts a par ailleurs jugé la tendreté satisfaisante quels que soient les types génétiques.