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Plusieurs niveaux de lecture du marché des céréales

En première lecture, la prochaine campagne céréalière mondiale n’annonce pas de grands changements. Pourtant, il faut parfois lire entre les lignes.

Si l’on s’en tient aux prévisions du Conseil international des grains (IGC), la production mondiale des principales céréales devrait reculer en 2017/18 de 57 Mt (-3 %), dont 33 Mt pour le maïs et 17 Mt pour le blé. Pas de quoi imaginer une envolée des prix cependant, car la consommation serait atone, ne progressant que de 2 Mt. On peut s’interroger sur le bien-fondé d’une si faible estimation. En effet, il y a un an, l’organisme tablait sur une hausse de la consommation 2016/17 de 11 Mt… pour 91 Mt finalement attendus aujourd’hui. Reste que le marché travaille essentiellement avec les chiffres de l’USDA, de la FAO ou de l’IGC, qui se trompent régulièrement mais restent des références.

Depuis plusieurs années, la demande de céréales est le plus souvent sous-estimée en début de campagne, tout comme celle des oléagineux. Pourtant, les tendances lourdes (démographie, niveau de vie, transition alimentaire) restent de bons indicateurs de celle-ci à un horizon de dix ans. Au final, l’estimation des stocks de report mondiaux devrait normalement dépendre beaucoup plus de l’offre (volatile en grande partie à cause de la météo) que de la consommation. Ces derniers sont, pour le moment, annoncés en baisse de 25 Mt (-5 %) d’une campagne à l’autre par l’IGC.

Niveau des réserves mondiales et lieu de stockage

On peut donc raisonner les stocks de différentes manières. La plus courante est de regarder le chiffre brut, que l’on compare d’une saison à l’autre. Ainsi, les réserves mondiales de grains chuteraient de 516 Mt à 491 Mt entre fin juin 2017 et fin juin 2018. So what ! L’indication la plus intéressante est que cette baisse est presque essentiellement liée au recul du maïs (-20 Mt) alors que les stocks de blé seraient quasi inchangés. Pour rappel cette saison, les deux céréales ont vu leurs réserves progresser de 18 Mt chacune.

Le deuxième niveau de lecture, consiste à regarder d’un peu plus près où se trouvent ces stocks. Il y a en effet les réserves mobilisables pour le négoce et ceux qui sont dans les pays producteurs qui n’exportent pas. La volatilité des prix sera d’autant plus forte que peu de marchandises peuvent être remises en circulation en cas de souci. Si on prend l’exemple du maïs, la baisse des stocks est en grande partie observée en Chine où la politique agricole pousse à cela.

Mais aux USA, premier exportateur, les réserves atteignent des records. En blé, on voit que les stocks stagnent en Inde et augmentent en Chine, deux grands pays producteurs et consommateurs. Mais dans les pays impliqués dans le négoce international, ils régressent (-7 Mt). Seulement 129 Mt de blé sont ainsi « mobilisables » pour le commerce en 17/18 contre 137 Mt en 16/17.

Le ratio stocks/consommation

Le troisième niveau de lecture, bien plus intéressant, est le ratio stocks/consommation. En effet, c’est bien le niveau de réserves face aux besoins potentiels qui importe. Pour l’ensemble des céréales, celui-ci passerait de 24,9 % à 23,6 % entre les deux saisons. Cela le place plus bas que juin 2016 et juin 2017 mais au-dessus de juin 2015 (22,8 %). Si jamais la demande est plus élevée qu’annoncée, prenons par exemple +50 Mt au lieu de +2 Mt, alors notre ratio 17/18 chute à 21,3 %, ce qui change la donne et nous rapproche plus de la saison 2013/14. Nous restons cependant loin du seuil d’alerte fixé par la FAO à 18 %.

Enfin, le plus important reste de regarder le niveau de ces ratios par céréales et par blocs exportateurs, Amérique du Sud et Ukraine contre USA pour le maïs, Mer Noire contre UE pour le blé.

Pour l’instant, le marché s’est focalisé sur l’évolution des surfaces semées aux États-Unis, afin d’appréhender la place de cet exportateur important de maïs et de blé où les réserves resteront pléthoriques en fin de saison pour les deux céréales. Le signal « prix » y a logiquement fait diminuer la sole qui leur est consacrée. Mais plus que les surfaces, actées par le marché, ce sont les rendements qui feront l’avenir des cotations et l’allégement ou non des stocks mobilisables en 17/18.

Et tant que les grains de blé, d’orge ou de maïs ne sont pas au chaud dans les silos, tout peut arriver… Mais n’oublions pas de scruter la demande. Et puis enfin, gardons à l’esprit que les prix ne dépendent pas que d’un bilan offre/demande. L’évolution des parités monétaires, en favorisant ou non la rétention dans les campagnes, reste un acteur majeur du marché.

L’Arabie Saoudite, acteur important dans les échanges mondiaux

La demande de céréales sur le marché international reste liée aux besoins des pays ayant peu de ressources naturelles pour satisfaire leur autoconsommation. Plutôt que les traditionnels acheteurs de maïs (Mexique, Japon, UE, etc.) et de blé (Égypte, Indonésie, Algérie, etc.), un pays pourrait bien faire le buzz dans les prochaines années. L’Arabie Saoudite devient en effet, un acteur important dans les échanges mondiaux suite à la mise en place de sa politique de l’eau qui diminue la production de fourrages.

Le pays souhaite aussi engager une révolution en alimentation animale en se détournant de la traditionnelle orge et en structurant ce secteur avec la montée en puissance des fabricants d’aliments industriels, notamment dans le secteur de la volaille. Cela va donner la part belle au blé fourrager et au maïs, tout comme au soja. Notons aussi que le pays souhaite développer le tourisme religieux autour de La Mecque, ce qui contribuera parallèlement à accroître ses besoins en blé meunier.


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