Omanori à Saint-Malo (35)
Après ses études de commerce, Ewen Frin a quitté la Bretagne pour s’installer sur Paris et démarrer sa carrière professionnelle comme consultant en innovation dans le domaine du digital. Après 5 ans passés à la capitale, le passionné de plongée et de chasse sous-marine a ressenti le besoin de revenir aux sources et de se rapprocher de la mer. « Avec un père entrepreneur, j’ai toujours eu en tête de lancer mon entreprise. Je voulais que cela soit dans un univers qui compte pour moi et qui valorise le littoral breton. Nous avons une très grande ressource en végétaux marins sur notre littoral et aussi le plus grand champ d’algues d’Europe en Bretagne. Mon projet s’est donc naturellement orienté sur la valorisation de ces trésors marins qui sont à portée de main. »
Livrer des algues fraîches à mes clients sans soucis de rupture
30 espèces autorisées à la consommation
En Bretagne, nous avons accès à 700 espèces d’algues différentes dont 30 sont autorisées à la consommation. « J’ai commencé par appeler une centaine de restaurants pour savoir s’ils utilisaient des algues et comment ils les cuisinaient. Il y a un vrai intérêt pour les algues mais les chefs ont souvent des difficultés à trouver des approvisionnements réguliers en algues fraîches. » Fort de ce constat, Ewen Frin décide de lancer son entreprise Omanari pour apporter des algues fraîches ou déshydratées de qualité directement aux chefs. Il propose aussi un appui sur les techniques de préparation, de conservation et les associations possibles avec les algues au travers de documentation et de démonstrations dans les restaurants. « Je me suis associé avec une entreprise qui récolte des algues pour les commercialiser aux entreprises spécialisées en cosmétiques ou dans l’agroalimentaire afin de travailler sur des espèces pouvant intéresser les restaurateurs. »



Les algues récoltées pendant la marée
Les algues sont récoltées une fois toutes les deux semaines pour les algues sauvages (dulse ou laitue de mer) et plusieurs fois par semaine pour les algues de cultures en mer (Wakame et Kombu royal). Elles sont ensuite conservées vivantes dans des bassins alimentés par de l’eau de mer pompée dans la baie du Mont-Saint-Michel. « Ce système unique me permet de livrer des algues fraîches à mes clients sans soucis de rupture car ils ont besoin d’un approvisionnement régulier dès lors que c’est mis à la carte. Aujourd’hui, je propose une dizaine d’espèces d’algues en frais, des rouges, des brunes et des vertes avec des disponibilités qui varient en fonction des saisons. » Les algues les plus utilisées en cuisine sont le wakamé, le kombu royal et la dulse. Elles sont vendues en frais entre 20 et 30 €/kg et livrées dans des poches en plastique recyclé. Il propose aussi des algues déshydratées, certaines espèces sont déshydratées par le vent et le soleil et d’autres ont besoin d’être en bâtiment avec un air chaud soufflé. La déshydratation fait perdre aux algues 3 à 8 fois de leur poids.
Une oreille de cochon végétale

Ewen Frin récolte aussi différentes herbes marines qu’il cueille sur le secteur de Saint-Malo lorsque la mer est basse. L’herbe la plus connue est la salicorne. Le jeune entrepreneur propose aussi en fonction des saisons de l’obione, de la fenouillette ou de l’aster maritime appelé aussi l’oreille de cochon du fait de sa forme. « Ces herbes marines poussent sur le littoral et l’eau de mer leur donne ce bon goût salin très apprécié des chefs pour agrémenter les plats. » Le jeune entrepreneur ne manque pas d’idées. La collaboration avec Quentin Durand, chef du restaurant Maison Verner à Saint-Malo, a fait émerger l’idée de commercialiser des préparations dédiées à la restauration en y intégrant des végétaux marins dans des formats faciles à utiliser. « L’idée est d’accélérer la démocratisation de ces plantes marines dans les plats proposés dans les restaurants. Je vais aussi lancer très prochainement une sauce inspirée par le littoral breton. » Après un peu moins d’un an d’activité, les retours sont très positifs selon Ewen Frin. Ses algues et herbes marines sont cuisinées par plus de 50 restaurants en France dont plusieurs sont étoilés au guide Michelin. En s’inspirant du terroir, il aime à dire que sa mission est de mettre en avant le merroir breton.
Nicolas Goualan
Les algues sont toutes comestibles
Ewen Frin indique qu’il n’y a pas d’algue vénéneuse comme c’est le cas pour des champignons. Les algues sont toutes comestibles et les espèces autorisées à la consommation sont liées à des autorisations européennes. « Ils ont fait simple en autorisant les algues qui étaient déjà couramment consommées. La demande en algues pour apporter de la diversité dans les plats proposés dans les restaurants est en forte croissance et on se prive d’une grande diversité. J’ai une grosse demande sur de la Dulce poivrée mais je ne peux pas la récolter et la commercialiser car elle n’apparaît pas dans la liste des algues autorisées à la consommation par l’Europe. Maintenant, avec la demande grandissante en algues, j’ai quand même bon espoir que la réglementation évolue positivement et rapidement. »