Biostimulants : Entre promesses agronomiques et réalités scientifiques

Depuis 2022, les biostimulants bénéficient d’un cadre européen harmonisé qui définit leurs effets et conditions de mise sur le marché. Mais derrière cet encadrement réglementaire, la recherche pointe encore des zones d’ombre.

Gros plan sur une personne en train de faire des tests dans un laboratoire - Illustration Biostimulants : Entre promesses agronomiques et réalités scientifiques
Les biostimulants sont parfois homologués uniquement à la suite d'essais 
en laboratoire. | © Pixabay

Depuis juillet 2022, le règlement UE 2019/1009 harmonise au niveau européen la définition des produits biostimulants et les reconnaît comme une catégorie spécifique des intrants agricoles. Cette norme encadre également leur commercialisation. Depuis 2022, un biostimulant est donc officiellement défini comme « un produit qui stimule les processus de nutrition des végétaux indépendamment des éléments nutritifs qu’il contient, dans le seul but d’améliorer une ou plusieurs des caractéristiques des végétaux ou de leur rhizosphère. »

L’agronomie de pointe sera nécessaire

Des biais d’homologation ?

Comme pour un produit phytosanitaire ou un produit de biocontrôle, un biostimulant doit obtenir une autorisation de mise sur le marché (AMM) avant d’être commercialisé. Avant 2022, ces produits devaient être homologués selon la réglementation nationale en vigueur. Cependant, depuis la norme UE 2019/1009, la mise sur le marché a été harmonisée et facilitée pour tous les pays de l’UE. Désormais, le fabricant doit démontrer l’efficacité de son produit en privilégiant des essais au champ. En revanche, dans le cas où l’isolement d’un stress abiotique ou d’un élément nutritif est difficile à mettre en place en plein champ, les essais se font en conditions contrôlées. En d’autres termes, certains biostimulants sont mis sur le marché alors que leurs effets bénéfiques montrés en conditions contrôlées n’ont pas pu être démontrés au champ. C’est là que le bât blesse. Pour Camille Verly, microbiologiste, cette méthodologie d’homologation possède des biais. « Les tests effectués en conditions contrôlées, ou en d’autres termes dans des terres mortes, ne sont pas représentatifs de la réalité du terrain. En laboratoire, la courbe de réponse est beaucoup plus visible. L’efficacité au champ, en revanche, dépend de nombreux critères : pH du sol, génétique, pratiques agricoles, météo, état actuel de la vie du sol de la parcelle… ».

Des statistiques faibles

Selon le règlement UE 2019/1009, l’efficacité du biostimulant doit être prouvée par un nombre minimal d’essais qui varie selon le groupe de cultures ciblé. Par exemple, pour qu’un biostimulant puisse revendiquer un effet sur une culture spécifique, au moins trois essais distincts sont exigés. Lorsqu’un effet est revendiqué sur un groupe de cultures, il doit être démontré à travers six essais réalisés sur au moins deux cultures distinctes. Cette méthodologie est-elle suffisante ? Comme le citait Arvalis dans un article publié en février 2025 : « Les preuves d’efficacité obtenues dans seulement quelques essais et sur un nombre limité d’espèces, ne garantissent pas que les biostimulants autorisés sur le marché seront efficaces dans toutes les situations que peuvent rencontrer les agriculteurs et sur toutes les espèces du groupe de culture. » En outre, dans le procédé d’homologation d’un produit phytosanitaire classique, un seuil de significativité de 95 % minimum est requis lors des analyses statistiques d’efficacité. Pour les biostimulants, ce seuil est rabaissé à 90 % pour les tests en conditions contrôlées et à 85 % au champ. « De plus, si on veut homologuer un nouveau produit chimique, celui-ci doit être plus efficace que le produit de référence. Un biostimulant, lui, doit simplement faire mieux que le témoin non traité », ajoute Camille Verly.

Changer de paradigme

« Les biostimulants pourraient avoir une efficacité et un intérêt dans le cas d’un changement de paradigme », explique Camille Verly. « Aujourd’hui, leur rôle est surtout lié à une diminution d’intrants chimiques, mais il faudrait surtout réfléchir à l’échelle de la santé du sol et de l’écosystème, et non celle de la plante. » Selon le scientifique, ces produits pourraient avoir leur place dans des « systèmes alternatifs », à l’instar de l’agriculture régénérative ou de l’agroécologie, au sens large du terme. « L’idée n’est pas d’opposer le bio ou le conventionnel, mais dans tous les cas, de l’agronomie de pointe sera nécessaire. »

Alexis Jamet


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