En cumulant les volumes utilisés à la ferme (non collectés), ceux achetés pour les aliments du commerce et ceux vendus à l’exportation, on arrive à un débouché « feed » qui atteint la même part de marché (37 %) dans le bilan 18/19 que les exportations de blé meunier. - Illustration Ne pas se focaliser uniquement sur l’exportation en blé
En cumulant les volumes utilisés à la ferme (non collectés), ceux achetés pour les aliments du commerce et ceux vendus à l’exportation, on arrive à un débouché « feed » qui atteint la même part de marché (37 %) dans le bilan 18/19 que les exportations de blé meunier.

Ne pas se focaliser uniquement sur l’exportation en blé

Depuis le début de la campagne, le prix moyen du blé affiché sur Euronext pour la première échéance est de 200 €/t, un prix nettement plus rémunérateur (+21 %) que celui observé sur l’ensemble de la saison 17/18, de 165 €/t.

Depuis juillet, la bonne tenue relative des cours en blé s’explique, en partie, par le recul des stocks mondiaux attendu fin juin. Une baisse de 10 Mt à 15 Mt selon les sources. Le ratio mondial stocks/consommation hors Chine, rebaisse à 22 % environ, ce qui est un plus bas de 5 ans, comme souligné par de nombreux analystes. Malgré tout, rappelons-nous qu’il n’y a pas de problème de disponibilités pour faire face à la demande mondiale. Celle-ci reste stagnante, ce qui limite les tensions. D’ailleurs, dans les bilans qui font référence (USDA, Conseil international des grains), on note bien des objectifs 18/19 en baisse pour le négoce mondial (1 à 5 Mt), en lien avec un ralentissement de la croissance mondiale. Cette atonie de la demande en blé reste une composante à ne pas perdre de vue et une des explications aux prix actuellement traités, moins élevés que ne l’espèrent les producteurs.

Se comparer sur le marché du blé meunier

Aux USA, les prix ne semblent pas aussi réactifs que dans l’UE. Le prix moyen payé depuis juillet sur le marché de référence de Chicago (SRW1), est en hausse de seulement 12 %, soit 190 $/t (164 €/t) par rapport au 169 $/t (142 €/t) de la saison précédente. En fait, si la dynamique est différente, c’est que l’on compare des torchons et des serviettes. Dans l’Hexagone, nous affichons des volumes de qualité meunière en hausse depuis deux ans, ce qui nous place, de facto, face à des concurrents différents sur la scène mondiale. Ainsi, c’est bien notre compétitivité face au blé HRW2 américain qui doit être surveillé dans les mois à venir, et non celui du SRW.

Tout ce qui peut limiter les disponibilités en blé de qualité dans les prochains mois, aussi bien en Argentine qu’aux États-Unis (avec les pluies actuelles) ou en Russie (moins d’offres sur ce segment cette saison) est porteur de hausse pour les prix français. Mais cela ne veut pas forcément dire que nous vendrons plus. En effet, les prix peuvent progresser sans que nous assurions l’ensemble de nos objectifs d’ici fin juin. Nos ventes vers les pays tiers atteignent 3 Mt au dernier pointage contre 2,45 Mt à date en 2017. Mais avec seulement 34 % des objectifs réalisés, nous sommes en retard sur ce débouché.

Compétition en alimentation animale

La deuxième composante à ne pas perdre de vue, est la part du blé produit consacrée à l’alimentation des animaux. Si nous cumulons les volumes utilisés directement à la ferme (non collectés), ceux achetés pour les aliments du commerce et ceux vendus à l’exportation, nous arrivons à un débouché « feed » qui atteint la même part de marché (37 %) dans le bilan 18/19 que les exportations de blé meunier. Il est donc clair que le positionnement de la céréale face à ses concurrentes fourragères (orge et maïs) a un poids non négligeable dans notre approche prix. Cette saison, notre maïs trouve moins de débouchés en Espagne (qui signe une meilleure récolte) et dans les autres pays de l’UE où la concurrence ukrainienne fait rage. L’orge fourragère, après un départ en fanfare sur le marché mondial en début de saison, doit aujourd’hui batailler avec sa concurrente australienne, en Arabie Saoudite.

En effet, la Chine qui est le principal débouché pour les Australiens, a lancé à leur encontre une procédure anti-dumping, sans doute pour y calmer les prix. Le marché des deux céréales est donc sous pression. L’alimentation animale est un métier de substitution, où les ratios de prix jouent plus que le prix lui-même. L’écart actuel entre les cotations du blé français et des autres céréales ne peut pas se permettre de trop évoluer. FranceAgriMer table sur une utilisation par les fabricants d’aliments du bétail français de 5 Mt de blé cette saison, en recul de 10 %. Cependant, descendre au-dessous de cet objectif ne ferait qu’accroître nos stocks de report. Le marché doit donc trouver un juste équilibre pour la rémunération du blé, dans toutes ses composantes.

Le marché du blé segmenté

Le marché français, tout comme le marché américain, est segmenté. Il existe différentes qualités, dont les parts de marché peuvent évoluer chaque saison selon les conditions culturales et de récolte. Aux USA, le SRW (blé fourrager) représente cette saison 16 % de l’offre et 20 % des exportations, contre respectivement 40 % et 35 % pour le HRW (blé meunier). Dans l’Hexagone, 50 % du blé tendre 2018 se situent dans la classe Premium, contre 17 % sur la moyenne 2013-2017.

Export avec la baisse de l’euro

En novembre, la baisse de l’euro a permis au blé français de trouver des clients à l’exportation sur des destinations éloignées comme la Chine, mais cela n’a pas mieux rémunéré le marché. En effet, le prix moyen sur Euronext pour le mois écoulé affiche 200 €/t, en recul de 1 €/t par rapport à octobre. Si le taux de change envers le dollar, le rouble ou le peso argentin reste un élément non négligeable pour comprendre l’orientation du marché dans les mois à venir, la compétition en alimentation animale restera aussi un facteur déterminant.

1 Soft Red Winter Wheat (blé fourrager)
2 Hard Red Winter Wheat (blé meunier)


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