Aviculture : Besoin d’un cap pour investir

Avec une consommation de volaille en constante progression, la production française devrait se développer. Pour lancer des investissements sur du long terme, les éleveurs attendent un cap clair et des prix plutôt que des aides pour assurer la rentabilité des élevages.

Vue aérienne d'un poulailler - Illustration Aviculture : Besoin d’un cap pour investir
Les aviculteurs ont besoin de visibilité et de rentabilité pour lancer des investissements dans des poulaillers neufs.

« À l’échelle du monde, la production mondiale de volaille continue de creuser l’écart avec les autres viandes. À moyen terme, 80 % de la croissance du marché de la viande sera porté par la volaille », estime François Cadudal, agro-économiste chez Gira Food. Cette dynamique de production mondiale est tirée par une forte demande. La consommation de viande de volaille s’est maintenue malgré l’inflation. En 2018, la consommation mondiale était de 17,1 kg/habitant ; en 2024, elle est de 18,4 kg/habitant.

Une filière qui n’investit pas s’affaiblit ou s’arrête et ne se reconstruira jamais

« L’offre est malgré tout sous tension du fait de facteurs sanitaires (IAHP) et géopolitiques avec un impact sur les matières premières pour l’alimentation. Sans oublier les droits de douanes réciproques de l’UE sur le poulet américain mais qui devrait avoir des effets limités. Les facteurs climatiques se font sentir avec des aléas tant sur le marché des viandes (bœuf en Amérique du Nord par exemple) que sur le marché des matières premières pour l’aliment des volailles. N’oublions pas les facteurs capacitaires avec une évolution de la demande très supérieure à celle de l’offre notamment en Europe et en France », note l’agro-économiste. Et d’ajouter : « Il se dégage 2 enjeux majeurs pour la filière française : renforcer la résilience de la filière face à ces aléas et développer des capacités de production en adéquation avec la demande dans un contexte démographique défavorable à tous les maillons en plus d’assurer une transmission de l’existant. »

L’environnement, un frein au développement des élevages

L’interprofession de la volaille de chair a pour ambition de construire 400 nouveaux poulaillers d’ici à 2030 pour répondre à la demande grandissante en viande de volaille et chercher à reconquérir des parts de marché sur l’importation. « L’environnement est, depuis quelques années, un frein au développement des élevages, mais cela devrait s’améliorer puisque les ‘bobos du Covid’ repartent vers Paris », ironise Gérard Sarreau, président des Volailles Labrouche et président du Cnadev, lors de la table ronde qui s’est déroulée pendant l’assemblée générale d’Anvol, le 10 avril à Angers. Jean-Pierre Touzet, directeur du pôle agri-agro du Crédit Agricole évoque, de son côté, la notion de souveraineté alimentaire : « Une filière qui n’investit pas s’affaiblit ou s’arrête et ne se reconstruira jamais, il faut être vigilant. En face de chaque départ en retraite, il faut une installation. Nous devons aussi encourager et accompagner les agrandissements d’élevage. »

Améliorer la rentabilité des élevages

Pour Gérard Sarreau, la diversité de la volaille française est un point de fragilité pour la filière. « Je suis persuadé que le Label rouge qui est trop cher doit évoluer. Il faut mener des réflexions car il risque de devenir un produit de consommation festive ou uniquement du dimanche, acheté par des citadins et une population vieillissante. » Et Stéphane Letué, directeur de la coopérative des Fermiers de Janzé de répondre : « Nous n’avons pas la main sur le prix de vente de nos volailles Label rouge. Nous pouvons augmenter la densité et baisser l’âge d’abattage pour limiter le coût de production, cela ne veut pas dire que les prix vont diminuer en GMS et que la consommation va se relancer. » Pour Clément Moy, éleveur de volaille standard en Bretagne, il faut un cap clair sur l’agriculture et le mode d’élevage que l’on veut à l’avenir. « Nous avons besoin de visibilité pour pouvoir investir. Aujourd’hui, on nous demande de produire mieux avec plus de bien-être animal et au moins cher, cela n’est pas possible. Les groupements proposent des plans d’aides pour attirer les jeunes vers l’aviculture et assurer le renouvellement des générations. Mais ce sont des prix dont nous avons besoin pour améliorer la rentabilité de nos élevages et nous projeter sur de futurs investissements. »

Nicolas Goualan

Revaloriser le prix du vif

Opinion – Jean-Michel Schaeffer – président d’Anvol

Il y a urgence aujourd’hui à améliorer la prise en compte de la hausse des coûts de production que subissent les éleveurs en dehors du coût de l’alimentation. C’est la revalorisation du prix du vif et sa répercussion dans l’ensemble de la chaîne de manière durable qui rendra notre filière attractive pour les futurs éleveurs. Combien de temps allons-nous encore observer des éleveurs faire le choix d’autres filières plus attractives d’un point de vue économique alors que nous répétons jour après jour que notre filière a de l’avenir et que la dynamique de consommation est une véritable opportunité ? J’appelle les différents maillons à prendre la mesure de la situation, il ne s’agit pas ici de répondre momentanément à un caprice de syndicaliste mais bien d’assurer la pérennité de la filière et sécuriser l’amont pour les prochaines années. C’est aussi une façon de donner aux éleveurs les moyens d’investir et de préparer leur avenir.


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