Dossier technique

Enlever tout de suite le caillou dans la chaussure

Formateur auprès des pédicures au CFPPA du Rheu (35) et engagé dans la lutte contre les boiteries sur le terrain (Meuse et Ardennes), le vétérinaire Pieter Geboers revient sur l’importance de la détection et de la prise charge précoces des boiteries.

c - Illustration Enlever tout de suite le caillou dans la chaussure
Pieter Geboers, vétérinaire | © Toma Dagorn - journal Paysan Breton

Depuis des années, les spécialistes martèlent le même message : la prise en charge des boiteries demeure trop tardive. « On parle de 20 jours de retard pour une boiterie sévère, 70 jours pour une boiterie légère », rappelle Pieter Geboers, membre de l’équipe de formation des pédicures bovins au CFPPA du Rheu (35). « Quand on a un caillou dans la chaussure, on l’enlève tout de suite. La vache, on la laisse boiter pendant un mois ! », résume le vétérinaire.

Des éleveurs formés

Mais pour soigner plus tôt, il faut détecter plus vite. Alors que les boiteries représentent aujourd’hui la pathologie numéro 1 dans de nombreux de cheptels, le spécialiste regrette que beaucoup d’éleveurs ne soient pas formés sur le sujet et ne disposent pas d’une cage pour lever les pieds. « Pour assurer cette détection précoce, l’éleveur doit apprendre les signes qui ne trompent pas par l’observation de la ligne de dos, des aplombs et des mouvements de soulagement quand les animaux sont au cornadis notamment. Des formations existent pour savoir faire ces relevés, connaître les bases simples comme les étapes de parage et les premiers soins comme le nettoyage et traitement d’une lésion de dermatite, la pose d’un pansement… » Un éleveur formé va aussi mieux référer à ses partenaires. « Par exemple, un pied très gonflé unilatéral, c’est plutôt pour le vétérinaire. »

Tout à gagner à une intervention précoce

L’éleveur a tout à gagner à une intervention plus précoce : elle est à la fois plus efficace et moins coûteuse. En système robotisé, l’animal continue ainsi à bien fréquenter le robot. « Mais plus on attend, plus la lésion risque de devenir chronique et difficile, voire impossible, à soigner. Et plus l’animal souffre aussi : il se déplace moins et il perd en ingestion, en production, en état et en performance de reproduction. »

Réfléchir aux pratiques plutôt qu’au produit

Pour terminer, face aux problèmes de santé des pieds, Pieter Gebers rappelle qu’il faut prendre le taureau par les cornes. « Plutôt que de se demander quel produit sera efficace, il faut bien souvent faire évoluer certaines de ses pratiques au quotidien : hygiène, confort du bâtiment, alimentation, conduite du troupeau… Des gens spécialisés en audit boiterie peuvent alors être utiles pour identifier les facteurs de risques chez soi. »

Toma Dagorn

Un pied de vache atteint de lésions chroniques
Les problèmes pris en charge trop tard évoluent vers des lésions chroniques (lésions de Mortellaro, gonflement asymétrique signe d’une atteinte profonde, appariation d’exostoses…) qui peuvent être synonymes de boiterie à vie, rappelle Pieter Geboers devant ce pied en cours de parage.

Un suivi régulier pour éviter toute lésion nécrosée

À destination des éleveurs mais aussi des pédicures, Pieter Geboers insiste sur l’importance de rendez-vous de parage réguliers (tous les deux mois pour les troupeaux de 50 – 60 vaches, tous les mois à partir de 120 vaches) pour voir de petits groupes d’animaux ciblés (avant le tarissement, à partir de 45 jours après vêlage et les boiteuses). « Il faut tout simplement abandonner le parage troupeau annuel car, en général, on ne fait que courir après les boiteuses. »Avec la mise en place d’un suivi régulier par lots, le vétérinaire rapporte des « résultats spectaculaires », l’impact des boiteries diminuant « rapidement et drastiquement ». Par cette approche préventive, il n’y a plus d’évolution vers les lésions graves, pénalisantes et compliquées à soigner comme la nécrose de la pince mais aussi l’ouverture de la ligne blanche nécrosée, la seime interne longitudinale nécrosée… « En suivi, nous ne voyons plus ces lésions chroniques où il faudrait parfois une anesthésie et un curetage chirurgical par le vétérinaire pour soigner. »


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