usa-viande-marche-europeen - Illustration Les USA veulent imposer leurs viandes en Europe

Les USA veulent imposer leurs viandes en Europe

Intervenant à l’assemblée générale d’Inaporc, Laurie Bryant, président des importateurs américains de viandes, attend l’accord de libre-échange transatlantique pour s’attaquer au marché européen.

Le message de Laurie Bryant, président de la Mica (conseil américain des importateurs de viandes) a le mérite d’être clair : « Le marché européen est sous-utilisé pour les viandes de porc, de bœuf et de volailles. Nous voulons le déverrouiller ». Le discours est offensif. « Nous voulons abattre les barrières commerciales ». Persuadés d’être compétitifs grâce à des animaux de qualité nourris aux maïs et aux céréales peu chères, ils veulent s’imposer sur le marché de l’Union. Abattre les barrières tarifaires (droits de douane) mais aussi non tarifaires. Les hormones, par exemple. « Oui, l’objectif est de supprimer cette barrière. Nous pouvons imaginer un étiquetage positif des viandes ». Entendez par le terme « positif », une mention « produit sans hormones » sur les viandes qui n’en contiennent pas plutôt « qu’avec hormones » pour celles qui en ont.

Avouons que ce serait effectivement moins repoussant pour le consommateur… et à l’avantage des Américains. Pour l’utilisation d’anti-microbiens et notamment du chlore pour laver les volailles, le discours est le même. « Nous ne pouvons imaginer qu’un pays qui traite ses eaux de boisson avec du chlore interdise la désinfection des viandes avec ce même produit. Toute interdiction devra avoir une base scientifique sérieuse ». L’argument ne manque pas de poids. « Les Européens qui vivent chez nous ou qui visitent les États-Unis ne tombent pas malades », ajoute-t-il. Les Européens accepteront-ils un tel raisonnement ? Pour Claire Cheremetinski, de la direction générale du Trésor, un texte sur de telles bases sanitaires serait difficile à accepter. « C’est la ligne rouge à ne pas dépasser ». Une réflexion qui fait sourire Laurie Bryant : « Au début des négociations, il y a beaucoup de lignes rouges. Au final, elles perdent de la couleur ».

Étiquetage aux USA

Si l’Europe refuse toute concession sur les viandes produites avec des hormones (ou de la ractopamine), les Américains accepteront-ils des échanges d’autres produits ? Ralph Ichter, président d’Euroconsultants se veut optimiste : « Les Américains commencent aussi à se préoccuper des problèmes de bien-être animal et d’environnement. Ils sont de plus en plus demandeurs d’un étiquetage sur les OGM ». Pour les IG (indication géographique), le consultant considère qu’il n’y a pas d’enjeu pour les éleveurs français. « C’est bien plus important pour les Italiens. Les Français auraient tort de se focaliser là-dessus ». Il refuse tout pessimisme. « Le marché américain est ouvert. Quand on y va, on gagne. Les jambons de Bayonne sont, depuis cette année, pour la première fois, dans les rayons des grandes surfaces américaines ».

Accord transpacifique

Le Canada a d’ailleurs reconnu le système d’IG européen lors des récents accords signés avec l’Union. Ils ont accepté l’importation d’un quota annuel de 18 500 tonnes de fromages exempts de droits de douane (droits très élevés actuellement). En contrepartie, l’Union européenne a octroyé un quota annuel de viande canadienne de bœuf sans hormones de 45 840 tonnes et un contingent annuel de 75 000 tonnes pour le porc. « Ce n’est pas très satisfaisant pour la France, mais nous ne sommes pas seuls », concède Claire Cheremetinski. Ces volumes ne représentent qu’une faible part de la production européenne. L’ouverture des contingents se fera progressivement dès 2016. L’accord ne modifie pas les actes législatifs européens, comme ceux qui concernent l’interdiction de la viande aux hormones. On peut imaginer un même modèle pour les États-Unis. « Attention, la force de frappe des USA est bien supérieure à celle du Canada. Tout dépendra du tonnage de viandes concédé dans l’échange ». Quoi qu’il en soit, ces accords, réclamés en premier lieu par l’industrie allemande, n’interviendront pas avant la signature d’un accord transpacifique (TPP), entre les États-Unis et 11 pays (Australie, Brunei, Canada, Chili, Japon, Malaisie, Mexique, Nouvelle-Zélande, Pérou, Singapour et Vietnam), bien plus important aux yeux des Américains. Un accord qui pourrait intervenir rapidement, avant la fin 2015. Bernard Laurent

L’avis de Thierry Meyer, Directeur de la filière porc du groupe Bigard

L’Europe était en négociations pour une libéralisation des échanges avec le Japon. Avec ce pays, l’agriculture française n’a aucun intérêt défensif ; c’est très important notamment pour la viande de porc. —Les discussions sont actuellement ralenties, le Japon donne la priorité à la signature du TPP (traité transpacifique) avec les États-Unis qui aura des répercussions sur l’accès des exportateurs européens au marché japonais.— Les effets de ricochet sont très importants. Nous devrons réagir très rapidement derrière pour ne pas céder des parts de marché aux Américains.


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