« Notre zone géographique se prête à faire de l’herbe, pas des cultures. Le foin a toujours eu une place prépondérante dans la ration », pose Mathieu Castrec, lors d’une porte ouverte organisée, le 13 novembre, par Segrafo lors des jeudis du foin. Depuis 2014, le couple a repris la ferme familiale et transformé l’exploitation en bio, avec un troupeau de 55 chèvres alpines, sélectionnées pour leur rusticité et leur capacité à pâturer.
Fonctionnement uniquement par capteurs solaires
En 2021, la construction d’une nouvelle chèvrerie a marqué un tournant. Fini les petits bâtiments éparpillés ; place à un outil fonctionnel, conçu sur-mesure. Et surtout, un séchoir à grange intégré : « Un vieux rêve : je m’étais toujours dit que lorsque je ferais un bâtiment neuf pour améliorer nos conditions de travail, je ferais un séchoir. »
Le dispositif est entièrement alimenté par l’air chauffé sous les 640 m² de toiture en bac acier. L’installation, à savoir deux cellules d’une surface de 55 m2 chacune, est pensée pour les 20 ha de SAU. Elle permet de stocker 4 à 5 chantiers de fauche par an. « Le coût de fonctionnement est d’environ 30 €/t de matière sèche, tout compris », précise l’éleveur. Une autochargeuse a été achetée d’occasion.
L’investissement a marqué la fin de l’achat de foin
Cet investissement a marqué la fin de l’achat de foin, « en étant 100 % autonome à tout point de vue, du volume nécessaire à sa qualité. » Car le résultat est là : un foin souple, riche en feuilles et en arômes, distribué chaque soir aux chèvres. « Je ne cherche pas à faire du foin précoce ; je vise la fin montaison-début épiaison, pour un bon rapport entre valeur alimentaire et cellulose. »
Le foin reste deux jours et demi au champ, parfois un peu plus selon la météo. « Il m’arrive de pousser le séchage en andain et de récolter de nuit pour toujours manipuler des brins d’herbe souples, ce qui permet de garder la quasi-totalité des feuilles. »
Sur les sols peu profonds, les prairies multi-espèces expriment tout leur potentiel : fétuque élevée, fléole, ray-grass anglais tardif, pâturin, trèfles, lotier et minette. « Le lotier se tient bien, de mieux en mieux même. Il valorise au maximum les 15 cm de terre sur l’arène granitique ; et on le retrouve plus facilement dans le foin grâce à nos fauches plus fréquentes. Il est intéressant sur les taux et le rendement fromager. »
Une approche du travail différente
Le séchoir n’a pas seulement amélioré la qualité du fourrage : il a transformé le travail et la production. « On a gagné en confort, en productivité à raison de +20 à 30 % de la production laitière, avec un meilleur maintien en fin de lactation, et les chèvres en meilleur état corporel. Au niveau du fromage, on a progressé sur la palette aromatique tout au long de l’année. Et quel plaisir de distribuer ce fourrage appétent et odorant : il est important de savoir pour nous agriculteurs se nourrir de petites satisfactions de ce type au quotidien. »
En misant sur le séchage en grange et des prairies diversifiées productives, les éleveurs ont trouvé leur équilibre : autonomie, qualité et cohérence. « On s’attendait à avoir des bénéfices, mais pas à ce point-là ! »
Carole David
Le plus petit séchage en grange de l’Ouest
Le bâtiment présente un faîtage décalé, le plus grand pan étant orienté sud/ouest. Enterré côté route pour une meilleure intégration paysagère, la hauteur de la chèvrerie (9 m au faîtage) offre aussi un plancher au-dessus de l’aire paillée.Le dispositif de séchage, entièrement alimenté par l’air chauffé sous les 640 m² de toiture en bac acier, fait rapidement monter la température de l’air à 40-45 °C. Celui-ci est ensuite propulsé sous le foin sur une surface de 110 m2. L’investissement total s’élève à 280 000 € (dont 123 000 € pour le séchoir), avec une aide de 50 000 € de subvention PCAE.

