« Ce n’est pas aux éleveurs de financer la guerre des prix », martèle Jean-Michel Javelle, le président de Sodiaal. La première coopérative laitière française (14 000 producteurs, 4,1 milliards de litres collectés) redoute en effet un retour en arrière. Après trois années de prix mieux orientés, les cotations mondiales se replient. « La grande distribution pourrait être tentée de répercuter ces baisses, au risque de casser la dynamique », craint Jean-Michel Javelle.
« Ce n’est plus entendable »
Or, la filière a retrouvé des couleurs. « Pendant des années, les producteurs ont vendu en dessous de leur coût de production. Aujourd’hui, ce n’est plus entendable », insiste-t-il. Les éleveurs, qui sortent de décennies de sous-investissement, ont besoin de prix stables pour moderniser leur ferme, robotiser, améliorer les bâtiments. Ou encore répondre aux engagements environnementaux, encouragés par Sodiaal qui vise une réduction de 20 % de son empreinte carbone par litre de lait et verse une prime ‘durabilité’ à ses adhérents.
Le renouvellement des générations est un autre motif d’inquiétude du président: 30 à 40 % des producteurs partiront à la retraite d’ici dix ans. « Sans perspectives économiques solides, les exploitations risquent de disparaître ». Pour faciliter les transmissions et installations, Sodiaal mettra en place « un fonds de garantie destiné à sécuriser les plans de financement des jeunes ».
La Bretagne, qui fournit à elle seule un tiers du lait de la coopérative, est particulièrement concernée. « Beaucoup d’exploitations ont massivement investi. Si demain le prix du lait n’est pas au rendez-vous, certains arrêteront sans crier gare », prévient Jean-Michel Javelle.
Derrière l’alerte, Sodiaal appelle à un « pacte de compétitivité » pour la filière laitière française. « Pas question de sacrifier l’avenir des producteurs sur l’autel du pouvoir d’achat : le lait reste une protéine accessible et nutritive ».
Didier Le Du