Marchés : suivre les bons indicateurs en blé

La cotation du blé meunier sur le marché à terme parisien vaut exactement le même prix qu’il y a un an, soit 170 €/t. Sur le premier trimestre 2016, la valeur avait reculé jusqu’à 140 €/t avant de rebondir par paliers jusqu’à 170 €/t début juin. La saison 09/10 a offert la même cinétique de prix. Peut-on imaginer le même scénario sur le premier semestre 2017 ? Et quelle amplitude des cours attendre ? On nous rebat les oreilles de stocks mondiaux de blé en forte progression en fin de campagne, soit 235 Mt contre 222 Mt en 15/16 et 197 Mt en 09/10 selon les chiffres du Conseil international des céréales. Mais n’oublions pas que c’est le rapport entre réserves et consommation qui est essentiel. Ce qui caractérise les deux saisons de référence précédemment citées, ce sont les ratios mondiaux stocks / consommation des céréales en général et du blé en particulier, assez identiques sur les 3 périodes. Période de mise en marché Pour autant, ce chiffre cache des disparités importantes en termes de disponibilités chez les différents consommateurs et exportateurs, ce qui explique que cette donnée globale ne suffit pas. Par exemple, 39 % des stocks sont en Chine cette saison, contre 36 % l’an passé et seulement 27 % en 09/10, ce qui veut dire que le ratio stocks /consommation hors Chine baisse de 19,8 % l’an passé à 19,4 % cette saison (et 22,1 % en 09/ 10). Côté exportateur, les réserves américaines sont très importantes depuis deux ans (31 et 27 Mt) mais d’une qualité très moyenne. Le chiffre était aussi important en 09/10 (27 Mt) mais les vendeurs Mer Noire étaient alors moins présents. Cette saison, la Russie et l’Ukraine sont des fournisseurs très actifs et les ventes devraient être en hausse de 48 % par rapport à il y a 7 ans. L’Europe est dans une situation très différente de l’an passé avec une baisse du disponible exportable d’environ 28 %, mais essentiellement imputable à la France. Côté hémisphère sud, dont les récoltes sont mises en vente durant l’hiver, l’Argentine revient dans la course mais doit alimenter un marché régional très demandeur. C’est surtout l’Australie qui devrait être plus présente chez les clients asiatiques cette saison, et donc plutôt en concurrence avec les USA. On comprend qu’au-delà des chiffres bruts, c’est bien le timing de mise au marché des agriculteurs et des négociants qui influence les prix. Et cette faculté ou cette envie de vendre, dépend de nombreux paramètres. Changement de politique agricole Le premier d’entre eux concerne les changements de politiques agricoles et leur anticipation. Il ne devrait pas être un élément de forte volatilité sur le marché mondial dans les prochains mois. Cependant, le gouvernement Trump peut nous réserver des surprises, plus impactantes sans doute sur le maïs - Moins de soutien aux biocarburants ? Limitation des échanges avec le Mexique et la Chine ? - que sur le blé. Mais les deux céréales restent liées au travers du portefeuille des investisseurs. Donc méfiance. Impact des parités monétaires Plus réactives, les parités monétaires sont un facteur déterminant, influençant (ou non) la rétention des producteurs mais aussi les cotations du blé exprimées en dollars sur le marché mondial. Le billet vert est aujourd’hui à un plus haut de 14 ans, face à de nombreuses monnaies de pays concurrents. Logiquement, cela appuie sur les prix à Chicago, d’autant que le pays a beaucoup à exporter. Mais paradoxalement, le risque inflationniste que redoutent les marchés avec les mesures que devrait annoncer Donald Trump fin janvier, pousse d’ores et déjà les investisseurs de long terme à revenir sur les denrées agricoles.La qualité encore disponible et la segmentation du marché qu’elle entraîne, sont aussi des éléments majeurs à suivre. Disons-le clairement, l’UE a mangé son pain blanc en première partie de campagne. - 28 % des exportations européennes Rappelons que cette saison, seulement 59 % du blé européen peuvent être considérés comme de qualité meunière, contre 71 % en 15/16. Or les exportations européennes n’ont reculé que de 0,8 % à fin décembre par rapport à l’an passé, alors que les objectifs de la Commission font état d’un recul attendu de 28 % (-10 Mt). En fait, ce sont bien les tonnages français qui manquent à l’appel (le trafic sur Rouen a baissé de 65 % sur le deuxième semestre 2016). Les ventes européennes (et françaises) sur le premier semestre 2017 seront forcément plus faibles et concerneront plutôt du blé fourrager. Nos concurrents (Mer Noire surtout) ont encore des bons blés à vendre, même si le pourcentage est plus faible que l’an passé. L’écart de prix entre fourrager et meunier devrait donc continuer à s’accentuer. Malgré tout, la moins bonne disponibilité du maïs en France et en Roumanie tient les prix de la céréale fourragère. Et la prochaine récolte enfin, dictera surtout les prix du deuxième trimestre 2017 sur Euronext. * Soft Red Winter Wheat

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