6142.hr - Illustration Identifier les zones de contrainte du corps
E-Mage-In 3D a apporté des solutions au secteur industriel. La société travaille aussi dans le monde agricole, comme en élevage laitier, porcin ou en cultures légumières de plein champ. © E-Mage-In

Identifier les zones de contrainte du corps

Grâce à une combinaison connectée, la technologie est capable de recenser la fréquence des gestes pendant la récolte de légumes ou de mettre en lumière les postures pénibles qui sollicitent fortement le corps.

1 000 000, c’est le nombre de coupes enregistrées dans la région du Bordelais pour la taille et la récolte des grappes de raisin pendant une saison par un seul opérateur… Ce chiffre, enregistré dans la carte mémoire d’un sécateur électrique français de chez Infaco, fait un parallèle entre les vignobles et les cultures légumières bretonnes. En exemple, un producteur de légumes de la ceinture dorée donnera dans sa saison 500 000 coups de couteau pour récolter ses têtes de chou-fleur. Pour l’artichaut, 3 000 coups de lame tranchante d’un célèbre couteau repliable au manche en bois sont réalisés par jour par le même opérateur.

L’équipe Res’Agri Légumes de Saint-Pol-de-Léon (29) s’est penchée sur le sujet, en découvrant, lors du dernier Sival à Angers (49), une entreprise spécialisée dans les sécateurs électriques. « Pourquoi ne pas essayer de transposer ce type de matériel à nos cultures ? », s’est questionné Vincent Saliou, conseiller en cultures légumières à la Chambre d’agriculture. Lors d’une présentation de ces produits dans des parcelles de Plouénan (29), les légumiers ont pu se rendre compte de l’aide précieuse des petits outils coupeurs sur batterie (voir page 3).

L’avatar souffre comme vous

Réduire la pénibilité du travail passe par ces nouveaux outils conçus pour d’autres usages, adaptés au contexte de production breton, mais aussi par une meilleure connaissance des contraintes liées aux tâches agricoles. Basée à Camaret-sur-Mer (29), la société E-Mage-In 3D fait revêtir à des agriculteurs cobayes des combinaisons un peu particulières. « Enfilée sous la côte, la combinaison avec de nombreux capteurs près des articulations va enregistrer les mouvements. Une centrale d’acquisition va produire un avatar, ses points de contrainte vont se colorer en vert, orange ou rouge », explique David Pliquet, dirigeant de la société.

L’avatar ainsi créé va reproduire en temps réel les gestes du cobaye et faire ressortir les parties du corps sollicitées trop intensivement. L’entreprise planche sur de nombreux sujets agricoles, en comparant sur le terrain des vaccinations de porcelets administrées classiquement, ou avec des appareils intradermiques. Pour l’insémination artificielle des bovins laitiers, l’avatar a montré de grandes différences entre une méthode classique et une insémination à l’aide d’un endoscope. Ainsi, « l’avatar ne ment pas. Il peut mettre en lumière des tâches principales contraignantes, mais aussi les tâches secondaires ». Ces dernières peuvent être négligées sans cette technologie, alors qu’elles peuvent être responsables de troubles musculaires ou squelettiques.

Place aux ergonomes

« 93 % des souffrances et des arrêts maladies du milieu agricole ont pour origine une TMS », fait observer David Pliquet. Une fois les données de la combinaison au travail récoltées, le cumul des résultats donne des pistes aux ergonomes. La durée en situation rouge de l’avatar est analysée, car « on peut être dans une situation où le corps subit des contraintes, mais il ne faut pas que ce temps dure trop longtemps ». La combinaison enregistre aussi des éléments comme le nombre de pas effectués pendant la tâche, la distance parcourue ou la fréquence cardiaque.

Les travaux menés par E-Mage-In 3D font avancer les choses, comme le montrent les modifications apportées à des chariots en élevage porcin. Développés pour que les opérateurs n’aient plus à se baisser pour saisir les jeunes cochons lors de soins, ces chariots élèvent les animaux par le biais d’une manivelle. Une façon de réduire la pénibilité de l’opération, mais qui « peut provoquer des blessures car l’effort est latéral, et appuie sur les lombaires ». En modifiant la potion de cette manivelle, « ce qui n’engendre pas de coût de fabrication supplémentaire de l’outil », la source du problème a été éliminée.

Notre objectif est de prévenir

Le canal carpien est très sollicité par la préhension, ainsi que des nerfs de l’avant-bras comme le nerf ulnaire ou épicondylite (nerf du coude). Malheureusement, la filière agricole ne déclare que peu de maux liés à l’activité. Peu de jeunes agriculteurs font appel à nos services pour prévenir des maladies professionnelles, alors que c’est notre objectif. Nous allons travailler sur la pénibilité en élevage de bovin lait pour voir quand l’opérateur est en contrainte entre la salle de traite et la distribution de lait aux veaux. En légume, nous allons comparer l’année prochaine, grâce à la combinaison d’E-Mage-In 3D, la contrainte au travail en récolte de choux-fleurs, quand la lame du couteau est affûtée ou non. Pauline Lecorguillé, Conseillère prévention à la MSA d’Armorique


Fermer l'écran superposé de recherche

Rechercher un article