Les réserves manquent d’eau

Un tiers des producteurs de légumes de transformation s’inquiètent du niveau de leur retenue collinaire. Ils demandent une dérogation pour un remplissage complémentaire par pompage.

« Il manque deux mètres de hauteur d’eau, soit deux tiers de volume », déplore Paul Chantrel devant sa réserve de 30 000 m3 qui assure l’irrigation d’une trentaine d’hectares de légumes, à Taupont, près de Ploërmel (56). La retenue, créée en 1992, est pourtant située en fond de vallée. « À cette époque-ci de l’année, les fossés ruissellent. La prairie est inondée ». La pluie des dernières semaines n’a pas suffi à rattraper le retard accumulé. 580 mm de précipitations seulement l’an dernier. « J’ai obtenu une dérogation en mars 2017 pour remplir la réserve par pompage dans la rivière. Je vais devoir refaire une demande cette année ».

13 dossiers avaient été déposés l’an dernier par les adhérents de l’UOPLI (organisations de producteurs). Tous dans le Morbihan. Certains producteurs n’avaient pas demandé de dérogation, préférant limiter leur surface de légumes. « Il y aura au moins autant de dossiers cette année. Il est peu probable que les réserves puissent se remplir naturellement avant la fin février », prédit Jean-Claude Orhan, son président. L’administration avait accepté des pompages dans les rivières, au mois de mars 2017, contrôlés par la Police de l’eau. La demande portait sur 264 000 m3. Au final, 120 000 m3 avaient été pompés.

Les producteurs espèrent une même autorisation pour cette année. L’enjeu est de taille. Sans irrigation, la production de légumes est aléatoire. Impossible d’assurer les rendements et la qualité exigés par les industriels. Seulement 40 % des surfaces sont irriguées en Bretagne contre respectivement 95 % et 100 % en Nord-Picardie et dans le Sud-Ouest, régions concurrentes. « Si nous voulons conserver cette production et les emplois de l’aval, nous devons obtenir ces dérogations mais aussi pouvoir construire des réserves ». Seules 2 ou 3 sont créées chaque année ; il en faudrait 7 à 8 selon les producteurs. La Région est consciente du problème et accorde des subventions. L’Administration est plus réticente et refuse nombre de dossiers (impact environnemental).

Pas de légumes bio sans eau

« Sans nouvelles retenues collinaires, nous ne pourrons accompagner la forte augmentation de produits biologiques », déplore Bruno Jehanno, producteur de légumes bio sur une vingtaine d’hectares. « La production se fera, mais dans d’autres régions ». La Bretagne a pourtant des atouts en bio et en conventionnel : une pluviométrie qui permet d’utiliser deux fois moins d’eau d’irrigation que dans les autres bassins de production, des usines qui ne demandent qu’à tourner à pleine capacité, des producteurs motivés, équipés de nouvelles technologies (sondes de mesures d’humidité). « Des élevages ferment, la région se végétalise ; la production de légumes est une solution pour conserver de la valeur ajoutée », assure Jean-Claude Orhan. Jusqu’à présent, l’Administration fait la sourde oreille, la filière n’est pas jugée prioritaire…

Une bonne campagne 2017

Les pluies de la mi-juillet ont évité une mauvaise année en production de légumes. Les fortes chaleurs et le déficit en eau avaient fait craindre le pire en pois. Les programmes ont pourtant été atteints à 95 % grâce à l’anticipation des récoltes et à la réactivité des industriels. En pois bio, 12 % d’abandon ont été enregistrés en raison de problèmes d’enherbement. L’année a été bonne en haricots (beurre, vert, flageolet) en quantité et en qualité. Plus de 100 % des programmes ont été réalisés. Idem pour les épinards et les carottes Amsterdam, dont 100 % des surfaces sont irriguées. En choux-fleurs, les résultats sont plus mitigés. Au total, 20 880 hectares ont été implantés dont 485 en bio, soit 2,3 % de la surface.


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