Congés payés : quand le juge redessine les règles du jeu

Face aux récentes décisions de la Cour de cassation, les règles entourant les congés payés sont redéfinies. Explications.

Deux hommes à côté d'un tracteur dans un champ travaillant avec une tablette - Illustration Congés payés : quand le juge  redessine les règles du jeu
Les jours de congés payés pris sont désormais intégrés dans le calcul des heures supplémentaires de la semaine, comme s’ils avaient été travaillés. | © Banana Images - stock.adobe.com

Les dernières décisions de la Cour de cassation visent à placer les congés payés sur un piédestal comme un droit fondamental du salarié. Après avoir reconnu en 2023 le droit à acquérir des congés payés pendant un arrêt maladie, la Cour est allée encore plus loin le 10 septembre 2025 : un salarié tombant malade pendant ses congés peut désormais imposer à son employeur de reporter ultérieurement les jours non pris du fait de son état de santé.

Autre évolution majeure

Les jours de congés payés pris sont désormais intégrés dans le calcul des heures supplémentaires de la semaine, comme s’ils avaient été travaillés. Concrètement, lorsqu’un salarié prend des congés au cours d’une semaine comportant déjà des heures au-delà de 35 h, ces congés sont réputés avoir été travaillés pour le calcul des majorations de salaires (+25 ou 50 % selon leur rang). Exemple : si votre salarié a posé un jour de CP en milieu de semaine et a effectué 39 heures réelles de travail effectif, ce jour de CP compte pour 7 heures. Le total hebdomadaire étant de 46 heures, les 11 heures au-delà des 35 heures légales doivent être majorées en heures supplémentaires. Ces avancées découlent directement du droit européen, qui protège fortement le repos et la santé des travailleurs. Longtemps plus restrictive, la législation française s’aligne peu à peu sur cette interprétation, sous l’impulsion constante des juges. C’est donc moins le législateur que le pouvoir judiciaire qui façonne aujourd’hui la portée effective du droit à congés payés.

Pour les employeurs agricoles, ces décisions ne sont pas anodines. Elles modifient la gestion du personnel saisonnier ou permanent : suivi des arrêts, calcul des droits, bulletins de paie, ou encore organisation du travail. Les outils informatiques et les pratiques RH doivent s’adapter à ces nouvelles obligations, faute de quoi un contrôle MSA ou un contentieux prud’homal pourrait coûter cher.

Force est de constater que le juge social joue désormais un rôle moteur dans la mise en conformité de la France avec le droit européen. Ce mouvement, engagé depuis plusieurs années, impose une veille juridique accrue et une réactivité administrative à toutes les exploitations employeuses de main-d’œuvre.

L’enjeu n’est plus seulement de respecter la loi, mais d’anticiper ses interprétations : un défi pour un secteur agricole déjà soumis à de fortes contraintes économiques et saisonnières.

Jean-Michel Jéhanno / Cerfrance Bretagne

À retenir

Depuis le 10 septembre 2025, un salarié malade pendant ses congés payés peut reporter les jours non utilisés à son retour ou bien plus tard. Encore faut-il qu’il transmette sans tarder à son employeur son arrêt de travail. Les jours de congés sont aussi pris en compte dans le calcul des heures supplémentaires. Ces décisions, fondées sur le droit européen, renforcent la protection du salarié et imposent aux employeurs agricoles une mise à jour de leurs pratiques RH.


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