La plus grosse manufacture d’ardoise bretonne était à Maël-Carhaix. À son apogée, 250 personnes y travaillaient. Si tout s’est arrêté en 2000, l’espoir de voir redémarrer l’activité un jour reste entier.
En traversant le bourg de Maël-Carhaix, on peut découvrir près de la caserne des pompiers un lieu retraçant l’histoire des ardoisières qui ont marqué cette commune des Côtes d’Armor située en Centre-Bretagne. Le musée des ardoisières, géré par l’association Ar Mein Glaz (la pierre bleue), fut fondé par Guy Morvan qui s’était aperçu que les enfants de Maël-Carhaix ne connaissaient pas l’existence des ardoisières sur leur commune. « Il est important de garder la mémoire du passé de notre industrie ardoisière qui a fait travailler jusqu’à 250 personnes sur Maël-Carhaix au plus fort de l’activité. La plus grosse manufacture d’ardoise de Bretagne était sur la commune », précise Jean-Yves Connan, président de l’association Ar Mein Glaz.
[caption id=”attachment_46712″ align=”aligncenter” width=”720″] Jean-Yves Connan, président de l’association Ar Mein Glaz, sur un poste de travail de fendeur ou l’ouvrier divisait les répartons de 7 cm d’épaisseur en ardoises de 2,5 mm.[/caption]
L’ardoise a remplacé le chaume
« La veine ardoisière bretonne va de Rocherfort-en-Terre à Ploërmel, puis de Mûr-de-Bretagne à Châteaulin en suivant le canal de Nantes à Brest. L’exploitation de l’ardoise a démarré dans la région de Châteaulin lorsque certains agriculteurs ont commencé à creuser dans leurs champs pendant l’hiver quand il y avait moins de travail », explique Jean-Yves Connan. C’est vers 1900 que l’exploitation de la veine ardoisière a réellement débuté à Maël-carhaix. À l’époque les ardoises sont réservées aux toitures des châteaux et des églises, mais petit à petit elles viennent aussi remplacer les chaumes des maisons. Ce matériau n’était plus très bien vu par les assureurs et c’était également l’abri idéal pour les rongeurs qui étaient vecteurs de maladies. Sur Maël-Carhaix, il y avait 2 sites d’exploitation de l’ardoise ou des puits. Des galeries ont été foncées afin de créer des chambres desquelles des gradins de schiste étaient exploités. « Ces chambres sont des salles d’un volume impressionnant. Certaines d’entre elles pourraient accueillir facilement l’Arc de triomphe », raconte Jean-Yves Connan. De ces chambres situées à plus de 150 m de profondeur sortent des blocs d’ardoise de 3,2 m de hauteur sur 1,3 m de largeur et d’une épaisseur de 28 cm, pesant 2,5 à 3 tonnes. L’ardoise prélevée en profondeur peut être fendue plus finement ce qui permettait d’alléger les toitures et diminuer le coût de la couverture.
[caption id=”attachment_46715″ align=”aligncenter” width=”720″] Les membres de l’association Ar Mein Glaz ont défriché le site de Moulin Lande pour mettre en valeur les bâtiments construits en ardoise dans lesquels travaillaient les ouvriers de l’ardoisière. Il reste aussi du matériel d’époque.[/caption]
Les fonceurs étaient des fils d’agriculteurs
Dans les ardoisières, il y avait 2 équipes distinctes : les fonceurs qui étaient dans les galeries et à la mine en profondeur et les fendeurs qui travaillaient en surface. « Les personnes qui travaillaient au fond étaient souvent des fils d’agriculteurs car le travail était mieux rémunéré qu’un emploi d’ouvrier agricole. Mais les fonceurs qui voulaient faire une carrière complète dans les mines n’arrivaient jamais à l’âge de la retraite pour cause de silicose. » Les fendeurs dont le travail était de diviser les répartons de 7 cm d’épaisseur en ardoises de 2,5 mm d’épaisseur étaient payés aux 1 000 ardoises. Ils n’avaient pas d’horaires fixes et beaucoup d’entre-eux avaient une petite ferme à côté, tenue par leur femme.
« Après 1945, l’ardoisière s’est modernisée et les ouvriers se sont spécialisés. La demande a explosé après-guerre ; il fallait reconstruire les villes bombardées comme Lorient, Saint-Malo ou Brest. À partir de 1960, la concurrence des ardoisières venant d’Angers ou d’Espagne a débuté. Puis, ce fut la concurrence des nouveaux matériaux tels que l’ardoise en fibrociment. » Aujourd’hui 98 % des ardoises utilisées en France viennent d’Espagne. L’ardoisière de Moulin Lande de Maël-Carhaix a fermé en 2000 car des mises aux normes étaient nécessaires. Depuis 10 ans le site s’est reconverti dans l’exploitation des déchets d’ardoises qui se trouvent en surface. Ils sont conditionnés en big bag ou vrac et vendus pour faire du paillage. Mais l’idée de recommencer à exploiter l’ardoisière reste présente dans la tête du gérant. « Il y a encore de la matière à exploiter dans le sol pour au moins 50 ans et certains monuments comme Notre-Dame de Paris mériteraient une couverture avec des ardoises de Maël-Carhaix plutôt que d’Espagne. »
[caption id=”attachment_46714″ align=”aligncenter” width=”720″] Dans le musée situé dans le bourg de Maël-Carhaix tous les outils servant dans les ardoisières sont exposés, on y retrouve aussi des photos d’époque et de nombreuses histoires en lien avec ce passé minier.[/caption]
Une ardoise garantie 100 ans
Musée des ardoisières
• Place de l’ancienne école, Maël-Carhaix,
• Ouvert cet été le mardi et vendredi de 14 h à 18 h,
• Visite de groupe possible sur rendez-vous,
• Renseignements : 06 84 00 94 98.