whale 8274339 1920 - Illustration La chasse à la baleine, pièce de l’histoire de Madère

La chasse à la baleine, pièce de l’histoire de Madère

C’est un musée original et d’une grande richesse qui siège en baie de Caniçal à Madère. Il retrace avec intelligence et interactivité l’histoire de la chasse à la baleine - et surtout au cachalot - dans l’archipel.

La chasse à la baleine a débuté en 1941 à Madère grâce à la venue de chasseurs expérimentés des Açores. Elle a participé à la survie des habitants puis a constitué par la suite la principale activité industrielle de l’archipel. Elle est désormais interdite.

Surtout des cachalots capturés

C’est en fait le cachalot qui a été l’espèce de cétacés la plus chassée à Madère, abondante et plus facile à capturer que les baleines. « Ces animaux peuvent atteindre 18 mètres et peser 57 tonnes », soulignent les concepteurs du musée. Des vigies abritaient les hommes qui observaient la mer avec des jumelles à la recherche des cétacés et de leur souffle provoquant un nuage de vapeur à la surface de l’eau. 

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Photo de cachalot dans le musée, la principale espèce chassée à Madère.

Graisse, chair, os, dents… tout était utilisé

Au début, les communications entre les vigies et les embarcations se faisaient grâce à des draps blancs et par signaux de fumée. « Puis elles ont été améliorées via des radiotéléphones les reliant avec les navires en mer. Au plus haut, le nombre de vigies a été de 13, situées sur tout l’archipel. » Les baleinières se lançaient en mer suite au signal des vigies. Les hommes à bord occupaient une activité difficile et risquée.

Tout était utilisé dans la dépouille de ces géants des mers. « De la tête et du gras, étaient extraites deux types d’huiles qui étaient vendues et exportées. Elles avaient de nombreuses applications : dans l’industrie chimique, cosmétique, des peintures, comme lubrifiants de haute qualité. La chair et les os les moins durs étaient cuits dans des autoclaves, puis séchés et broyés pour produire des farines pour animaux et des engrais. » Les dents et les os, résistants et facilement modelables, servaient de matière première pour la confection de nombreux objets utiles ou décoratifs par les artisans locaux : marteau, burin, manche de couteau, aiguille pour coudre les filets, battant de cloche des vaches, cane…

« Les animaux étaient chassés avec des harpons lancés à la main sur lesquels était attachée une ligne en chanvre de la meilleure qualité. Le cachalot pouvait tirer la baleinière pendant plusieurs heures, s’épuisant, et le coup de grâce était donné avec une lance dont le but était d’attendre les poumons et le cœur. C’était une confrontation de force inégale. » D’autant plus que les techniques se sont modernisées.

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Différents ustensiles liés à l’activité baleinière : jumelles, harpon, lance, machette pour couper la ligne en cas de danger, déversoir pour retirer l’excès d’eau…

À voile et à rames au départ, les baleinières ont par la suite été équipées de moteurs. « Grâce au bruit des bateaux, les cachalots étaient amenés plus près de la côte où il était plus facile de les capturer, la profondeur qu’ils pouvaient atteindre étant alors limitée. » Les animaux tués étaient ensuite remorqués jusqu’au lieu de transformation et découpe.

Les premières années de la chasse à la baleine à Madère ont été expérimentales. La chasse était plus difficile sur la côte nord de l’île exposée au vent et aux vagues. « En 1942, une nouvelle station de traitement de cachalot a été créée sur la côte sud de Madère. À partir de cette station, une nouvelle flottille est née. Cette installation a gagné en importance lors des années 40, non seulement à cause des eaux abritées qui permettaient de hisser les animaux à terre plus facilement mais aussi parce que les animaux chassés sur la côte sud étaient plus nombreux. » D’autres flottilles ont été mises en place.

L’entreprise baleinière créée en 1944

Le 2 décembre 1944, l’entreprise baleinière de l’archipel de Madère (Ebam) a été créée par plusieurs entrepreneurs. « Elle a démarré ses activités en janvier 1945 et a obtenu la concession exclusive de la chasse à la baleine dans l’archipel en 1946. La concession a été successivement renouvelée pour des périodes de 10 ans. » À la suite de la création de l’Ebam, un ensemble d’investissements a eu lieu pour améliorer les communications et surtout pour augmenter la capacité de traitement et d’utilisation des produits des cachalots.

En 1947, des terrains ont été acquis à Caniçal pour la construction de l’usine des baleines. « Étant donné que ce village se situait géographiquement au centre de l’archipel, l’activité baleinière finit par s’y regrouper à partir de la fin des années 50. Toutes les autres stations ont ensuite été fermées. » Pour la petite histoire, certaines scènes de chasse du film Moby Dick de John Huston ont été filmées à Caniçal en 1955, avec des pêcheurs locaux. 

L’activité stoppée en 1981

La chasse pratiquée au long des siècles dans l’Atlantique par différents pays a entraîné à partir du milieu des années 1960 la diminution des cachalots aperçus dans les eaux de Madère et donc la diminution du nombre d’animaux capturés. En 1966, le nombre de baleinières en mer de Madère a été réduit à 4. Des alternatives aux produits issus des cachalots ont entraîné une chute de leur demande. À partir des années 70, leur commercialisation a aussi été interdite par certains pays occidentaux. La viabilité économique étant devenue difficile, l’Ebam a mis fin à son activité volontairement en octobre 1981. « Le musée rend hommage au courage et à la détermination des baleiniers mais souhaite aussi faire connaître les baleines, les dauphins et autres mammifères nageant dans les eaux autour de l’archipel devenues sanctuaire marin », soulignent les responsables du site.


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