« L’urgence, relancer le marché »

crp-philippe-bizien-marche-cadran-porc-plerin - Illustration « L’urgence, relancer le marché »

Philippe Bizien, président du Comité régional porcin, a fait un « point d’étape » dans une Maison du porc au chômage technique.

Quelle est la situation depuis l’arrêt du cadran ?

Des records de poids d’abattage sont atteints : 94 kg, avec des différences phénoménales entre groupements et éleveurs… Sur le terrain, il y autant de prix que d’abattoirs ou de groupements : apparemment 17 différents la semaine dernière en France et un plus bas à 1,22 € / kg. Les petits abattoirs appellent de tout le territoire pour savoir combien payer le cochon. Nous vivons des semaines où tous les animaux produits ne sont pas vendus. On estime qu’il y a 30 à 50 000 cochons de retard, total des retards cumulés. Et quand il n’y a pas de fluidité sur le marché, impossible de mettre la pression sur les abatteurs. Sans oublier les difficultés de conduite d’élevage liées à ces surplus d’animaux.

Tout le monde s’accorde sur l’urgence de faire redémarrer la machine…

Sans remise en place d’une cotation publique, synonyme d’équité, nous hériterons d’un prix par éleveur comme dans les années 70. Le risque est de voir réapparaître des marchands de cochon et leurs pratiques infernales. Le producteur sera pénalisé parce que son lot est trop petit, que le chargement est trop lent, que son élevage est éloigné… On pourrait passer d’un prix départ élevage à un rendu abattoir. Ou voir le mode de pesée varier. Sans aucune transparence, les plus petits élevages et les plus faibles seraient les premiers touchés par ces pratiques d’un autre temps. Et plus globalement, cela pourrait remettre en cause toute l’organisation collective. Un prix de référence qui reflète le marché est indispensable pour l’amont autant que pour l’aval, car avec des prix différents partout, le concurrent des industriels ne sera plus l’Allemand ou l’Espagnol mais l’entreprise française voisine…

Chaque semaine se tiennent des réunions pour revoir la convention de marché.

Tous les abatteurs, dont Cooperl, y discutent et négocient… Tous sauf Bigard, invité mais toujours absent. Le 1er enjeu est de reprendre une cotation publique. Mais la rénovation de la convention de marché doit d’abord être aboutie : elle concerne bien sûr la fixation du prix, mais aussi les règles de fonctionnement et de paiement du porc. Il reste des détails à régler pour un consensus autour de la table. Objectif : éviter que des abatteurs estiment à nouveau que la cotation ne reflète pas le marché. L’enjeu suivant sera l’application de ce prix par tout le monde…

Vendredi dernier, groupements, syndicats et Chambres d’agriculture du Grand Ouest étaient réunis. Qu’en est-il ressorti ?

De grandes lignes à défendre : l’étiquetage d’origine sur les produits transformés quitte à aller au clash avec l’Europe, une meilleure valorisation du porc en RHD, un soutien à l’exportation et une solution compensant l’embargo russe… Des choses que l’on rabâche en exhortant le ministre de l’Agriculture à sortir de sa posture. Stéphane Le Foll restera le ministre de la désorganisation de la filière porcine et donc de la disparition des plus faibles. Des propositions sont sur son bureau depuis des mois, on ne demande qu’à travailler avec ses services. Un ministre est là pour prendre des risques. En signant un décret sur l’étiquetage, il forcerait le débat sur le dumping social et de l’harmonisation dans l’UE… Propos recueillis par Toma Dagorn


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