Observer, prévoir et optimiser ses interventions

La pression « maladies » sur les cultures est très variable d’une année sur l’autre et d’une parcelle à l’autre. Un nouvel outil d’aide à la décision permet aujourd’hui d’adapter ses interventions à la situation réelle de l’exploitation.

La nuisibilité des maladies du blé en Bretagne est de l’ordre de 27 quintaux à l’hectare en moyenne depuis vingt ans. C’est la septoriose qui domine, suivie de la fusariose et ponctuellement de rouilles et oïdiums. Cette mesure de nuisibilité cache cependant une variabilité importante : de 45 quintaux en 2008 à 17 quintaux en 2013 pour ne citer que les années les plus récentes. Il y a donc tout intérêt à optimiser la protection du blé : le bon produit, à la bonne dose et à la bonne date. D’où l’idée d’associer, dans un outil d’aide à la décision, anticipation et observation pour une évaluation précise à la parcelle.

[caption id=”attachment_11486″ align=”aligncenter” width=”300″]Évolution de la nuisibilité en Bretagne Évolution de la nuisibilité en Bretagne.[/caption]

Une évaluation à la parcelle

A Triskalia, un tel outil d’aide à la décision (OAD) a été développé et lancé en phase pilote sur 2013. Cette évolution récente est basée sur l’expertise de deux partenaires : Arvalis et BASF. L’ensemble des essais « blé » de la coopérative a été conduit avec ce programme, appelé Fongitech. De même, il a été appliqué sur plusieurs parcelles d’adhérents en année de pilotage. Cette phase a permis de gagner en efficacité et en expertise, et d’améliorer le positionnement des programmes fongicides.

L’amélioration du pilotage des protections septoriose et fusariose à la parcelle demande l’enregistrement de données après le semis, au cours de l’hiver. Il faut renseigner la date de semis, le précédent cultural, le type de travail du sol, la variété (sa sensibilité à la septoriose et fusariose, ainsi que sa précocité) et l’emplacement de la parcelle. Cet enregistrement est réalisé auprès du technicien cultures. Les infos parcellaires sont ensuite compilées afin d’apporter aux agriculteurs une vision globale qui les aide à organiser les chantiers d’intervention.

[caption id=”attachment_11488″ align=”aligncenter” width=”300″]Gain de rendement moyen lié au positionnement Gain de rendement moyen lié au positionnement.[/caption]

Le module Stadilis donne une prévision de stade du blé trois semaines à l’avance. Il utilise pour cela un historique de relevés météo de plus de 10 ans, sans les références extrêmes, sur la station la plus proche de la parcelle. Ce module est aussi actualisé toutes les semaines pour la saison en cours, d’où un gain en précision d’intervention. Le deuxième module, Septolis, prévoit la date du premier traitement septoriose à réaliser, en fonction de la pression maladies de l’année. Le croisement des modules Stadilis et Septolis permet donc de positionner le traitement fusariose à la floraison du blé.

Des bulletins hebdomadaires

Chaque début de semaine, les agriculteurs adhérents à Fongitech reçoivent une restitution par e-mail. Ces envois ont lieu de début mars jusqu’à la mi-juin, ce qui couvre la période du stade tallage au stade floraison du blé. Les prévisions de stade, personnalisées à la parcelle ou au groupe de parcelles, permettent à chaque agriculteur de planifier l’ensemble de ses interventions 2 semaines à l’avance. Ainsi, il connaît les dates d’intervention clés, par exemple le stade épis 1 cm, pour le deuxième apport d’azote et pour le régulateur si nécessaire. De même avec le déclenchement du premier fongicide, pour un meilleur positionnement contre la septoriose, et le déclenchement du traitement fusariose à la floraison du blé. Chaque envoi hebdomadaire est accompagné d’un bulletin météo pour les huit jours suivants. Une aide bien utile pour privilégier les journées avec les bonnes fenêtres météo (pluviométrie, température, hygrométrie, force du vent) et ainsi optimiser la pulvérisation !

[caption id=”attachment_11487″ align=”aligncenter” width=”300″]Exemple de bulletin hebdomadaire Exemple de bulletin hebdomadaire.[/caption]

Cette modélisation a permis un gain de 4 quintaux à l’hectare, comparé aux pratiques habituelles des agriculteurs sur les cinq dernières années. De plus, l’enveloppe fongicide est instantanément adaptée à la pression maladie de l’année. Auparavant, les différences de rendements étaient constatées « après coup », et il était difficile d’ajuster les interventions à la pression de l’année. Lors des années caractérisées par un printemps secs (2001, 2003, 2004, 2010, 2011), il aurait été possible de réduire les programmes fongicides. Au cours des années à forte nuisibilité (1995, 1998, 1999, 2000, 2007, 2008, 2009, 2012), l’anticipation permet de justifier d’un investissement fongicide supplémentaire pour gagner des quintaux.

Jusqu’à 85 € de gain / ha

Fongitech est un moyen d’anticiper cette forte pression, notamment lorsqu’un positionnement précoce du premier fongicide est nécessaire. Une situation d’actualité cette année, pour les parcelles saines alimentées normalement en azote, car les cumuls de température depuis le semis donnent une avance de quinze jours de végétation sur une moyenne décennale. Globalement le service Fongitech peut représenter un gain de 85 € /ha et par an, d’une part grâce aux économies de fongicides réalisées les années à faible pression, d’autre part du fait des gains de rendement occasionnés par une meilleure adaptation du fongicide lors des années à moyenne et forte pression.

Un autre intérêt est l’amélioration de la qualité des récoltes. Une maîtrise des mycotoxines produites par les fusarioses permet de mieux valoriser les céréales dans l’alimentation animale. Dans ce domaine, la protection fongicide reste un moyen d’ajustement efficace. Elle permet de diviser par cinq cette teneur par rapport à un témoin non traité (les autres leviers importants étant l’enfouissement des résidus et la rotation afin d’éviter une espèce sensible après un précédent maïs). Fongitech innove donc par ses prévisions spécifiques, à la parcelle. Cet OAD se positionne en complément des conseils des techniciens cultures afin d’optimiser les interventions fongicides sur le blé. Pierre Le Govic /Triskalia


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