Bigard vise le grand export

Malgré leurs contraintes et difficultés, les marchés export font partie des voies d’avenir pour le Groupe Bigard. Des contrats sont mis en place sur les jeunes bovins, production qui quitte le plus souvent nos frontières.

Dans un marché français saturé, développer les ventes dans d’autres pays apparaît comme une solution pour la filière bovine française. « Sur nos marchés historiques comme l’Italie et la Grèce, la consommation de viande bovine s’érode aussi. Pour nous en sortir, nous allons devoir exporter ailleurs, et pas seulement des carcasses », a évoqué Frédéric Chauvin, directeur filière bovine Bretagne et directeur export du Groupe Bigard, invité la semaine dernière à l’assemblée générale du groupement bovin de Triskalia.

« Nous devons prospecter partout hors de l’Europe, innover dans l’offre, communiquer sur notre savoir-faire au niveau des élevages, mais aussi des abattoirs. Nous devons chercher des leviers de valeur ajoutée à l’export aussi, en décomposant les carcasses, en transformant… »

Des contrats étendus aux jeunes bovins mixtes

Mais le responsable prévient d’emblée : « L’export est un terrain ardu et instable du fait des parités monétaires, des choix politiques très fluctuants… » Mettre en adéquation ces marchés avec les délais de mise en production et les lourds investissements demandés sur les exploitations est donc difficile. « Les cycles de production un peu plus courts – génisses, jeunes bovins (JB) – conviennent mieux à l’exportation. » C’est une des raisons qui a poussé l’abatteur à mettre en place des contrats pour l’engraissement sur les JB laitiers et viande, avec des prix garantis en partie (effet marché atténué en cas de baisse, non atténué en cas de hausse). Le dispositif va être étendu aux JB mixtes.

« À l’export, il faut être là au bon moment avec les bons produits. Le JB mixte y est intéressant car il peut s’inscrire sur plusieurs pays : la Turquie et la Chine par exemple. » En 2017, la Bretagne a produit 75 800 JB, soit près de 10 % de la production nationale (7 % des JB viande et 15 % des JB laitiers) et les abattoirs bretons en ont abattu 170 500. Cette production est toutefois en régression de 4,5 % sur la région et de 3 % au niveau national, sur un an.

« L’export, ce n’est pas seulement du prix »

Globalement sur les 10 dernières années, les abattages européens ont baissé de 5 %, alors que la production mondiale de viande bovine a progressé (l’Inde et le Brésil sont en tête). Et alors que l’Europe à 28 pèse moins de 5 % des échanges mondiaux, l’Inde, l’Amérique du Nord et du Sud et l’Océanie sont les grands acteurs sur l’échiquier mondial avec des prix bien inférieurs à ceux que nous proposons. « Mais l’export, ce n’est pas seulement du prix. »

Aujourd’hui, des perspectives s’ouvrent notamment en Chine où le président Macron a obtenu une levée prochaine de l’embargo imposé suite à l’ESB. « Nous y visons la classe moyenne à supérieure, dont les revenus progressent, pour proposer de la viande de qualité différenciée. Un créneau où sont déjà présents toutefois l’Australie, la Nouvelle-Zélande et le Canada. Les Australiens y arrivent avec des produits de qualité, tendres et persillés, en frais… » Cette année, Bigard va recevoir des délégations chinoises pour des inspections et audits. Des produits ont déjà été vendus au Japon.

La Pologne devenue 1er exportateur européen

Sur les cinq dernières années, les exportations françaises ont connu une chute liée notamment à la crise économique qui a eu des répercussions financières, mais aussi sociales (concurrence sur la main-d’œuvre à l’intérieur de l’Union européenne). « En 10 – 20 ans, la Pologne est devenue le 1er exportateur d’Europe et pratiquement le 1er producteur. Des états et régions ont aussi cherché à protéger leurs marchés : c’est le cas en France, mais l’Italie a aussi fait la même chose… ».

Augmenter les démarches « filières export »

Aujourd’hui, le premier acteur français en viande bovine exporte environ 70 000 tonnes (t) de viandes fraîches et 2 000 t congelées. « Le développement à l’export s’appuiera sur deux outils d’abattage complémentaires : Quimperlé orienté davantage vers les marchés d’Europe du sud, et Guingamp vers ceux d’Europe du Nord et des pays tiers. » Pour répondre aux attentes des marchés export, le groupe souhaite aussi diversifier les mises en place chez les éleveurs et augmenter le nombre de démarches « filières export ».

Sur les accords Ceta et Mercosur, le responsable ne cache pas son inquiétude, sachant que ce sont plutôt des morceaux nobles qui seront importés. « Mais on ne pourra pas protéger nos frontières de toute façon. À nous d’identifier les différents marchés en Europe et à l’extérieur, d’avoir les contacts, de savoir communiquer et d’y être compétitifs. »

Non aux accords avec le Mercosur

[caption id=”attachment_33002″ align=”alignright” width=”157″]Louis-Francois-Leconte Louis-François Leconte,
président section bovine, Triskalia[/caption]

Comme l’a souligné récemment Coop de France, l’accord envisagé avec le Mercosur d’importation de 99 000 t correspond à ¼ de la production européenne d’aloyaux, des morceaux plutôt difficiles à vendre déjà en Europe. Ce chiffre ne peut donc pas être rapporté aux 7,2 millions de t de viande bovine produites en Europe. Et on ne sait pas comment sont contrôlés ces produits. Les politiques ne peuvent ignorer les nouvelles attentes des consommateurs européens. La filière française s’organise pour y répondre, en particulier sur le bien-être animal qui va être un des gros chantiers 2018. Les pratiques vont être harmonisées au niveau des élevages, des transporteurs et des abatteurs, et vont être communiquées aux consommateurs. Louis-François Leconte, président section bovine, Triskalia


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