Christophe Moal, président de la commission artichauts de l’UCPT et producteur à Pleumeur-Gautier (22). - Illustration Artichaut, début de saison très compliqué
Christophe Moal, président de la commission artichauts de l’UCPT et producteur à Pleumeur-Gautier (22).

Artichaut, début de saison très compliqué

La concurrence de l’artichaut des Pyrénées orientales combinée au pic de production en Bretagne fin mai a saturé le marché français La saison semble déjà plombée pour les producteurs bretons.

Sur les 3 variétés d’artichauts charnus que sont le Camus, le Castel et le Cardinal, la récolte bretonne est en avance de plus de 6 000 tonnes au 16 juin comparée à celle de l’année dernière, à même date. La situation est la même en petit violet avec 9 millions de têtes récoltées en plus par rapport à l’année dernière. « C’est un début de saison très compliqué, voire catastrophique après une saison de chou-fleur qui n’a pas été bonne non plus », déclare Christophe Moal, président de la commission artichauts de l’UCPT et producteur de chou-fleur et d’artichaut sur la commune de Pleumeur-Gautier (22).

Les Pyrénées-Orientales prolongent leur récolte

En règle générale en Bretagne, la saison d’artichaut commence progressivement entre le 15 et le 30 mai. « En début de récolte nous sommes très souvent en concurrence avec la production des Pyrénées-Orientales qui s’étale de début mars à la mi-mai et qui succède à la production espagnole. Le problème est que chaque année ils essayent de prolonger un peu plus leur récolte et par conséquent on se retrouve en concurrence avec eux », explique Christophe Moal. Pour juger de l’état des cultures et de l’évolution des surfaces, le producteur de Pleumeur-Gautier se rend sur place avec d’autres légumiers bretons tous les 2 à 3 ans.

« Entre ce qu’ils disent au téléphone et la réalité, il y a un fossé. La dernière semaine d’avril nous sommes partis à 4 producteurs dans les Pyrénées- Orientales. Il restait encore beaucoup de cultures à venir. Avec un mois d’avril qui a été beau et avec de la chaleur, ils avaient une semaine de stock en frigos et au moins 3 semaines de production encore dans les champs. » Les 4 légumiers bretons ont alors eu le sentiment que le début de saison allait être difficile.

Maintenir les 5 200 ha d’artichauts en Bretagne

Les événements climatiques ont été contre nous. Pourtant nous avions un super produit en termes de qualité avec des têtes rondes, des tiges vertes et des bractées bien serrées. Nous vivons peut- être une saison charnière. Depuis des années, nous travaillons pour maintenir les 5 200 ha de surfaces en artichauts en Bretagne. Cette culture annuelle est très gourmande en main-d’œuvre avec 3 dédrageonnages, des binages, un buttage et une récolte manuelle. La main-d’œuvre est dure à trouver, le papy-boom commence à se faire sentir et avec un début de saison comme cette année les jeunes légumiers pourraient se détourner de la production.

Xavier Thépaut, Responsable marché et artichaut à l’UCPT

Plus de 650 tonnes d’artichauts livrés par jour

Jusqu’à fin avril, la sécheresse faisait stagner les plants bretons. Mais à partir du 1er mai et pendant 10 jours, 200 mm d’eau ont copieusement arrosé les cultures de la zone légumière. Avec la chaleur qui a suivi, les plants d’artichauts se sont fortement développés et la récolte a débuté le 15 mai. « Les Pyrénées-Orientales étaient encore en pleine production. On s’est très vite retrouvé avec un prix très bas et beaucoup d’invendus », analyse le président de la commission artichaut de l’UCPT. Au mois de mai la production bretonne qui est en moyenne de 250 tonnes par jour suffit à elle seule à alimenter le marché français.

« Mais là on s’est retrouvé avec un pic de production. Habituellement on coupe les têtes mères puis on a un creux de plusieurs jours. Cette année, on a coupé les têtes mères et une à deux ailes à chaque fois. De 3 à 4 tonnes/ha récoltées habituellement en début de saison, on est passé à 6 tonnes/ha. » La semaine du 29 mai au 3 juin, la production bretonne était en moyenne de 500 tonnes/jour, soit le double de ce que le marché peut absorber. « Nous avons eu des journées à plus de 650 tonnes/jour. »

Peu de potentiel sur les artichauts de 2e année

À la date du 16 juin, les 280 tonnes d’artichauts livrées ont été vendues au marché au cadran. « Nous avons récolté toutes les parcelles de 3 ans et plus, nous sommes actuellement dans les plants de deuxième année. De mi-août à octobre, nous récolterons les artichauts plantés en avril-mai de cette année », précise Christophe Moal. Mais le producteur constate que, sur les artichauts de 2e année, le potentiel n’est pas là. « Nous n’arriverons pas à atteindre le calibre de 650 grammes que veulent les acheteurs. »

De plus, si le temps reste chaud et sec, les producteurs devront devancer les récoltes pour éviter le phénomène de surmaturité. « L’artichaut a alors tendance à blanchir, mûrit trop vite, devient sec et se remplit de foin. » Les producteurs espèrent donc que les températures ne seront pas caniculaires trop longtemps pour éviter que le consommateur ne se détourne de l’artichaut pour aller vers des légumes plus estivaux. Il faudrait aussi que les prix remontent fortement jusqu’à la fin de la saison, mais ça ne compensera jamais ce début de campagne catastrophique. 


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