Romanesco, l’enjambeur « chouchou » des maraîchers

Dans un secteur du maraîchage qui peine à recruter, la question de la pénibilité du travail est aujourd’hui primordiale. Romanesco, jeune société bretilienne, a donc choisi de miser sur le confort de l’opérateur avec la création d’un équipement associant ergonomie et efficacité. Pari gagnant.

Félix Gaulier, l’un des cofondateurs de Romanesco, aux commandes d’un enjambeur maraîcher fabriqué par cette jeune société malouine. - Illustration Romanesco, l’enjambeur « chouchou » des maraîchers
Félix Gaulier, l’un des cofondateurs de Romanesco, aux commandes d’un enjambeur « maison ». Particulièrement bien fini, arborant des couleurs dynamiques, cet outil novateur est commercialisé en direct par la société malouine qui effectue la mise en service auprès de l’acheteur. Avec ses équipements de base, l’équipement est proposé au tarif de 38 000 euros.

Petits déjà, Félix et Basile Gaulier adoraient jouer ensemble aux Lego. Les années passant, les petites briques de couleur ont cédé la place à la boîte à outils et au poste à souder. Mais le goût des deux frères pour concevoir et fabriquer est resté intact. Aussi, quand leur oncle, maraîcher en Normandie, les a sollicités pour imaginer un nouvel équipement, le duo ne s’est pas fait prier. « Il cherchait quelque chose pour améliorer le confort de travail lors des opérations de désherbage de ses carottes cultivées en agriculture biologique. La position allongée commençait alors à pointer le bout de son nez dans le maraîchage, nous lui avons donc construit un lit de désherbage sur roulettes ». Un outil que, sept ans après, le tonton utilise toujours pour sa plus grande satisfaction.

L’enjambeur a été conçu en collaboration avec des maraîchers

Dans les têtes bien faites de ces deux Géo Trouvetou Félix, l’aîné, est ingénieur, son cadet, Basile, normalien , la petite graine va germer. « Nous nous sommes dit qu’au-delà du seul désherbage, il y avait une piste à creuser avec un équipement qui permettrait également de planter, de limiter le port des charges… » Les frères Gaulier s’attèlent alors à la rédaction d’un cahier des charges en s’appuyant sur les besoins exprimés par des maraîchers avec qui ils échangent régulièrement. Rapidement, le projet se structure. Et le tandem se lance avec enthousiasme dans l’aventure entrepreneuriale. « Basile et moi sommes très complémentaires, souligne Félix. Et nous avons toujours eu en tête de travailler ensemble un jour ».

Un enjambeur au menu

Un midi, alors qu’ils mangent du chou romanesco, les deux frères, en quête d’une appellation pour leur société, ont le déclic. Voilà un nom facile à retenir, agréable à l’oreille et connu des maraîchers ! La start-up Romanesco voit le jour en 2021. Au printemps 2022, elle s’installe dans les locaux de la pépinière d’entreprises Le Cap, de Saint-Malo Agglomération. Un premier prototype est mis au point et testé lors d’une campagne estivale d’essais chez des maraîchers. « Cela nous a permis de valider le concept global d’une machine à trois roues, complètement modulaire et polyvalente ». D’ultimes améliorations sont apportées et, à l’automne, la première version finalisée de l’enjambeur Romanesco est assemblée dans leur atelier.

Présentée en janvier 2023 au Sival, le Salon des productions végétales qui réunit chaque année à Angers près de 30 000 visiteurs professionnels, la réalisation malouine décroche un prix de l’innovation. Et une opportune mise en lumière.

Une croissance prometteuse

La première machine est vendue l’été suivant, dans les Vosges. La deuxième en Occitanie. Puis suivent la Bretagne et la Normandie. Le bouche-à-oreille des utilisateurs et les nombreuses démonstrations effectuées un peu partout en France portent leurs fruits. Avec cinq exemplaires commercialisés en 2023, dix en 2024 et une quinzaine d’unités prévues en 2025, les débuts sont prometteurs. Pour répondre à cette croissance, la jeune société a fait construire, avec le concours financier du Crédit Mutuel de Bretagne, ses propres locaux dans lesquels elle a emménagé en juin dernier. Implanté à l’entrée de Saint-Malo, le bâtiment, à la fois esthétique et fonctionnel, comprend un atelier de 350 m². « Nous avons dimensionné la chaîne de production pour pouvoir fabriquer jusqu’à 50 enjambeurs par an ». Preuve que rien n’a été laissé au hasard, sur l’un des côtés du bâtiment, une planche de culture a été aménagée afin de tester les productions « maison ».

Comptant actuellement 5 salariés, l’entreprise envisage de se renforcer prochainement dans les domaines de la production et du commercial. « D’ici à trois ans, nous devrions être une dizaine de personnes », estiment les fondateurs. Face aux demandes émanant de l’étranger, ils prévoient de s’ouvrir, prochainement, vers le marché européen. Puis, à terme, de se développer à l’international. Il y a du pain sur la planche. Mais pas question pour les frères Gaulier de délaisser la partie recherche et développement où s’exprime leur créativité. Dans les cartons, figurent de nouveaux modules adaptables sur l’enjambeur ainsi qu’un prototype destiné, cette fois, aux exploitations maraîchères de moins de 2 hectares. Les grands aussi aiment assembler des Lego !

Jean-Yves Nicolas

« En phase avec les attentes »

Opinion – Emmanuelle Jourdan – responsable du pôle d’expertise CMB de Saint-Malo

Nous accompagnons Félix et Basile Gaulier, les créateurs de Romanesco, depuis leurs débuts. Ils sont tous deux très motivés, posés, réfléchis et pugnaces. Leur grande force est d’avoir su proposer un produit parfaitement en phase avec les attentes des maraîchers. En diminuant la pénibilité du travail manuel, leur innovation va permettre de faciliter le recrutement et la fidélisation des salariés sur les exploitations. C’est une solution durable pour un maraîchage respectueux des femmes et des hommes ainsi que de l’environnement.

L’atout de la polyvalence

« Dans le domaine du maraîchage, il y a encore beaucoup d’opérations réalisées à la main, constate Félix Gaulier. Avec les questions de pénibilité du travail que cela engendre. Sur les plus grandes exploitations, on trouve des tracteurs mais qui ne sont pas toujours adaptés au maraîchage diversifié. Parmi les trois ou quatre acteurs spécialisés dans le machinisme, nous avons chacun notre spécificité. La nôtre, c’est la polyvalence ». Conçu en collaboration avec des maraîchers, l’enjambeur Romanesco facilite les plantations, le désherbage, le paillage, le binage, la récolte et la manutention. Doté de trois roues motrices, d’une propulsion 100 % électrique, autonome grâce à son panneau solaire de 500 watts, capable de pivoter sur place, l’engin se pilote facilement avec un simple joystick. Sa vitesse régulée de 10 à 700 m/h est idéale pour les opérations manuelles, tandis que la vitesse de déplacement de 5 km/h permet de circuler aisément entre les parcelles. Via un système 3 points, il est aussi possible de l’atteler derrière un tracteur pour effectuer de plus grandes distances. Léger et modulaire, l’enjambeur Romanesco se veut à la fois ergonomique, économique et écologique.


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