Redonner de la place à la prairie sur ses surfaces accessibles

Côté production d’herbe, la Bretagne présente des atouts dont il faut profiter dans un contexte d’intrants coûteux, de contraintes environnementales et de pénurie de main-d’œuvre, estiment les conseillers de la Chambre régional d’agriculture. Récapitulatif des grandes étapes d’un retour au pâturage. Dans un contexte probablement durable de prix élevé des intrants et des carburants, Arnaud Cousi, conseiller en production laitière à la Chambre régionale d’agriculture, estime que la valorisation du pâturage est plus que jamais une voie à suivre. « C’est incontestablement l’idéal en termes de valeur alimentaire et de coût à la tonne de matière sèche ingérée par les vaches. Le pâturage a toute sa place pour contribuer à l'optimisation des charges de mécanisation en lien avec la distribution, de l'épandage et de la maîtrise de la charge de travail sur certaines périodes de l'année. » Valoriser sous forme de prairie plutôt que de cultures annuelles les surfaces accessibles autour du bâtiment permet dans un système de pousse maîtrisé d'apporter une herbe à 1 UF et 170 g de MAT/ kg MS moyen pour des mélanges graminées et légumineuses type RGA-TB « Avoir de l’herbe de très bonne qualité mais mal exploitée est contre-productif. La gestion du pâturage réclame des repères de gestion et un suivi hebdomadaire des cadences de pousse dans les parcelles », rappelle le conseiller. Un bac de 600 L pour 40 vaches En conduite en paddocks tournants, le point de départ quand on veut (re)mettre le cap à l’herbe est de redécouper la plateforme herbagère en parcelles bien dimensionnées en fonction du système fourrager global et de la taille du troupeau avec l’objectif de temps de séjour réduit à chaque passage. « 1 are offert par vache et par jour est un bon compromis entre lait produit par vache et lait produit par hectare dans des systèmes ayant a minima 25 ares accessibles au pâturage par vache. Sur des systèmes limités à 15 ares par vache, proposer de 0,5 à 0,75 are par vache et par jour selon les périodes de faible ou forte pousse permet de respecter les temps de repousses du couvert et allonger la durée de vie des prairies. » Les accès sont aussi primordiaux : la réfection ou la mise en place de bons chemins « avec une ou deux portes d'entrées sur certaines parcelles » permet de préserver les pieds des animaux, d’assurer des déplacements rapides, de démarrer plus tôt et de prolonger la saison de pâturage quand la météo est moins favorable. La question de l’abreuvement est importante également. Selon la saison, une vache consomme entre 50 et 150 L d’eau par jour et boit à une vitesse de 15 à 20 L par minute. « Au champ, une réserve d’eau de 10 à 15 L par vache est recommandée. Soit, pour 40 vaches, un bac de 600 L à disposition. » La gestion de l’herbe à la botte Une partie d’une campagne de pâturage se joue dès le déprimage. « Ce dernier peut aussi aider à décaler la pousse de l'herbe s'il n'est pas pratiqué sur l'ensemble des paddocks. Il est important de commencer ce cycle dès le départ en végétation de l'herbe avec une hauteur d'entrée objectif à 8 cm et une hauteur de sortie autour de 3-4 cm. Le but est de favoriser une repousse homogène et plus dense, maîtriser le ratio gaine-limbes et donner de l'espace aux légumineuses. » Une fois la saison d’herbe lancée, l’éleveur doit être très vigilant sur les hauteurs d’entrée et de sortie quitte à prendre la décision de débrayer certaines parcelles pour la fauche. Certains utilisent l'herbomètre une fois par semaine pour prendre leurs décisions. « Il est aussi possible d’utiliser d’autres indicateurs visuels comme sa propre botte, certains marquent ainsi des repères dessus les premières années, le temps de se faire l’œil », détaille Arnaud Cousi. Il existe également des logiciels d'aide à la décision simples, compilant ces résultats de pousse comme « Herb'avenir » disponible au sein du réseau Chambre d’agriculture ou l’outil anglo-saxon Grasshopper avec l’enregistrement des coordonnées GPS des mesures. Autre repère visuel issu de l'observation du comportement du troupeau proposé par le conseiller : « Les vaches broutent en priorité l’herbe sous les clôtures, là où il n’y a eu ni bouse, ni pissat. Ce qu’il reste correspond à la hauteur de sortie qu’il faudrait viser sur l'ensemble de la parcelle. Dans des paddocks 1 jour, cette herbe sous clôture est consommée dans les 2 heures après le début de pâturage et le lendemain matin dans le cas de paddocks 2 jours sans fil avant. » Trouver l’équilibre entre l’auge et le pâturage Et si un paddock est mal brouté et qu’il y a des refus, comment bien équilibrer la part de ration à l’auge pour encourager les vaches à pâturer ? « La difficulté reste effectivement de trouver l'équilibre avec la quantité distribuée à l’auge tout en veillant à ne pas sous-alimenter le troupeau. Un calcul rapide peut être de multiplier la vitesse de pousse hebdomadaire mesurée au sein des différents observatoires de la région par la surface totale offerte par vache au pâturage. Exemple : 0,25 ha/VL x 45 kg MS/j/ha = 11,2 kg de MS de fourrage consommables au pâturage par jour et par vache » Le conseiller donne un nouveau repère. « Si plus de 25 % des animaux sont couchés moins d'une heure après l’arrivée à l’herbe, il est nécessaire de diminuer la part d’alimentation distribuée. Le déplacement des animaux est également un moment privilégié pour observer les remplissages des rumens. On ne doit pas voir apparaître les 3 côtés du rumen sur plus de 30 % des vaches dans un système où les vêlages sont étalés » La modification des pratiques de distribution peut également être un levier. Pour favoriser le pâturage, l’apport de ration à l’auge peut être réalisé en fin de journée à partir du moment où la ration pâturée assure plus de la moitié de l'ingestion totale en fourrage soit 8 à 9 kg de matière sèche selon les races et niveaux de production. Surtout, Arnaud Cousi rappelle un point important : « Dès que l’herbe représente la moitié de la ration, l’apport en protéines est suffisant pour équilibrer la part restante de maïs ensilage. Il est alors possible de se passer de correcteur azoté tout en conservant une ration équilibrée à 95 g de PDIE / UFL. »

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