Les serres du lycée de Suscinio produisent de la patate douce pour allonger les rotations des cultures afin d’éviter les problèmes sanitaires.
Sur l’exploitation menée en agriculture biologique du lycée de Suscinio (29), une nouvelle espèce est cultivée : la patate douce. Plantée cette année, la récolte est en cours dans les serres de l’établissement. « J’ai souhaité introduire une nouvelle espèce dans la rotation des cultures sous abris. Avec essentiellement des solanacées, comme les tomates, ou différentes cucurbitacées, la rotation courte des cultures engendre des risques sanitaires. J’ai donc choisi une nouvelle famille, celle des convolvulacées, en cultivant la patate douce. C’est une culture produisant beaucoup de masse végétale, valorisée dans certains pays tropicaux par le bétail. Le liseron, issu de cette même famille, a des caractéristiques semblables au niveau feuillage », explique Philippe Mahé, responsable de l’exploitation du lycée.
Une plante peu gourmande
La patate douce est une culture peu sensible. « Nous avons trouvé des plants en Israël, car le marché français ne propose pas de produits issus de l’agriculture biologique. La plantation a donc eu lieu en mai sur une bâche tissée. Il faut veiller à approvisionner convenablement en eau la patate douce avec une bonne température ambiante. Le volume aérien du végétal est assez conséquent, et le marcottage se fait naturellement dès que la tige touche le sol. Nous avons aussi réalisé des boutures pour l’année prochaine. C’est une culture résistante aux insectes et aux maladies cryptogamiques, il faut toutefois être vigilant aux attaques de rongeurs, car ils semblent apprécier le goût sucré du tubercule », commente Philippe Mahé. Les 800 plants mis en terre sur 650 m² des 900 m² de la serre produisent aujourd’hui 1 à 2 kg par plants, avec un petit bémol. « La patate douce produit habituellement des tubercules allongés de type dahlia. Nous sommes parfois surpris de récolter des produits difformes ou trop gros pour la commercialisation. C’est un problème à régler pour les prochaines campagnes », note le responsable. Dans tous les cas, le fruit de la récolte est cuisiné par les deux chefs de cantines que compte le Lycée, dans les réfectoires finistériens de Ploujean et Châteaulin. La ferme pédagogique commercialise sa production par le biais de l’Armorique Maraîchère de Taulé, qui trouve dans cette denrée de niche les acheteurs potentiels. Le chef de l’exploitation veille d’ailleurs à ne pas trop produire pour ne pas avoir de marchandises sur les bras. « La variété Beauregard cultivée ici est la plus produite aux États-Unis. L’Espagne est aussi un gros producteur »
Une plante voyageuse
Sans doute originaire d’Amérique du Sud, la patate douce s’est propagée à travers le monde notamment avec les Polynésiens qui, après un débarquement en Amérique du Sud, ont ramené l’espèce en Océanie. L’hypothèse d’une dissémination par les courants marins ou par les oiseaux est aussi évoquée. Elle s’est ensuite répandue en Chine, avec pour porte d’entrée les Philippines. Elle a été ramenée en Europe par les conquistadors espagnols et portugais lors de l’exploration du nouveau monde.
Sécurité de la serre
La culture sous abris permet de sécuriser la production de patate douce. « Mon prédécesseur avait tenté l’expérience en plein champ. C’est un coup de poker. La plante aime particulièrement la chaleur, et une année chaude comme celle que nous connaissons peut convenir, mais ce n’est pas le cas tous les ans. Produire sous serre évite ces désagréments et confine l’ambiance. D’autres espèces vont succéder à la patate douce, comme des betteraves ou des oignons blancs », prévoit le gérant. Des astuces viennent compléter le panel de fruits et légumes sortant des serres, comme de la vigne plantée entre les pieds de la structure pour profiter de l’arrosage par goutte à goutte et destiné à alimenter les ventres du lycée. Fanch Paranthoën
