Bien-être homme-animal : Un mariage heureux à la ferme

Dans le Morbihan, le Groupement d’intérêt économique et environnemental « Bien-être de l’homme et de l’animal »,  créé en 2018, a su fédérer un groupe de 14 éleveuses..Ensemble, elles ont réfléchi et œuvré à la mise en place d’un cercle vertueux liant le bien-être des animaux à l’amélioration de leurs conditions de travail.

Une femme et un homme avec des vaches dans une stabulation - Illustration Bien-être homme-animal : Un mariage heureux à la ferme
Karine Le Métayer (à gauche) et Marylise Le Guénic, docteur vétérinaire : « Les améliorations sur le bien-être se répondent et se répercutent positivement sur l’homme comme sur l’animal. Lors du bilan du GIEE, 37 changements de pratiques ou de comportements ont été recensés ».

Autour d’un café, Marylise Le Guénic, vétérinaire (chargée de mission Santé – Bien-Être des bovins) et Karine Le Métayer, éleveuse laitière à Languidic, évoquent tout le bien qu’elles pensent du travail accompli ces cinq dernières années au sein du GIEE où elles ont pris l’habitude de se retrouver. « Maintenant quand je vais soigner les veaux, je leur donne une petite caresse, raconte l’éleveuse. Un veau qui n’a plus peur et qui mange bien, c’est bon pour lui comme pour moi ! ».

Un veau qui n’a plus peur et qui mange bien, c’est bon pour lui, comme pour moi !

Mais que représente vraiment cette petite caresse ? Pour l’expliquer, Marylise Le Guénic prend le temps de recontextualiser : « En 2018, l’animatrice de Résagri 56 m’avait sollicitée pour donner des clés au conseil d’administration sur ce qui se jouait dans la société autour du bien-être animal. À cette période, la fin des quotas laitiers avait encouragé la croissance des troupeaux (donc de la charge de travail), tandis que commençait à se mettre en place la méthode d’évaluation du bien-être animal en exploitation laitière. Autant d’évolutions de nature à fragiliser un peu plus les éleveurs, inquiets des attaques contre la profession. D’où l’envie exprimée par le groupe d’aborder conjointement bien-être de l’homme et de l’animal, notion faisant écho au concept de One Welfare, apparu en 2016, affirmant que l’un ne peut aller sans l’autre. Il était tout à fait cohérent d’y travailler avec ces éleveuses préférant agir que subir ».

À la place de l’animal

« Mon rôle a été d’aider le groupe à s’interroger, poursuit Marylise, mais aussi de lui préciser les choses : bien loger, bien nourrir, bien soigner les bêtes, ça, c’est le métier de l’éleveur. Le bien-être animal, lui, s’évalue du point de vue de la bête. Le but n’étant pas de lui prêter des émotions ou perceptions humaines, mais d’essayer de comprendre les siennes ». Des journées sur l’éthologie invitant à se mettre à la place de l’animal ont permis aux éleveuses de faire évoluer leur façon de travailler. Plusieurs d’entre elles ont mis en place des jeux pour les veaux quand d’autres installaient des brosses dans leur stabulation. « Un simple aménagement pouvant faire gagner du temps à la traite puisque les vaches, motivées pour aller se gratter, quittent la salle plus rapidement ».

Écorner les habitudes

Côté bien-être de l’éleveur, Marylise Le Guénic précise : « On a commencé par établir un diagnostic avec des questions simples : comment j’arrive à me libérer du temps ? Quelle est ma pénibilité physique au travail ? Le groupe a su échanger, trouver, partager des astuces. Chaque éleveuse a pris conscience de la possibilité de réduire l’impact des astreintes en s’affranchissant de ses habitudes comme des injonctions du monde agricole. Objectif : introduire de la souplesse dans l’organisation du travail, voire redistribuer les rôles. Ainsi, certaines se sont formées à l’écornage sous anesthésie. Aujourd’hui, elles remplacent le plus souvent leur conjoint pour le faire. Un exemple où tout le monde trouve son compte : la technique supprime la douleur, améliorant la condition de l’animal et par conséquent celle des éleveurs qui vivent mieux ce moment ».

Et la vétérinaire de conclure : « Je constate que le travail collectif est toujours aussi efficace pour ne plus se sentir seul face à ses problèmes. Je suis contente d’avoir participé à l’animation d’un groupe aussi soudé. Même si ce GIEE est clos, on va continuer à se réunir et à avancer. De plus, ce travail va pouvoir nourrir la réflexion d’autres collectifs ».

Pierre-Yves Jouyaux

En savoir plus : Exposition photo sur ce GIEE – Au salon de l’alimentation de Lorient ‘‘Terre et Mer’’ 23 et 24 mai

Éthologie à l’ombre des pommiers

« Les bêtes ressentent notre stress. Avant de me rendre à la traite, je calme ma respiration », témoigne Karine Le Métayer qui a pris part à ce GIEE. « Progressivement, j’ai réorganisé mon travail, parvenant même à me détacher d’impératifs horaires liés à des habitudes prises quand mes enfants étaient petits. J’ai beaucoup appris grâce à l’approche éthologique. Elle nous a fait prendre conscience que les vaches perçoivent notre état. J’ai aussi approfondi mes capacités d’observation pour comprendre ce qui ne va pas chez l’animal [ ]. Avec mon conjoint, on a installé un brumisateur dans la salle de traite. Quand il fait chaud, cela rafraîchit l’atmosphère. L’été, je privilégie mes parcelles plantées de pommiers pour que mes vaches puissent se mettre à l’ombre. J’apprécie vraiment la confiance qu’apporte un tel groupe. Si une participante n’est pas bien, même pour un motif hors-sujet, elle peut en parler. C’est important de savoir qu’on est écouté et qu’on peut trouver des solutions ensemble. Pour moi, c’est comme une thérapie ! ».


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