Situation sanitaire en filière bovine : La Bretagne, indemne de DNC mais inquiète

Alors que la dermatose nodulaire contagieuse fait la une, les vétérinaires invitent à prendre du recul pour bien comprendre les enjeux de la stratégie sanitaire actuelle. 

Des mouches posées sur une vache de race Prim'Holstein - Illustration Situation sanitaire en filière bovine : La Bretagne, indemne de DNC mais inquiète
Tous les insectes sur les vaches ne sont pas vecteurs de la DNC comme la mouche domestique régulièrement observée à la prairie ou à la traite. | © Paysan Breton - T. Dagorn

La DNC pour dermatose nodulaire contagieuse fait peur. Si la Bretagne reste éloignée des cas de l’Est et du Sud-Ouest – 113 foyers détectés dans 75 élevages depuis le 29 juin en France – l’inquiétude était palpable à la réunion d’information des Jeunes Agriculteurs des Côtes-d’Armor, jeudi 11 décembre, à Plérin.

Des animaux en souffrance

« La DNC est une maladie virale exotique, nouvelle sur notre territoire, que nous connaissons mal. Non transmissible à l’homme, elle touche les bovins : vaches, zébus, buffles… », a démarré Stéphanie Jaunet, chef de service Santé animale à la DDPP 22. Elle peut provoquer fièvres (jusqu’à 41 °C), jetages, larmoiements, salivation, hypertrophie des ganglions lymphatiques… Mais elle se caractérise surtout par des nodules (« boules ») et lésions nécrotiques sur la peau. « Ces lésions peuvent être très douloureuses sur les muqueuses. Leur apparition dans la bouche peut empêcher de s’alimenter. Les animaux touchés souffrent », poursuit la vétérinaire. Si certains bovins porteurs s’avèrent asymptomatiques, on parle de 45 % de malades (morbidité) et jusqu’à 10 % de mortalité. Les séquelles sont importantes avec pertes de valeur économique.

Un foyer en Bretagne, c’est 700 000 bovins à vacciner

La DNC est transmise par des insectes hématophages (qui se nourrissent de sang) : « Les mouches charbonneuses ou stomoxes et les taons font office de vecteurs mécaniques de seringues volantes en passant d’un animal à un autre », explique Stéphanie Jaunet. Grégoire Kuntz, de GDS Bretagne, ajoute : « Contrairement aux moucherons culicoïdes pour la FCO ou la MHE, les stomoxes et taons ne parcourent pas de grandes distances. » Une précision qui a son importance : la diffusion naturelle de la maladie se fait « de proche en proche ». L’origine de foyers éloignés renvoyant alors à un transport d’animaux.

Maladie sous règlementation européenne

Si le mode opératoire de lutte contre la maladie est remis en cause par certaines voies, Stéphanie Jaunet rappelle que la loi de santé animale en France reprend les textes européens. La DNC est ainsi classée ADE. « A pour soumise à lutte obligatoire avec plan d’urgence national. D pour maladie bloquante soumise à réglementation sur les échanges. E pour soumise à déclaration obligatoire. » La stratégie de lutte validée en Conseil national d’orientation de la politique sanitaire animale et végétale (Cnopsav) le 16 juillet s’appuie sur trois piliers : empêcher la multiplication virale par le dépeuplement total des foyers (« tarir la source de virus que représentent les animaux »), limiter la dispersion de la maladie par la limitation des mouvements et diminuer l’excrétion du virus en recourant à la vaccination obligatoire. « Ces protocoles sont efficaces : ils ont permis à la Hongrie par exemple de se débarrasser de la DNC il y a quelques années. » Ils sont aussi utilisés en Espagne et en Italie qui ont détecté des foyers en 2025.

À la confirmation d’un foyer en France, deux zones sont aussitôt définies : une zone de protection de 20 km et une zone de surveillance de 50 km où la vaccination de tous les bovins est obligatoire. Ces vaccins vivants sont constitués de virus atténués qui vont mimer la maladie. « Un début d’immunité est constaté 10 jours après injection. Elle est complète à J21 pour une protection d’un an. »

L’impasse d’une vaccination généralisée

Dans la salle, un producteur s’interrogeait sur la disponibilité des vaccins. L’administration a calculé qu’en cas d’un premier foyer décelé en Centre-Bretagne, 700 000 bovins seraient aussitôt à vacciner dans un rayon de 50 km. Stéphanie Jaunet rassurait alors sur « la grosse capacité » de production de doses des laboratoires européens. « Alors, par sécurité, pourquoi ne pas vacciner tout le monde tout de suite ? », lançait un autre éleveur. Une piste aussitôt balayée par les vétérinaires : « Les autres pays considéreraient que la situation est hors de contrôle et fermeraient totalement leurs frontières à la filière bovine française. » Il n’y aurait plus d’export possible de génisses laitières, de broutards, de semences… Avec des conséquences économiques conséquentes.

Toma Dagorn

Privilégier l’achat d’animaux bretons

Grégoire Kuntz – Vétérinaire conseil à GDS Bretagne

Sans engagement collectif et mesures appropriées, la dispersion de la DNC peut devenir exponentielle. Quand on constate des nodules sur un animal, c’est une course contre la montre car la maladie a une durée d’incubation de 28 jours. En Bretagne, ces derniers mois, il y a eu des suspicions dans tous les départements. Des éleveurs ont vu des nodules et alerté leur vétérinaire. C’est le bon réflexe. Cela a permis de tester et d’améliorer l’organisation sur notre territoire. Heureusement, aucun cas n’a été confirmé positif. En plus de la surveillance de son cheptel, il faut aussi éviter d’intégrer des animaux et, en cas d’achat, se méfier de ce qui vient de loin en privilégiant des bovins bretons.


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