Les nouveaux blisters (Bactibags) intègrent, dans leur enveloppe (double paroi), un produit bactériostatique qui inhibe le développement des bactéries. - Illustration Conserver la semence sans antibiotique ?
Les nouveaux blisters (Bactibags) intègrent, dans leur enveloppe (double paroi), un produit bactériostatique qui inhibe le développement des bactéries.

Conserver la semence sans antibiotique ?

L’enjeu de l’antibiorésistance n’épargne pas les pratiques liées à l’insémination artificielle (IA). Quelques solutions émergent pour limiter voire supprimer l’utilisation des antibiotiques dans les dilueurs.

La qualité bactériologique des éjaculats dépend de l’hygiène globale dans les verrateries et lors des prélèvements (voir par ailleurs). Dans les doses de semence, la maîtrise de la contamination bactérienne passe par l’ajout d’antibiotiques. Les bactéries sont de plus en plus résistantes aux antibiotiques courants, ce qui conduit à une utilisation de produits de dernière génération ou à l’augmentation des quantités utilisées pour contrôler leur développement. Pour inverser cette tendance, « les nouveaux blisters (Bactibags) intègrent, dans leur enveloppe (double paroi), un produit bactériostatique qui inhibe le développement des bactéries », indique Sylviane Boulot, ingénieur à l’Ifip. Cette technique peut être utilisée en prélèvement à la ferme mais ne dispense pas des efforts à réaliser pour obtenir une semence de base la plus propre possible.

Les spermatozoïdes restent fertiles plus longtemps ce qui peut permettre de diminuer le nombre de livraisons. Pour le moment, ces sachets Bactibags contiennent encore des antibiotiques, par sécurité. Le travail, pour l’éleveur, reste le même qu’avec des doses classiques. En France, quelques centres de collecte utilisent la technique. Elle est également à l’œuvre en Espagne, en Allemagne, en Russie et en Chine. « Des essais montrent une augmentation de la fertilité de 3 à 6 % en comparaison avec des doses classiques », indique Mélina Craus, d’IMV technologies, concepteur du produit. « En France, certains éleveurs utilisateurs ne font plus que deux IA, en moyenne ». Leurs témoignages concordent. Ils se font livrer le vendredi pour des IA du lundi matin, de bonne heure. Les taux de fertilité sont confortés. Le gain économique équivaut au prix d’une dose par truie et au temps de travail.

Le froid, une solution

La conservation à 4 °C est un autre axe de recherche pour se passer des antibiotiques. « Les premiers résultats de fertilité et de prolificité sont encourageants», reprend Sylviane Boulot. « Pour l’éleveur, la technique ne change rien mais elle nécessite de respecter strictement la chaîne du froid ». Il pourrait y avoir un effet verrat ; certains d’entr’eux produisant une semence supportant bien le froid ; d’autres moins … Mélina Craus, d’IMV, assure pourtant : « Nous sommes prêts. La technique est fiable mais nos clients (CIA) hésitent à passer le cap. Les antibiotiques rassurent ». Si la réglementation évolue, le maillon production pourra s’adapter… Un procédé de centrifugation de la semence pourrait offrir une autre solution à la filière, en éliminant les contaminants. La méthode ralentira le process de traitement des prélèvements en CIA. On le voit, la suppression totale des antibiotiques dans les dilueurs est encore difficile mais pas impossible. La pression sociétale impose la poursuite des recherches.

Se démarquer par l’innovation

J’ai un élevage de 200 truies en sélection, sous air filtré depuis de nombreuses années. J’ai développé une activité de vente de doses (CIA) en 2015, sur un marché en décroissance (vente pour les besoins du schéma de sélection Nucleus mais aussi à des naisseurs engraisseurs conventionnels). Mes 80 verrats produisent 150 000 doses dans l’année. J’ai cherché à me démarquer en utilisant les Bactibags d’IMV qui, combinés avec d’autres éléments, assurent une longue conservation de 8 jours (les dilueurs sont encore supplémentés en antibiotiques). C’est intéressant pour un petit CIA comme le mien car je peux ainsi limiter le nombre de livraisons chez mes 126 clients dans le Grand Ouest. J’utilise un automate (Collectis) pour les prélèvements. Je trie mes verrats (tous nés sur l’élevage) sur leur prédisposition à produire une semence saine au niveau bactériologique. Tous ces efforts sur la maîtrise sanitaire ont entraîné un coût supplémentaire de la dose de 25 centimes pour mes clients. À l’avenir, je pense que les antibiotiques seront totalement interdits pour conserver les semences et fortement limités pour soigner les animaux. Autant prendre les devants et commencer à en limiter la consommation. Laurent Boscher, sélectionneur Piétrain et vendeur de semence


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