didier-labouche-jeunes-difficulte - Illustration Jeunes en difficulté : Didier Labouche, un paysan qui se veut citoyen

Jeunes en difficulté : Didier Labouche, un paysan qui se veut citoyen

À Laillé, dans la vallée de la Vilaine, la ferme de Didier Labouche conjugue activité équestre avec accueil de jeunes en crise ou en rupture…

Un espace de vie et de rencontre où des adolescents âgés de 12 à 17 ans viennent chercher des repères et confronter leur mal-être aux réalités d’une exploitation agricole. Pourtant, rien au départ ne prédestinait l’agriculteur à cette activité d’accueil. Didier Labouche qualifie sa démarche de citoyenne, basée avant tout sur la recherche d’une prise en charge adaptée et individualisée.

Les parcours professionnels réservent parfois de belles  surprises. Sur le papier, Didier Labouche n’avait pas le profil pour accueillir chez lui des jeunes en difficulté… Mais quand on est à l’écoute de ses intuitions et que l’on sait s’appuyer sur un solide réseau relationnel, les choses paraissent souvent plus simples à mettre en œuvre. « Un jour, un ami ingénieur m’a proposé de faire réaliser une étude de marché par ses étudiants de BTS, se souvient Didier. L’objectif était d’analyser les possibilités d’évolution de mon exploitation laitière vers un accueil à la ferme lié au développement d’une activité équestre. Je n’avais rien à perdre dans cette étude. Son résultat m’a encouragé à franchir le pas : avec la proximité de Rennes et le potentiel qu’offrait  la vallée de la Vilaine, miser sur l’accueil était tout à fait jouable… Mais à une condition : s’y consacrer à temps plein, donc arrêter le lait ! Voilà comment ma reconversion s’est engagée ».

Aujourd’hui, à trois ans de la retraite,  Didier s’apprête à transmettre « Équidétente », le centre équestre qu’il a créé, à sa fille Cécile. « Je suis content de la voir prendre la suite, d’autant qu’elle va le faire évoluer en développant l’accueil pédagogique ». Rassurer sur l’avenir de sa structure, l’agriculteur a volontiers accepté de jeter un coup d’œil dans le rétroviseur et de revenir sur un parcours de vie original.

Fils d’ouvrier, il grandit dans le nord de la France. Brevet de technicien agricole en poche, il travaille d’abord comme salarié en  production bovine. « En 1986, avec Fabienne (sa femme), on est venu s’installer à Laillé. On y a repris une petite exploitation laitière de 27 ha. Pour démarrer, j’ai acheté un troupeau de 20 génisses et acquis 10 ha supplémentaires ».

Il met alors son expérience de salarié agricole au service de son installation et au bout de trois ans, la production atteint les 200 000 L. Très vite, le couple se fait à sa  nouvelle vie, s’intègre à la commune. « Un jour, un copain nous a donné un cheval.  C’est comme ça que tout a commencé. Ensuite, j’ai acheté deux poneys, puis d’autres chevaux. Leur présence a fait venir du monde à la ferme, a créé le contact. L’activité équestre s’est alors développée (balades, randonnées au bord de la rivière…) et en 1996, nous avons stoppé la production de lait pour nous consacrer uniquement aux chevaux ».

Entre-temps, des amis éducateurs qui régulièrement viennent au centre faire pratiquer l’équitation à des groupes de jeunes, recommandent «  Équidétente » pour l’accueil d’adolescents en difficulté (lire ci-dessous). Didier et Fabienne Labouche, parents de cinq enfants, acceptent d’ouvrir le centre, leur lieu, à ces jeunes en manque de repère. « J’ai suivi les formations nécessaires et me suis appuyé sur le réseau Accueil Paysan, dont je suis adhérent, pour professionnaliser la manière de recevoir le public à la ferme ». Textes et photos : Pierre-Yves Jouyaux pour Groupama

Accueil d’adolescents en rupture : « Le cheval est un bon médiateur »

Membre du réseau « Accueil Paysan », Didier Labouche reçoit à la demande d’éducateurs, des jeunes mal dans leur peau pour les aider à redonner du sens aux choses et à leur existence. « Je suis régulièrement contacté par des institutions ou Centres départementaux d’action sociale (CDAS). On me propose d’intégrer un « accueil à la ferme » à la prise en charge d’un adolescent en mal de vivre. L’éducateur vient d’abord à ma rencontre pour m’en parler et expliquer ce qu’il attend de moi.

[caption id=”attachment_4498″ align=”aligncenter” width=”300″]Le cheval est un animal imposant, mais qui rassure, apaise Le cheval est un animal imposant, mais qui rassure, apaise. Face à lui, l’adolescent n’a rien à prouver et peut être lui-même. Un bon départ pour retrouver confiance en soi.[/caption]

Au départ, j’accueillais ces jeunes  pendant les vacances, une semaine ou deux. Maintenant je préfère travailler sur un accueil filé de plusieurs journées ou demi-journées. Quand l’adolescent vient au centre, chez nous, je lui consacre tout mon temps. D’abord, je le laisse s’adapter, se poser, comprendre la règle du  jeu : se dire bonjour, au revoir ou merci. Il lui faut accepter « le vivre ensemble », accepter d’échanger, de partager. Autrement dit, je lui laisse le temps nécessaire à l’installation d’un indispensable climat de confiance. Ensuite, quand il a pris ses marques, il peut s’intéresser aux activités de la ferme et participer aux différentes tâches, mais toujours à son rythme. Dernièrement, j’ai proposé à l’un d’entre eux d’aménager et de rafraîchir un van pour chevaux. L’idée lui a plu. Bien entendu pour ce type de projet, je n’ai pas d’exigence particulière en termes de résultat. Le principal, c’est qu’il se sente à l’aise, que ses passages au centre soient et restent pour lui une bouffée d’oxygène.

Dans ce cadre, la relation au cheval apporte beaucoup, c’est un bon médiateur. Il m’arrive de surprendre un jeune en pleine confidence avec son compagnon… Certes, c’est un animal imposant, mais rassurant et qui n’est jamais violent. Face à lui ou sur son dos, l’adolescent n’a rien à prouver, il peut être lui-même… Sachant très bien qu’un cheval se fiche pas mal de savoir s’il porte des chaussures Nike ou non… Les activités qu’on peut organiser à la ferme (poser une clôture, élaguer un arbre, préparer un repas…)  permettent de redonner du sens à la notion d’apprentissage. L’essentiel, à mes yeux, c’est d’abord de proposer à ce jeune en difficulté un accueil individualisé et adapté à ses besoins : qu’il trouve ici un petit havre de paix, une écoute, un lieu pour se ressourcer ».

Contacts

  • EARL Équidétente : Fabienne et Didier Labouche,
    La Corbinais – 35890 Laillé
    Tél : 02 99 42 54 00  ou 06 77 80 93 03
    labouche@orange.fr
    www.equidetente.com
  • Accueil Paysan
    17 rue du bas village CS37775 – 35577 Cesson-Sévigné
    Tél : 02 97 77 09 53
    www.accueil-paysan.com

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