Rostrenen (22)
Originaire de Dublin en Irlande, Patrick Pardy a débarqué en France en 2015 : « J’avais envie de partir et de pratiquer le français que je parlais un peu. » Il voyage à vélo à son rythme de Paris aux Alpes, avant de poser son paquetage à Lyon. « Ma première idée était de devenir prof d’anglais. » En attendant, il répare à mi-temps les vélos de La Poste.
Le Centre-Bretagne vivant et vallonné
La pandémie de Covid-19 a constitué le dernier déclic pour Patrick et sa compagne Florie. « À la sortie du confinement, en juin 2020, nous nous sommes installés à Rostrenen (22). Ce territoire rural nous attirait pour ses paysages vallonnés et sa vie associative florissante. Et cela me rapprochait de l’Irlande. » Sur place, le couple a trouvé un hangar pour mettre ses affaires et « tester » l’environnement local. « Assez vite, les lieux nous ont convaincus. Nous ne voyions pas de raisons de partir ailleurs », sourit Patrick.
Des matières issues de l’économie circulaire
C’est là qu’est née « Le Rouquin qui roule », marque de sacoches de vélo. « Je n’avais pas de projet professionnel bien défini. Ayant beaucoup baroudé à vélo, je me suis appuyé sur mon expérience de la vie sur la route pour concevoir mes propres sacoches. C’était aussi une façon de créer un boulot que je pouvais emmener avec moi n’importe où », raconte l’autodidacte qui avait pris quelques cours de couture à Lyon. Pour l’anecdote, Patrick a cousu sa première sacoche « à la main » en utilisant du fil dentaire et un vieux matelas gonflable percé alors qu’il travaillait comme vendangeur. Un petit prototype à accrocher au guidon, recyclé, déjà pratique et étanche.

Matériaux industriels, fabrication artisanale
Ensuite, pendant un an, il s’est formé en regardant des tutoriels sur internet et en observant comment étaient fabriqués des sacs et des sacoches. « Je les démontais et les remontais pour me faire la main. Il fallait le temps que ça rentre car travailler sur l’envers est une logique un peu particulière. » Sur des forums en ligne, Patrick s’est aussi renseigné sur le fonctionnement et l’entretien des machines à coudre industrielles. « J’ai vite eu de la demande de la part des copains. Puis quand les copains des copains ont commencé à commander, je me suis dis qu’il y avait peut-être une vraie activité à développer. » Dans l’atelier, trônent aujourd’hui cinq machines à coudre. « Elles sont mono-tâche. La piqueuse plate fait du point droit pour assembler des pièces à plat. Celle à point d’arrêt, comme sur les jeans, sert à renforcer les sangles. La machine à canon permet de coudre dans l’espace, en volume… »
Pour produire, le concepteur recherche des matières issues de l’économie circulaire. Pour obtenir des matériaux imperméables, robustes et légers, le Breton d’adoption a noué des partenariats avec des entreprises de confection du paysage régional. « J’utilise par exemple des chutes de ciré marin Guy Cotten à Trégunc (29) ou de la voilerie All Purpose à Carnac (22), des morceaux de toile acrylique enduite d’un atelier de sellerie nautique à Concarneau (29)… » Ainsi, Patrick crée des sacoches locales et artisanales « grâce à l’upcycling de ces matières industrielles qui étaient en route pour la poubelle ». En complément, il achète quelques parties neuves comme les fermetures à glissière imperméables, le scratch velcro, les sangles ou du fil de voilerie résistant.


Les couleurs du filon maritime
Si le patron de chaque modèle ne change pas, le design final évolue au fil des collectes de matières. « J’exploite le côté coloré du filon maritime. Je valorise les chutes récupérées en créant des mini-séries aux teintes différentes. Ainsi, il y a toujours de la nouveauté. » Dans ses créations, pêcheurs et agriculteurs reconnaîtront par exemple des pièces aux couleurs iconiques jaune et kaki des cirés Cotten. « Parfois garantis 20 ans, ces matériaux conçus pour résister au sel, à l’humidité et aux UV sont parfaits pour mes sacoches. » Ils sont assemblés en fonction de leurs caractéristiques techniques : la souplesse du ciré, la résistance à l’abrasion du TPU… « Je travaille comme pour une toile de tente : j’utilise du fil hydrophobe pour monter des produits à double-paroi sans couture qui traverse. »

Patrick Pardy aime son « métier manuel et assez varié. » La conception demande du temps pour dessiner les modèles et découper les patrons en cherchant à économiser la matière pour produire très peu de déchets et optimiser le montage en ayant à réaliser le moins de coutures possible pour gagner du temps. Ensuite, la commercialisation se fait beaucoup par le site internet. « J’expédie une bonne partie de mes produits à des citadins cyclistes du quotidien qui cherchent une sacoche artisanale assortie à leur beau vélo. En France et à l’étranger. » Toma Dagorn
Contact : Boutique en ligne : www.lerouquinquiroule.com
Sacoches polyvalentes et portatives
Grandes sacoches de porte-bagage, sacoches plus petites de guidon ou sacoches de selle « à l’anglaise »… Patrick Pardy propose des produits avec plusieurs poches de rangement, polyvalents, portatifs en bandoulière ou en banane. « Et qui se détachent facilement quand le cycliste fait étape pour boire un café, aller au travail ou faire ses courses. » La gamme comprend aussi casquettes, chapkas et triangles réfléchissants. Les prix vont de 60 à 300 €. Les étiquettes sont drôles : « Le Rouquin qui roule, éco-cousu en Bretagne par de petites mains irlandaises ». La marque se fait avant tout connaître par le bouche-à-oreille et sur les forums spécialisés autour du vélo.

