Mouches dans les élevages en novembre, céréales déjà levées et vulnérables aux maladies, prairies d’un vert de mai, frelons asiatiques encore actifs, limaces à foison… Pour qui prend le temps de regarder, l’anormal saute aux yeux. Les chiffres le confirment : en Bretagne, la première quinzaine de novembre affiche +4 °C par rapport à la moyenne 1991-2020.
Et pourtant. Alors que les données s’empilent et que la science ne laisse plus aucune marge au doute, une forme de déni sur le dérèglement climatique flotte dans l’air, comme un parfum rassurant de confort mental.
La transformation du système alimentaire demeure un grand oublié des négociations climatiques
Ce décalage est flagrant jusque dans les grand-messes internationales. À Belém, où se tient jusqu’au 21 novembre la 30e COP, on parle beaucoup, on agit peu. Josep Borrell, ancien vice-président de la Commission européenne, désormais affranchi du langage diplomatique, résume la situation d’une phrase : « La consommation d’énergies fossiles continue d’augmenter. » On peut difficilement faire plus direct. En 2024, il alertait déjà sur un monde « qui ne se réchauffe plus mais bouillonne ». Des propos, comme d’autres, qui se sont évaporés comme l’eau d’une flaque en plein soleil.
Ce mois de novembre n’a rien d’un accident météorologique : c’est une avance de phase sur le climat qui vient. Et en agriculture, ni quelques ventilateurs dans les stabulations ni le remplacement de cultures – maïs contre sorgho, par exemple – ne suffiront à affronter ce monde-là. La climatologue Valérie Masson-Delmotte regrette d’ailleurs que la transformation du système alimentaire et l’usage des terres demeurent les grands oubliés des négociations climatiques.
Mais, au fait, de quel réchauffement climatique parle-t-on ? On grelotte en Bretagne cette semaine ! C’est bien connu : le froid engourdit les corps et anesthésie les esprits. Fascinante capacité qu’a l’air frais d’effacer, en un blanc matin, des décennies de science…

