L’EARL de la Maison Neuve à Plestan (22) est un site pilote du concept Physior du Gouessant. Un modèle d’atelier porcin conciliant attentes sociétales et bien-être animal, a rappelé Christelle Houdard, directrice adjointe du groupe, lors d’une visite après quatre ans de fonctionnement. Pierre Morfouace, l’éleveur, raconte : « Mon ancien parc était en bout de course. J’allais arrêter la production. Ce projet innovant m’a remotivé. » Avec la coopérative, il a voyagé en Autriche, Allemagne, Suisse et Danemark pour s’inspirer. « Nous sommes partis d’une page blanche. » La construction des bâtiments a débuté en février 2020. Les cochons y sont entrés fin 2021 et les premiers charcutiers ont été vendus en 2022.


Dehors au premier âge
Cet atelier de production (265 truies en sept bandes, sevrage à 28 jours) en conditions réelles est aussi un outil pour mener des études grâce à des équipements de suivi développés avec Asserva et l’Ifip. « À l’intérieur, le couchage est sur sol béton plein avec apport journalier de paille servant d’objet manipulable. Les animaux ont accès à une courette au grand air et à la lumière naturelle. Ils font très majoritairement leurs déjections dans cette zone de vie », détaille Sophie Ambrois, responsable technique au Gouessant. À tous les stades physiologiques, les animaux sortent. « Des cases sentinelles sont bardées de capteurs pour appréhender leur comportement. Les animaux sont pesés à chaque passage à l’alimentateur, l’aliment consommé est mesuré… » Grâce aux puces RFID posées à chaque porcelet, on sait que « les animaux passent en moyenne la moitié du temps dehors ». Cela varie avec la météo et le tempérament de chaque individu.
Nous passons plus de temps dehors
De nombreux ajustements ont été nécessaires. « En maternité, nous avons testé la paille courte, puis la paille longue, avant de revenir à la courte », illustre Pierre Morfouace. « Nous travaillons sur de petites quantités : 125 à 150 t de paille par an. » Les charcutiers, eux, ont de la paille longue avec laquelle ils jouent. « Sans coupe de queue, il y a eu un gros travail d’ajustement et de compréhension sur les épisodes de morsures avec des relevés toutes les semaines », reprend Mathilde Radek, responsable Innovation au Gouessant. « Aujourd’hui, les cas sont anecdotiques : en fin d’engraissement, moins de 2,5 % des animaux sont concernés grâce à l’œil fin des éleveurs, à des tests d’objets manipulables… »
Il y a très peu de contention. La mise bas intervient en liberté. « Il faut une approche plus animalière. Passer du temps avec les cochettes pour les apprivoiser afin d’intervenir ensuite facilement autour de la mise bas », explique Noémie Studer, salariée de l’élevage.



Automatisation
« Ce système où les animaux passent du dedans au dehors réclame davantage d’observation. À l’arrivée, le bien-être animal amélioré induit notre bien-être d’opérateur. Nous passons aussi davantage de temps dehors. » Tout est fonctionnel (marche en avant) et l’alimentation automatisée, poursuit Pierre Morfouace. « Nous portons très peu de charge. Plus aucun aliment n’est apporté à la main. »
Toma Dagorn






Des GTE à la hauteur
Le gros point d’interrogation concernait les performances. « Bonne surprise sur les GTE », confie Sophie Ambrois. « Avec des programmes en aliment complet couramment utilisés dans le groupement, l’IC se situe à 2,72 sur 2024, contre une référence nationale Ifip de 2,76. Soit dans le premier tiers des élevages NE tous modèles confondus. » Le GMQ atteint 793 g (sevrage à 8 kg) en engraissement, contre 719 g pour la référence. « Nos résultats progressent. On cherche à mettre tout le monde dans la gamme, à gagner le centime au kilo », reprend Pierre Morfouace. Dans l’opérationnel, l’approche réclame une personne de plus (paillage, nettoyage, surveillance…), mais la consommation électrique est divisée par deux (ventilation statique, pas de lavage d’air), explique-t-il. Le défi est d’amortir le surcoût de 40 % des bâtiments avec 1,2 m2 par porc contre 0,8 m2 en standard (3,7 millions d’euros investis). « Il est évident que ce modèle bien-être ne peut exister sans un partenaire aval assurant un débouché », termine Christelle Houdard.