Certains équipements existants peuvent d’ores et déjà aider les éleveurs à surveiller leurs animaux et à suivre leur santé. « Par exemple avec un drone, l’éleveur peut surveiller à distance ses animaux, voir si certains s’isolent, si les vêlages se passent bien… », souligne Adrien Lebreton, ingénieur Élevage de précision à l’Institut de l’élevage. « On peut aussi gagner du temps. » Un drone a été testé à Ferm’Inov (Saône-et-Loire).« En allant voir les animaux 1 jour sur 2, nous avons évalué le gain de temps à 35-40 %. Les drones que nous conseillons, avec zoom, d’un montant de 2 250 € HT sont amortis en 1 à 2 ans. »
Surveiller à distance la fréquentation à l’abreuvoir
D’autres solutions font l’objet d’expérimentations, à l’image des boucles d’identification électronique de nouvelle génération expérimentées à Mauron (56), pour surveiller à distance la fréquentation individuelle des aires d’abreuvement. Ces boucles auriculaires connectées sont détectées par un lecteur RFID UHF, couvrant en continu la zone de l’abreuvoir. Ce dernier peut être relié à un panneau photovoltaïque s’il n’y a pas d’accès à l’électricité.
Gain de temps et d’efficacité de surveillance
Deux approches sont testées dans le projet. Le ‘mode distant connecté’ consiste à télécharger toutes les données vers le cloud et à les valoriser grâce à un portail web. « Par exemple, il est possible de générer des alertes individuelles de non-fréquentation dès que la limite de temps (choisie par l’éleveur) est dépassée. Les données météorologiques pourront être associées pour affiner la création des alertes », soulignent les responsables de l’étude. La 2e approche, en ‘mode local non connecté’, offre une solution sans internet mobile. « Le dispositif enregistre localement les données. En connectant ponctuellement son Smartphone au dispositif (en Bluetooth), l’éleveur obtient un rapport complet de fréquentation des animaux à l’abreuvoir. »
Prochainement, l’Idele va investir dans la recherche de solution ‘low tech’ et pratique qui permettent de renforcer la surveillance ou de gagner du temps, par exemple des petits capteurs de niveau d’eau ou de détection du courant dans les clôtures…
L’IA peut analyser les images, les sons et alerter
L’intelligence artificielle (IA) fait aussi partie des solutions d’avenir pour la santé des bovins viande. Parmi les projets en cours, Thermopod vise la détection automatique des lésions podales en filières viande bovine et ovine, reposant sur la thermographie infrarouge (prise de photos des pieds permettant d’observer leur température et de détecter des inflammations). « Les bovins passent dans un couloir avant d’arriver dans la cage de contention où sont présentes des caméras qui prennent les photos. Cela demande une bonne contention du bovin », explique Claire Littlejohn, du service santé et bien-être animal à l’Institut de l’élevage. « Derrière, l’IA a été utilisée pour entraîner un algorithme qui devrait permettre de détecter automatiquement les problèmes. Le dispositif a été testé au Ciirpo en ovins. »


Le projet Bebop quant à lui se termine. Des essais ont été faits par France Limousin Sélection et à la ferme expérimentale des Établières. La poursuite du projet est en cours de discussion. « Il a permis, grâce à l’IA, la détection de comportements des jeunes bovins en engraissement : un stade de production qui comporte actuellement peu de données au niveau du bien-être. » La détection par l’IA de ces situations a été possible dans des cases d’engraissement : bovin couché ou en train de se coucher, debout ou en train de se lever, ingérer, boire et se déplacer. « Analyser ces comportements en continu pourrait apporter une aide à la surveillance à l’éleveur qui ne peut pas rester toute la journée devant la case. » Cela pourrait l’alerter sur des durées trop longues de couchage par exemple, ou un manque d’alimentation. « Le suivi individuel des animaux n’est par contre pas encore possible et l’IA, si elle peut aider à détecter un problème, ne peut pas en trouver la cause. Pour aller plus loin, ce type de démarche avec caméra et IA pourrait être utilisée pour la détection de toux qui se repèrent facilement et dont l’enjeu est majeur en élevage de jeunes bovins. »
Beef sense, projet réalisé de 2019 à 2021, faisait intervenir des capteurs pour la détection précoce de troubles respiratoires : podomètres et colliers activimètres, bolus intraruminaux thermomètres. « Ce type d’outils est désormais commercialisé auprès des agriculteurs mais avant d’en acquérir, il faut s’assurer de l’adéquation de l’algorithme qui est derrière avec les caractéristiques de son élevage. »
Agnès Cussonneau
Ne pas impacter la relation homme – animal
Les nouvelles technologies peuvent être intéressantes en élevage allaitant « mais ne doivent pas non plus impacter la relation homme – animal, importante à préserver pour la sécurité lors de la manipulation et des soins aux bovins notamment », pose en limite Claire Littlejohn. De plus, « l’IA n’est jamais fiable à 100 %. Les solutions proposées se construisent sur le long terme et ne sont que partielles. »

