Vincent Rubin, expert sinistre spécialisé en matériel agricole chez Alliance Experts, partenaire de Groupama Loire Bretagne, nous donne son point de vue sur ce que peut signifier une culture de la prévention dans une exploitation.
J’interviens régulièrement auprès d’agriculteurs suite à un sinistre sur matériel roulant : renversement, casse de pièce, absorption de corps étrangers, incendie, dommage électrique… La prévention doit effectivement se pratiquer au quotidien. Quand j’échange avec l’agriculteur sinistré (par exemple pour une tonne à lisier qui s’est renversée dans un virage ou un rond-point), j’essaie d’aborder la situation avec pédagogie, en lui faisant comprendre que – même si la volonté d’aller vite est compréhensible – négliger certains gestes comme le nettoyage des vitrages ou dépasser la vitesse autorisée peut malheureusement conduire à des situations bien plus difficiles à gérer… Jusqu’à se retrouver avec trois semaines, voire trois mois d’indisponibilité d’un engin ou d’un ensemble attelé (si toutefois l’accident n’est que matériel !). Autrement dit, à vouloir gagner un peu de temps, on peut en perdre énormément. Même si je reconnais que sur certaines périodes (épandage, semis, récolte…), il est difficile de résister à l’envie d’en faire un maximum si on bénéficie d’une fenêtre météo favorable.
Prenons le cas des risques d’incendie pendant les récoltes. Pour les éviter, il faut chaque jour souffler tous les recoins des engins pour ne pas laisser de végétaux séchés s’accumuler dans des zones où il peut y avoir des élévations de températures (échappement). Mieux vaut y consacrer dix minutes que de se retrouver avec une machine brûlée ou l’intégralité d’un hangar partie en fumée ! La prévention, c’est comme boucler sa ceinture de sécurité : cela doit être systématique, un réflexe. Même chose pour le nettoyage des vitres. Après une journée d’ensilage, il y a toujours des projections… Le lendemain matin, à contre-jour dans un virage, vous n’y voyez plus rien ; et s’il se met à pleuvoir, c’est pire, du beurre sur le pare-brise !
J’atteste qu’une bonne organisation au quotidien permet d’éviter l’accumulation de fatigue et de charge mentale. Jean-Marc Avril offre un bon exemple de ce qu’on peut faire sur sa ferme en matière de prévention. Dès qu’il entreprend quelque chose, il a toujours le mot sécurité en tête, 7 jours sur 7, du 1er janvier au 31 décembre.
La sécurité au cœur de l’exploitation
Pour Jean-Marc Avril, éleveur laitier, la sécurité est une priorité absolue. Face aux risques accrus par le réchauffement climatique, il a intégré la prévention dans chaque geste du quotidien. Cet été, il a équipé son tracteur attelé au big-baller d’une réserve d’eau de 800 litres avec tuyau enrouleur pour intervenir en cas d’incendie. « À la moindre étincelle, une paille fine peut s’enflammer », explique-t-il. Chaque année, il organise des entraînements pour que ses salariés adoptent les bons réflexes sans panique. Sur son exploitation, la prévention passe aussi par l’entretien rigoureux d’un parc conséquent : tracteurs, mélangeuse, semoir, pulvérisateur… « Ici, on fait nous-mêmes la maintenance, on connaît les gestes de sécurité avant d’intervenir », insiste-t-il. Propreté des vitres, vérification des rétroviseurs, réparation immédiate des anomalies : autant de détails qui évitent des drames. « La sécurité est toujours une priorité », martèle Jean-Marc Avril.

