La transmission, un train à ne pas rater

Jean-Marc Lanoë s’épanouissait sur son élevage laitier. Mais quand une repreneuse motivée s’est présentée, puis une seconde, il a cédé son affaire avant l’heure de la retraite.

Deux femmes et un homme au centre devant un fond rouge - Illustration La transmission, un train à ne pas rater
Jean-Marc Lanoë a cédé son élevage laitier à Émilie Saulnier d’Anchald et Magali Palacci. | © Paysan Breton - T. Dagorn

Jean-Marc Lanoë est un passionné d’élevage laitier. Pourtant, avant l’âge de la retraite, il a cédé et s’est reconverti pédicure pour bovins pour finir sa carrière. « Quand le train passe, il faut savoir lâcher prise et monter dans le bon wagon », souriait-il, vendredi 21 novembre, au Forum installation-transmission de la Chambre d’agriculture à Plérin. Il n’avait jamais pensé à un tel scénario. Une rencontre, « la bonne », a été le déclic. « Je me suis installé à 24 ans, à Lanfains (22), avec mes parents. À leur départ, j’ai poursuivi avec des salariés. » Sur 85 ha de SAU, son atelier livrait 500 000 L de lait par an. « Approche raisonnée en cultures et plutôt intensive côté troupeau », résume-t-il.

Une ferme de rêve

En juin 2020, Jean-Marc Lanoë, alors âgé de 55 ans, reçoit l’appel d’Émilie Saulnier d’Anchald qui lui dit qu’elle aimerait prendre sa suite un jour. La jeune femme qui a déjà trait chez lui s’explique : « Dans un cadre agréable à 3 km de chez moi, la ferme était simple et bien tenue. Je voyais en Jean-Marc un éleveur heureux. Ses animaux étaient en forme et donnaient du lait… Cela me faisait rêver. » Employée à Cerfrance, elle négocie une réduction de temps de travail pour devenir, en parallèle, salariée à mi-temps sur l’exploitation. De son côté, sans repreneur familial, le futur cédant est ravi que quelqu’un veuille poursuivre l’aventure. Il pose pourtant une condition : « Tu ne te lances pas seule. » En attendant, quand Émilie est là, Jean-Marc quitte souvent la ferme « pour faire des papiers ou de la course à pied » afin qu’elle gagne en autonomie.

Des visites de fermes avec le cédant

Quelques mois plus tard, Magali Palacci apparaît dans le paysage. Les deux femmes se sont connues à la Chambre d’agriculture où elles travaillaient quelques années auparavant. Autour d’un verre, elles se racontent. Émilie parle des bons moments à la ferme, Magali de son projet d’installation tombé à l’eau… Un jour, la première rappelle la seconde pour lui proposer de s’associer. « L’idée m’a tout de suite plu. Nous étions deux mamans. Nous nous entendions bien. Pour Émilie, c’était Lanfains ou rien. Moi, ma seule condition était de partir en système herbager que j’avais testé quatre ans comme salariée », raconte Magali. Pour avancer, les deux femmes visitent des élevages en tout herbe, vêlages groupés, monotraite… Mieux, leur cédant, curieux, les accompagne partout pour apporter son regard : « Ce n’était pas mon système de prédilection. Mais étant passionné de vaches, j’ai aimé ces découvertes ensemble », raconte-t-il.

Voisins bienveillants

En 2023, alors qu’Émilie réalise son parcours 3P, les vétérinaires proposent d’embaucher Jean-Marc comme pareur et de financer sa formation. Plus tard, Magali fait six mois en contrat de parrainage sur la ferme. Les repreneuses suivent aussi la session « Poser les bases d’une bonne association » de la Chambre d’agriculture. Puis elles s’installent officiellement au 1er octobre 2024. Avec un an de recul, elles ont « appris à se connaître » et s’épanouissent à Lanfains où elles se sentent « entourées » par un voisinage agricole bienveillant. Jean-Marc, lui, ne s’ennuie pas : « Je fais deux jours de parage par semaine. Je m’éclate au contact des vaches. Je vais en vélo au boulot, j’ai des week-ends et plus de papiers à faire. »

Toma Dagorn

« Locataires de tout »

À l’été 2023, Magali Palacci et Émilie Saulnier d’Anchald ont pris contact avec Terre de liens qui a racheté 60 ha et les bâtiments de la ferme. « Locataires de tout, nous versons 6 000 € de loyer par an. Si nous avions dû acheter nous-mêmes, nous rembourserions 15 000 à 20 000 € par an. » Et de poursuivre : « Nous avons préféré être peu endettées, dormir tranquille et nous verser un salaire dès le départ. » À l’installation, les associées ont pu échanger 8 ha de terre avec des producteurs porcins voisins pour gagner en surface accessible au pâturage.« L’année avant de s’installer est intense », prévient Émilie. Noyée de dossiers à produire pour la DJA, le prêt Britt, Terre de liens… « Mais si tu veux l’argent, il faut faire tous ces papiers. C’est long et fastidieux, mais autant en profiter. Beaucoup d’autres secteurs d’activité n’ont pas ces aides pour se lancer », poursuit Magali.


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