poulailler-plein-air - Illustration L’œuf alternatif sort de sa coquille

L’œuf alternatif sort de sa coquille

L’œuf issu du système cage n’a plus la cote auprès du consommateur. D’ici 2022, les œufs alternatifs représenteront 50 % de la production française. Certains éleveurs ont opté pour la volière après la cage, d’autres s’orientent plutôt vers le plein air ou le bio par crainte que l’œuf sol ne devienne la prochaine cible de certaines associations anti-viande. 

« Le consommateur est parfois utopiste et veut un produit extraordinaire, de préférence bio ou plein air, pas cher et venant d’un élevage de 50 poules. Le problème c’est que dans l’acte d’achat cela ne se retrouve pas. Une majeure partie des consommateurs désirent un produit sain, à un bon prix et ne se posent pas la question de savoir si la poule est heureuse ou pas lorsqu’ils achètent un œuf », lance Ludovic Duriez, directeur du groupement d’éleveurs l’œuf de nos villages. La table ronde organisée par l’Itavi lors de la journée technique pondeuse à Pacé (35) le 1er décembre était l’occasion de revenir sur l’avenir de la cage dans la filière. Parallèlement, Le CNPO (interprofession des œufs) vient de finir de plancher sur le « contrat sociétal  d’avenir ».

Il s’agit d’accompagner l’évolution des élevages de poules pondeuses en cage vers des systèmes alternatifs, de manière concertée avec les welfaristes, les acheteurs (grande distribution, circuits RHF, IAA) et les institutionnels. Plutôt que de subir des décisions brutales, l’interprofession de l’œuf souhaite une direction claire et visible pour les opérateurs de la filière. « Ce contrat prévoit d’évoluer vers 50 % d’œufs alternatifs produits en France à horizon 2022. Aujourd’hui, 68 % des poules pondeuses sont en cages aménagées (32 millions) et 32 % (15 millions) sont en systèmes alternatifs (sol, plein-air, bio) », indique Maxime Chaumet, secrétaire général du CNPO.

10 millions de pondeuses vont passer en alternatif

Cet engagement de la filière va modifier le système d’élevage de 10 millions de pondeuses pour basculer vers des systèmes alternatifs d’ici 2022. L’objectif est ambitieux et coûteux, après la mise aux normes de 2012 qui a déjà nécessité 1 milliard d’euros d’investissements, atteindre 50 % de poules en systèmes alternatifs demande un nouvel effort d’environ 500 millions d’euros.

Yves-Marie Beaudet, éleveur et président de la section œufs de l’UGPVB met en garde la grande distribution : « Certaines enseignes communiquent déjà sur un passage à 100 % d’œufs alternatifs dans leurs rayons pour 2018. C’est à la production de s’engager sur une date et non aux GMS et ce sera 2022. Nous serons clair avec les centres de conditionnement avec des consignes sur les enseignes à livrer en priorité en œufs alternatifs. Il faut que la transition se fasse progressivement pour ne pas déséquilibrer le marché. »

L’actualité sanitaire ne va pas dans le sens du plein air

Après cette décision de s’orienter vers plus de production d’œufs alternatifs, les éleveurs doivent choisir sous quelle forme le faire : sol, Label rouge, plein air ou bio. Didier Carfantan, producteur d’œufs à Hénansal (22) a parié très tôt sur le système sol. « J’ai équipé certains de mes bâtiments de volières plutôt que de réinvestir dans des cages aux normes en 2012. Pour moi, c’est un bon compromis en termes de bien-être animal, de volume et de prix. On se situe entre la cage et le plein air. Dans cet espace, les animaux peuvent exprimer leurs besoins naturels comme voler, gratter… Si besoin, on peut même faire un jardin d’hiver si un jour il y a une exigence pour que les poules aient accès à la lumière naturelle. Je pense que l’avenir est dans la volière, il n’est pas possible de faire du plein air partout. De plus, l’actualité sanitaire ne va pas dans le sens du plein air. »

Pour Yannick Thoraval, directeur de production pour le groupe Avril, le sol a vraiment un avenir incertain. C’est une solution pour les éleveurs qui n’ont pas de foncier et ne peuvent pas basculer vers le plein air. « Il n’est pas simple de donner de la visibilité aux œufs de code 2. De plus, les acheteurs ne s’engagent pas sur la durée d’amortissement des volières. »

Produire l’œuf qui se vend

Yves-Marie Beaudet est persuadé que la volière n’est qu’une solution transitoire. « Si les associations anti-viande réussissent à avoir la peau de la cage, ils s’attaqueront ensuite aux élevages qui sont passés en système volière. » Le responsable de la section œuf de l’UGPVB a repris cette année un élevage de 13 000 poules au sol et 6 000 plein air qu’il va passer en bio avec un effectif de 15 000 pondeuses. Après avoir repris l’élevage de ses parents, le producteur se décrit comme un enfant de la cage. « Je reste persuadé que le meilleur œuf est celui issu du système cage. Mais il faut produire ce qui se vend. »

L’œuf alternatif  est devenu une monnaie d’échange pour vendre de l’œuf cage.

Pour preuve, Yves-Marie Beaudet transforme un de ses poulaillers, dont les cages ne sont pas encore amorties, en plein air. En changeant de système d’élevage, il passe de 58 000 à 40 000 pondeuses et crée un parcours de 17 ha avec des travaux considérables puisqu’il faut traverser une route. « Dans un an, je produirai sur mon élevage des œufs de code 0, 1 et 3. » L’œuf alternatif est devenu une monnaie d’échange pour vendre de l’œuf cage. « Chaque éleveur doit se poser la question de sa capacité à transformer son élevage pour s’orienter vers l’alternatif », conclut Yannick Thoraval.

Nouvelles mesures en faveur du bien-être
Les professionnels des œufs dans l’Union européenne répondent à une réglementation sur le bien-être animal la plus stricte au monde. Au-delà des aspects réglementaires, la filière française va toujours plus loin pour assurer le bien-être des poules. Dans le cadre du Contrat sociétal d’avenir, elle s’engage notamment dans des travaux de recherche visant à poursuivre la réduction de l’utilisation des antibiotiques, faire évoluer les techniques d’épointage… La filière met également en place de nouveaux outils afin de faciliter la mesure du bien-être animal. Une application mobile à destination des éleveurs sera ainsi développée pour effectuer des mesures. Elle sera accompagnée d’un catalogue répertoriant des pistes d’amélioration. Philippe Juven, Président du CNPO


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