Les éleveurs bretons de porc, de lait ou de viande bovine ont repris un peu de souffle. Depuis quelque temps, en effet, les prix agricoles ont retrouvé des couleurs, permettant de reconstituer les trésoreries exsangues et d’envisager, enfin, de nouveaux investissements. Il faut dire que le retard accumulé dans les élevages est immense, après tant d’années de vaches maigres.
Mais la parenthèse des cours rémunérateurs est-elle en voie de se refermer ? Le porc a perdu 28 centimes depuis fin juillet et le marché mondial du lait montre des signes de fébrilité.
Moins je dépense pour manger, plus je remplis les caisses de l’État
Derrière cette conjoncture en repli se cache une vérité amère : qui, hormis l’agriculteur, a intérêt à ce que la nourriture garde de la valeur ? À vrai dire, pas grand monde… Pour le consommateur, confronté à un pouvoir d’achat contraint, le moins cher reste un réflexe. Pour l’État, une alimentation bon marché a deux vertus : apaiser les tensions sociales et libérer du budget pour des dépenses plus taxées. On oublie trop souvent que la TVA sur l’alimentaire est de 5,5 % contre 20 % sur la plupart des autres produits. Donc, moins je dépense pour manger, plus je remplis les caisses publiques ailleurs.
Quant à la grande distribution, elle s’est fait une spécialité de cette guerre des prix. Les campagnes publicitaires rivalisent de slogans pour convaincre qu’ici, c’est moins cher qu’à côté. Attirer le client avec des prix bas, tel est le modèle.
Tout ce système pousse l’alimentation vers le bas. Tout, sauf la réalité du métier : produire, respecter l’animal, préserver l’environnement, transformer, tout cela a un prix. La nourriture ne peut rester éternellement une variable d’ajustement. Il faudra bien, un jour, assumer cette vérité. On ne bâtira pas l’avenir des élevages bretons sur l’illusion du « toujours moins cher ».