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Les leviers pour améliorer le revenu en aviculture

Ramassage automatisé, charges diminuées

Gilles Monfort, éleveur de dindes à Goudelin (22), estime économiser 2 300 €/an grâce à l’automatisation du ramassage des volailles. Avec des camions plus adaptés, les coûts de ramassage pourraient encore diminuer et les débits de chantier être accélérés.

Gilles Monfort, éleveur de dindes à Goudelin (22) devant la machine, permettant d’automatiser le ramassage des volailles.
Gilles Monfort, éleveur de dindes à Goudelin (22) devant la machine, permettant d’automatiser le ramassage des volailles.

« À la fin des années 90, nous avons commencé à avoir des problèmes liés à la main-d’œuvre lors des enlèvements de nos dindes. Nous avons souvent été coincés durant des départs de nuit, ce qui nous obligeait à appeler les collègues aviculteurs du secteur pour assurer le chargement des camions », raconte Gilles Monfort, éleveur de dindes, à Goudelin (22). Ce problème de personnel pour assurer le ramassage des volailles n’est pas un cas isolé et tous les aviculteurs de Bretagne ont aussi leur lot d’anecdotes.

Conduire les dindes comme un troupeau de vaches

« On avait entendu dire qu’en Italie, il existait une machine pour automatiser le ramassage des dindes, ce qui a attisé notre curiosité. Les Italiens sont très forts dans ce genre de machines-outils. » En 2000, une dizaine d’aviculteurs bretons décident de partir à proximité de Milan pour rencontrer le fabricant de la machine de marque Ciemme, permettant d’automatiser le ramassage des dindes. « Le patron nous a expliqué que des industriels français avaient déjà fait venir la machine pour des essais sur le territoire, mais ils n’avaient pas trouvé cela concluant. »

Il faut 2 personnes dans la cabine de la machine pour piloter, ouvrir et fermer les caisses des camions.
Il faut 2 personnes dans la cabine de la machine pour piloter, ouvrir et fermer les caisses des camions.

De leur côté, les éleveurs ont été convaincus et totalement séduits par les démonstrations auxquelles ils ont assisté sur des élevages italiens. Bilan du voyage : 4 machines achetées par 4 groupes d’éleveurs. La première est livrée en 2001 chez Gilles Monfort et ses 6 collègues producteurs de dindes autour de Goudelin. « Dans les mois qui ont suivi, une dizaine de machines ont été vendues en Bretagne. Après coup, il y a eu un petit désenchantement, certains aviculteurs n’avaient pas le savoir-faire. Lors du départ de nos volailles, cela se conduit comme un troupeau de vaches. Les dindes doivent aller vers la machine placée en bout de poulailler, ce qui exige des animaux sans problème locomoteur. »

Des camions qui n’ont pas évolué

En France, les camions ne sont pas adaptés pour optimiser le chargement des volailles. « Il faudrait que les camions soient équipés d’un étage de caisses en plus en hauteur pour pouvoir transporter plus de tonnage de volailles », estime Gilles Monfort. Il y a de la compétitivité à gagner sur ce point. Un camion qui part de l’élevage transporte entre 16 et 18 tonnes de dindes. Avec des camions dimensionnés, ils devraient pouvoir embarquer au moins 20 tonnes. « Quand on connaît la problématique des coûts de transport, ce n’est pas rien cette différence de 2 à 4 tonnes. »

4 personnes sur le chantier et 1 h 30/camion

Avant l’achat de la machine,  le ramassage était totalement manuel et il fallait 12 personnes pour envoyer les dindes au pignon ou sur le côté du poulailler et les charger dans le camion. Mais très vite, le télescopique est arrivé et les containers pouvaient alors être envoyés directement dans le bâtiment, ce qui permettait d’avoir le même débit de chantier avec 8 ramasseurs. « Certains éleveurs, alors équipés de machines, ont choisi de passer au système télescopique/container », témoigne Gilles Monfort. Le groupe d’éleveurs du secteur de Goudelin a persisté dans ce système et aujourd’hui, avec presque 15 ans de recul. Ils considèrent que le ramassage est toujours le moins coûteux. « Pour un départ automatisé, il faut 4 personnes en plus l’éleveur et environ 1 h 30 par camion. Un départ au télescopique et container mobilise 8 personnes plus l’éleveur pour un camion chargé en 1 h. Le coût en main-d’œuvre est donc de 162 €/camion à la machine et de 216 €/camion au télescopique », chiffre l’aviculteur.

Il faut évidemment ajouter à cela l’investissement et l’entretien des machines. « À ce jour, nous possédons 4 machines qui tournent entre nos différents élevages, l’investissement et l’entretien représentent 0,56 €/m2/an, ce qui fait un coût machine de 42 €/camion chargé (16 t par camion). La location d’un télescopique est de 90 €/camion. » Au total, selon l’éleveur, un départ de dindes chargées à la machine coûte 204 €/camion et au télescopique 306 €/camion, tout compris équipement plus main-d’œuvre. Gilles Montfort modère ces chiffres : « Il faut ajouter à cela la mise en place de la machine qui prend autour de 20 min et son lavage et la désinfection qui prend 1 h 30 min. Comme nous avons plusieurs machines, chaque éleveur utilise la même lors de tous ses enlèvements ce qui évite de multiplier les nettoyages. »

30 minutes pour charger un camion en Italie

En Italie, les camions sont adaptés pour des départs élevage à la machine. Les cages sont deux fois plus grandes et les camions n’ont pas besoin de faire demi-tour puisque toutes les dindes sont chargées du même côté. Grâce à cette méthode, un camion est chargé en 30 minutes lorsqu’il faut 1 h 30 en France. « Cette adaptation des camions nous ferait faire de grosses économies sur nos charges de ramassage et on gagnerait en débit de chantier », lance l’éleveur. Les Italiens pensent toujours gain de main-d’œuvre et mécanisation, c’est pour ces raisons que beaucoup d’éleveurs ont mécanisé le ramassage et que les camions des abattoirs ont évalué.

2 300 € d’économie/an en mécanisant le ramassage

L’économie réalisée sur l’année grâce à la machine sur l’élevage de 4 250 m2 de volailles de Gilles Monfort se chiffre à environ 2 300 €. « J’ai obtenu ce résultat en me basant sur une moyenne de 2,3 lots/an, ce qui me fait un total de 46 camions à charger sur l’année. En chiffrant une économie de 100 €/camion de différence entre un chargement machine et un départ au télescopique, cela fait un total de 4 600 € d’économisé grâce à l’automatisation. L’économie réelle est environ de la moitié, donc 2 300 € lorsque l’on déduit le temps que je passe à la mise en place et au nettoyage/désinfection de la machine. » L’aviculteur estime que l’économie est bien réelle mais pas phénoménale. Il conclut : « Nous sommes dans un métier de gagne petit, il faut faire attention à tous les postes de charges et la main-d’œuvre en est un. Ici, je n’ai que l’élevage et pas de terres pour rattraper le revenu. Il faut donc que j’optimise tous les postes, je suis sans cesse à chercher des moyens pour gagner du temps et un peu d’argent. » Nicolas Goualan

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