Quand les associés du Gaec Bouget se sont lancés dans la culture des potimarrons, tout était semé. Les graines étaient implantées au plantoir directement au champ, la technique s’est ensuite mécanisée avec l’arrivée de machines. Le passage à une agriculture biologique a été une étape importante dans la stratégie de cette ferme familiale située à Guimaëc (29), car « en bio, les graines sont longues à germer. Les choucas des tours et surtout les mouettes se posaient sur les films biodégradables, empêchant de bonnes levées », se souvient Jordan Bouget, associé avec son frère Sébastien.Ce temps perdu faisait également la part belle aux adventices, qui occupaient rapidement l’espace. Le choix des membres du Gaec a donc été de passer par des plants, qu’ils élèvent eux-mêmes : ils font appel au prestataire Technidis Agro, de Lanhouarneau (29), qui ensemence les plaques de semis avec les graines fournies par les agriculteurs. Ce procédé est utilisé désormais pour les potimarrons mais aussi pour les choux-fleurs.
« Casser » les graines
Dans le tunnel qui sert également au stockage des récoltes, les plaques nouvellement livrées sont disposées sur des poteaux en treillis métallique, en prenant soin de ne pas les poser directement au sol. « Les plants peuvent facilement s’enraciner sur un sol nu ». Les choux-fleurs et les potimarrons ne sont pas conduits de la même façon : pour la crucifère, « nous laissons les plaques dans leur palette filmée pour que les graines cassent ». De cette façon, « les graines s’humidifient car les mottes sont mouillées. Le but est d’uniformiser la levée. Dans tous les cas, les plaques de chou-fleur doivent impérativement être étalées au maximum 48 heures après le semis », conseille Frédéric Cadiou, gérant de Technidis Agro. Pour les courges, les maraîchers étalent du terreau sur toute la surface des plaques. « La graine de potimarron est grosse. Si nous n’ajoutons pas de terreau, la semence ressortirait lors des irrigations et serait à l’air libre », observent-ils.
Être moins dépendant de la météo
Pendant la phase d’élevage des plants de potimarron en variété Orange Summer et Kermadec (variété légèrement plus tardive), les végétaux sont arrosés tous les matins. Cette espèce est peu sensible aux maladies, contrairement aux choux-fleurs. « Le tunnel doit être à côté de la maison, car il faut surveiller la croissance régulièrement. Il est plus facile de surveiller 50 m2 de plants dans un tunnel que 5 ha en plein champ », signale Sébastien Bouget. Une bonne ventilation de la serre et un arrosage préféré sur l’heure de midi conduisent à faire sécher rapidement le feuillage. Les petits choux restent 7 semaines sous abri, ils seront plantés au 15 juillet. Contre le mildiou, des solutions existent en agriculture conventionnelle. « En bio, c’est plus compliqué. L’utilisation d’engrais foliaires peut faire repartir les plants, le cuivre cicatrise la plante mais freine son développement. Pour les pucerons, c’est encore plus délicat ».
Un binage d’économisé
Le fait d’utiliser des plants plutôt que des graines est un confort dans l’organisation du travail. « Nous pouvons être livrés du jour au lendemain. Une fois les plants sur place, on peut lancer les chantiers quand on a envie. La plantation est un peu moins dépendante des conditions météorologiques, même en cas de faibles pluies annoncées, on peut y aller ». Si de grosses précipitations empêchent l’avancement des travaux, les producteurs gardent les plaques au sec et freinent l’arrosage pour ralentir la pousse sous abri, car « des plants trop développés coinceraient dans la machine ». Aussi, le fait de limiter l’irrigation rend les jeunes végétaux plus résistants, en prévision de leurs futures conditions extérieures.
En amont, la préparation de sol passe par un labour, suivi d’un passage de herse, voire 2. Ces interventions rendent aussi les binages futurs « beaucoup plus faciles quand la terre est bien préparée ». Une fois plantées, les cultures sont binées, une seule fois si le temps est poussant, souvent 2 fois. « C’est un binage d’économisé par rapport à un semis ». Les potimarrons sont plantés « profonds, pour se prémunir des attaques de choucas ». Avec une densité de plantation de 8 000 sujets par hectare, chaque courge « va mettre une semaine à s’enraciner ». Après cette période qui semble visuellement être une pause, la culture va croître très vite. « La planteuse avance à raison de 1,5 ha par jour. Aussi, en comparaison avec un semis, on sait quels plants sont bien en terre. En semis, on ne voit rien jusqu’à la levée », concluent les maraîchers. À l’avenir, les associés du Gaec Bouget vont tester des plantations sans film biodégradable.
Fanch Paranthoën


Élever son propre plant
Avec la livraison de plaques de semis déjà ensemencées, « on gagne en liberté : chacun fait son plant à sa convenance, qu’ils soient petits ou plus grands. L’élevage dure entre 5 et 7 semaines. Mais élever ses plants, c’est comme élever des animaux : il faut être attentif et les suivre très régulièrement », fait observer Frédéric Cadiou.