- Illustration Un skipper pas comme les autres
Eric Bellion a commencé la voile à l’age de 15 ans.

Un skipper pas comme les autres

Depuis une vingtaine d’année, le navigateur Eric Bellion associe sa passion de la voile à de grandes opérations de communication. Son objectif ? Montrer la force de la différence.

Dans le port de Saint-Malo (35), au pied de la cité corsaire, les bateaux attendent impatiemment le départ de la Route du Rhum. Les 38 voiliers monocoques Imoca, l’une des six catégories de la compétition, sont sagement alignés. Parmi eux se trouve celui sur lequel Éric Bellion effectuera la célèbre course transatlantique. D’un blanc immaculé, il se différencie par sa sobriété. Il est à l’image du navigateur, dont l’un des combats est de prouver que l’innovation humaine est équivalente, voire supérieure, à l’innovation technologique.

L’Imoca L’Hubert, quelques jours avant le départ de la course.

Cultiver la différence

« Je suis issu de la voile d’aventure, dans laquelle je me suis lancé il y a environ 20 ans. J’ai toujours recherché des expériences humaines pouvant être racontées ». À 46 ans, Éric Bellion est un fervent défenseur de la diversité. Son credo est de « pousser les gens à faire des choses différentes avec des gens différents ». Ainsi, il a très souvent été à l’initiative d’équipages éclectiques et non conventionnels. En 2003, le navigateur fait le tour du monde à la voile accompagné de deux amis d’enfance et de 45 jeunes infirmes moteurs cérébraux. En 2010, il établit un record de navigation entre la Bretagne et l’île Maurice à la tête d’un équipage de sportifs handicapés. En 2013, il devance des marins professionnels pendant une course au large avec la Team Jolokia, composée d’amateurs de milieux sociaux, de cultures, de sexe et d’âges différents. « Mon objectif est de créer la performance avec la différence », précise le skipper. Il est d’ailleurs le fondateur du fonds de dotation ‘Comme un seul homme’ qui promeut la différence dans une société de plus en plus cloisonnée.

La totalité des instruments de navigation est regroupée sur l’un des murs de la cabine.

Un célèbre Imoca

Éric Bellion a déjà participé à la Route du Rhum. La première fois, c’était en 2018. Le skipper navigue alors sur une goélette de 45 tonnes, baptisée Ahoy. La traversée dure 27 jours. Cette année, il effectue la course à bord de l’Imoca Hubert. Appartenant au navigateur Jean Le Cam, ce bateau est notamment connu pour avoir terminé 4e du Vendée Globe 2020 après avoir participé au sauvetage très médiatisé de Kevin Escoffier. « Cet Imoca a été conçu en 2006 », explique Éric Bellion « Il possède moins de technologie que les nouveaux bateaux mais il a été optimisé au fil des années, surtout pour le renforcer et l’alléger. Tous les détails sont soignés. C’est un bateau sur lequel je me sens bien ». Beaucoup plus léger (7,5 tonnes) et performant que la goélette, la traversée transatlantique s’annonce bien plus rapide. « J’estime arriver en 13  à 15 jours environ », annonce le marin. Une fois arrivé en Guadeloupe, Éric Bellion prévoit de faire naviguer des jeunes des quartiers défavorisés de Pointe-à-Pitre. « Aussi étonnant que cela puisse paraître, un certain nombre de ces enfants n’ont jamais vu la mer », confie le
skipper.

Objectif Vendée Globe 2024

Pour Éric Bellion, la Route du Rhum est également un moyen de lever de l’argent et d’attirer des entreprises pour son prochain grand objectif : participer pour la deuxième fois au Vendée Globe. Pendant cette compétition, connue pour être la plus solitaire au monde, le skipper et son équipe souhaitent montrer que le « collectif a toujours raison ». Pour l’occasion, ils vont alors créer la première écurie de voile. Probablement composée de quatre navigateurs et navigatrices, cette équipe mutualisera et partagera ses entraînements, son matériel et ses compétences.

Le bateau sobre

Aller à contre-courant des innovations technologiques, c’est l’une des motivations d’Éric Bellion. Ainsi, en vue du Vendée Globe 2024, il a co-conçu avec Jean Le Cam un Imoca plus simple, plus léger, plus durable et plus efficace, et dépourvu de foils, contrairement à tous les nouveaux bateaux de course. Sa performance vient donc surtout de la conception de sa coque. « Avec cet Imoca, je n’irai jamais très vite mais j’irai vite tout le temps », sourit le skipper. Ce bateau sobre sera mis à l’eau au printemps 2023. Arthur Rimbaud n’a qu’à bien se tenir !

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