En 2007, quand sa mère a quitté la ferme pour faire valoir ses droits à la retraite, Sébastien L’Hostis a opté pour la traite robotisée. « À l’époque, nous trayions 65 vaches à deux. C’était difficile d’envisager de trouver un salarié. » La salle de traite 2×6 datant de 1978 (avec alimentateurs) était en bout de course. « J’ai regardé le prix d’une installation neuve avec décrochage automatique et un Dac. Un robot n’était finalement pas beaucoup plus cher… » Après quelques visites d’élevage, un automate a été mis en service. « Cela m’a apporté beaucoup de souplesse. Les matinées restaient chargées autour du troupeau. Mais j’étais beaucoup plus tranquille en fin de journée. »
J’ai apprécié la souplesse du robot
Un robot obsolète
« J’ai apprécié mon robot de traite », lâche Sébastien L’Hostis. Mais à l’heure de le renouveler, entre temps, sa « vision » a changé. « D’un côté, la hausse du prix des intrants pesait. De l’autre, je m’interrogeais sur les notions de biodiversité, de décarbonation, de préservation des ressources comme l’eau par exemple. » Entre des recherches personnelles et des vacances inspirantes dans le Sud-Ouest, l’idée d’agroforesterie s’est peu à peu imposée. « Je trouve cela noble de planter des arbres. » Dès 2018, des rangées d’arbres ont été installées tous les 35 m sur 7 ha de prairie. Puis dans toutes les parcelles en 2021. « Dans ce nouveau paysage, le système maïs ne trouvait plus vraiment sa place. C’est le moment où j’ai démarré la conversion de la ferme vers l’agriculture biologique. »
Dès 2017-2018, l’apport de concentré a diminué. Naturellement, la production des vaches a baissé en conséquence et la fréquentation du robot aussi. « Les mamelles étaient moins pleines, les trayons se touchaient parfois. L’automate de 15 ans, vieillissant, avait davantage de difficultés à brancher. J’avais plus de mammites et de cellules… » Les pannes étaient un peu plus fréquentes aussi. « Avec l’herbe qui avait pris de plus en plus de place, c’était plus compliqué. J’en ai eu marre de la traite robotisée qui obligeait les vaches à passer trop de temps au bâtiment dans mon système pâturant. »
Une salle de traite d’occasion
Pour le retour de la traite conventionnelle, l’éleveur a dégoté pour 10 000 € une installation d’occasion grâce au bouche-à -oreille : une 2×8 postes en épi traditionnel démontée dans une ferme à 40 km. Comme Sébastien est très grand, la maçonnerie a été faite en conséquence : le quai est à 1,08 m de hauteur. La première traite a eu lieu le 17 février 2024. « Nous avons tout de suite démarré en monotraite. Des emprunts étaient arrivés à échéance, c’était un moment favorable pour engager un tel changement », estime le producteur. « Le réglage du robot a facilité la transition : à la fin, sans aliment, les vaches ne passaient plus en moyenne qu’1,5 fois par jour à la traite. »
En monotraite, la production de lait a baissé de 25 %. Le troupeau s’est un peu agrandi pour atteindre 75 vaches à la traite. Le TB a grimpé de 4 points et le TP de plus de 2,5 points. « Même si les taux sont mieux payés qu’en conventionnel, cela ne compense tout de même pas la baisse de volume. » Dans cette période plus favorable financièrement, Gwenn L’Hostis a, en parallèle, quitté son métier d’enseignante pour rejoindre son mari. Elle note que la monotraite a un impact favorable sur la reproduction : le taux de réussite en première IA a grimpé de 50 à 72 %. « Dans notre système à 45 ares de pâturage par vache – ​​​​​​​sans maïs, concentré et betteraves – les animaux sont plus en état », apprécient les Finistériens.
Plus de temps, autant d’argent ?
Au départ, il a fallu guider les vaches en salle de traite. Mais après trois semaines, tout le troupeau avait pris le pli. « Le démarrage a été un peu difficile. Nous avons réalisé un contrôle et identifié trois vaches avec beaucoup de cellules. Une fois taries, tout est rentré dans l’ordre. Sur la dernière campagne, nous n’avons jamais eu de pénalité. » Désormais, la traite une seule fois par jour dure presque deux heures, lavage et soins aux veaux compris. Le couple opère généralement ensemble. « Le matin, les mamelles sont bien pleines. Il faut passer un peu plus de temps à nettoyer les trayons. Nous sommes très attentifs à ce que tous les quartiers soient bien vidés et à bien respecter le protocole d’hygiène mammaire. »
À l’aise dans leur nouvelle approche, Gwenn et Sébastien L’Hostis estiment qu’il y a moins de temps de travail à engager. « Il y a moins de réformes et donc moins de génisses à élever, moins de raclage en bâtiment, moins de passage d’engins et de carburant consommé, pas de couverts végétaux à semer… » Ils attendent avec impatience leur bilan comptable. « Même avec 25 % de lait en moins, le résultat ne devrait pas être moins bon », terminent-ils.
Toma Dagorn
Le premier hiver sans maïs
De 25 ha dans l’assolement il y a quelques années, le maïs a ainsi diminué progressivement. « En 2024, je n’en ai pas semé et n’ai donc pas ensilé à l’automne pour la première de ma vie », relève Sébastien L’Hostis. Ainsi, le troupeau vient de passer son premier hiver sans maïs à l’auge. « L’hiver a été assez doux. Les vaches ont pu sortir presque tout le temps. » Dans le régime, les stocks d’enrubannés et d’ensilage d’herbe permettent de passer désormais les mauvais jours.« En modèle robot – maïs -soja et pâturage, le troupeau se situait à 2,2 à 2,4 traites par jour et jusqu’à 39,5 kg de lait par vache par jour à une époque », se rappelle l’éleveur qui, seul, livrait alors 600 000 L de lait par campagne. Aujourd’hui, à deux, 300 000 L sont livrés « en modèle tout herbe – bio et monotraite bio » avec 10 vaches de plus.