Les marchés de l’œuf impactés par la mise aux normes

L’application de la mise aux normes bien-être animal et le passage aux cages aménagées a perturbé le marché de l’œuf ces dernières années. Aujourd’hui ce sont les négociations sur les accords bilatéraux entre l’UE et les États-Unis qui inquiètent les éleveurs.

101 milliards d’œufs ont été produits dans l’Union Européenne à 27 membres sur l’année 2013. La production a reculé de 7 % ces dix dernières années. En France, après un repli de 2004 à 2012, la tendance s’inverse ; 15 milliards d’œufs ont été produits dans le pays en 2013 ; c’est un niveau de production supérieur de 11 % à la moyenne 2006-2010. Les travaux de mise aux normes bien-être animal dans les élevages et le passage aux cages aménagées avec 750 cm2 par poule ont marqué la baisse significative intervenue entre 2010 et 2012. Les restructurations d’élevages ayant eu lieu durant cette période ont entraîné la forte augmentation de production de 2012 à 2013.

200 œufs par an et par habitant consommés en Europe

« L’Union Européenne est autosuffisante en œufs à 102,5 %. La consommation moyenne étant de 200 œufs par an et par habitant. Dans les extrêmes, 247 œufs/an/habitant sont consommés en Hongrie, alors que les Grecs n’en mangent que 142 », a expliqué Pascale Magdelaine, de l’Itavi, lors de la journée pondeuse et œuf de consommation qui s’est déroulée à Pacé (35) au mois de décembre. Qu’ils proviennent  d’élevages en cage, au sol, plein air ou bio, la répartition des œufs de chaque catégorie sur les marchés nationaux est très contrastée. En France, par exemple, deux tiers des œufs coquille achetés par les ménages sont issus d’élevages équipés de cages. L’Allemagne et les Pays-Bas consomment respectivement moins de 5 % et moins de 10 % de ces œufs, préférant largement ceux venant d’élevages au sol. « Ces pays se sont orientés vers ce mode d’élevage à partir de 2010 avec l’arrivée de la mise aux normes bien-être des cages, ainsi que la pression de la grande distribution et des discounters qui avaient pris la décision de ne plus commercialiser d’œufs issus des cages », rapporte Pascale Magdelaine.

Ce système qui était dominant en Europe avec 92 % des pondeuses élevées en cages en 1996 est passé à 65 % en 2010, puis à 58 % en 2012. En France, certaines associations de défenses des animaux tentent de faire pression sur la grande distribution afin que celle-ci retire de ses rayons les œufs venant d’élevages en cage. Il ne faut pas oublier que les consommateurs, quelles que soient leurs convictions, au moment de l’acte d’achat regardent pour une grande partie le prix. La mise aux normes bien-être a engendré une augmentation de 7 % sur les coûts de production. De plus, dans un système comme le plein air, les œufs coûtent 30 % plus cher à produire qu’en cages. Les consommateurs ne se tourneront donc pas tous vers les œufs alternatifs.

Décrue du cheptel en 2014

Le potentiel de poules pondeuses en production dans l’Union Européenne est supérieur de 6 % à l’année précédente. Pascale Magdelaine annonce : « il y a un amorçage d’une décrue du cheptel en production pour 2014 au niveau européen. » L’impact de cette différence de production a eu un effet direct sur les cours avec une augmentation de 43 % sur les prix de gros en 2012 et une baisse de 19 % sur les 43 premières semaines de 2013. Les négociations commerciales bilatérales entre l’Union Européenne et les États-Unis pourraient aussi avoir de lourdes conséquences sur les marchés de la poudre d’œuf entier. « S’il y a une baisse des droits de douane, la poudre étrangère, notamment en provenance des Etats-Unis, se retrouvera moins chère que celle venant de l’Union Européenne », confie Pascale Magdelaine. De plus, cette poudre est produite avec des œufs venant d’élevages n’ayant pas les mêmes normes qu’en Europe (cf graphique : coût de production selon le système d’élevage). Ils ont par conséquent des coûts de production moindres puisque les cages aux USA sont de 430 cm2 par poule alors qu’en Europe la norme est de 750 cm2 par animal.

Acceptabilité à terme de la cage

Pascale Magdelaine indique  néanmoins qu’il y a des perspectives favorables sur la consommation en raison des atouts de l’œuf (coût, nutrition, impact environnemental), la crise économique semble renforcer ces atouts. « L’évolution des systèmes d’élevage n’est pas terminée au plan européen. Il y a une incertitude sur les mises aux normes dans certains pays de l’UE. On se pose des questions sur l’acceptabilité à terme de la cage, même aménagée lorsque l’on observe des pays comme l’Allemagne ou les Pays-Bas. La position de certains acteurs aval sera déterminante (GMS, RHD, IAA). » Les perspectives sont incertaines au plan international. Quels décisions seront prises lors des accords bilatéraux et quel sera la place du bien-être animal dans ces négociations ? Nicolas Goualan


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